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Journal de Jules Renard de 1893-1898

Journal de Jules Renard de 1893-1898

Titel: Journal de Jules Renard de 1893-1898
Autoren: Jules Renard
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femme, et dit : « Oh ! la belle putain !... Tiens, celui-là qui fume... » Il leur rit à la face, et il ne craint pas les aventures. D'ailleurs, il ne lui arrive jamais rien.
Il appelle Poil de Carotte « Poil de Brique ».
13 mars.
Vu Maeterlinck montré sur le boulevard par Camille Mauclair. Un ouvrier belge qui s'est acheté un chapeau trop petit et des culottes trop larges. Le génial Claudel reste un moment découvert. Quand on lui présente quelqu'un, Maeterlinck a soudain un agrandissement d'yeux et un balancement du corps qui sans doute signifient : « Ah ! chouette ! »
16 mars.
Nulla dies sine linea. Et il écrivait une ligne par jour, pas plus.
Mais pourquoi Claudel écrit-il d'une façon Tête d'Or, La Ville, et d'une autre ses compositions pour obtenir le poste de vice-consul à New York ? L'artiste doit être le même quand il prie et quand il mange.
    17 mars.
Claudel parle comme la machine à parler de Schwob. Ses lèvres se soulèvent comme de lourdes tentures à de violents courants d'air. Il parle avec un système de ; palettes.
La gloire, c'est d'abord une belle plage. On se roule dans son sable fin, puis, bientôt, on sent une odeur mauvaise, celle des poissons que les femmes viennent vider sur le bord.
Surmenons-nous, surmenons-nous pour vivre vite et mourir plus tôt.
21 mars.
Il ne tient pas à son argent, il ne tient qu'à l'argent des autres.
24 mars.
Il portait sa couronne de lauriers sur l'oreille.
27 mars.
Des yeux bien fendus qu'on aurait plaisir à enlever avec un tournevis.
Ils ne me lisaient pas tous, mais tous étaient frappés.
La haine soutenant mieux que l'amitié, si l'on pouvait haïr ses amis on leur serait plus utile.
Vraiment, je ne pourrais avaler votre livre que si toutes ses lettres étaient en pâtes d'Italie.
Il n'était tantôt méchant et tantôt bon que pour le plaisir de l'être.
Ce matin, je suis allé voir Papon qui fauchait sa luzerne. Jamais il ne se dérange de travailler quand il me voit.
    Il a près de soixante-dix ans.
- Allez ! dit-il. Si j'étais tant seulement bien nourri, j'irais encore loin.
Il s'arrêta de faucher, prit par terre, sous sa blouse, une bouteille d'eau, but à même, et dit :
- Avec un litre de vin de temps en temps, je vous garantis que je ne crèverais pas facilement.
La belle affaire, Papon !
Et moi, parce que j'ai un peu d'argent, que je lis beaucoup de livres et que, même, j'écris, parce que je me lave et que, le soir, je regarde les étoiles du ciel, j'ai pitié de cet homme qui me croit supérieur. Ah ! je ne vaux ni mieux ni moins que lui.
C'est surtout le dimanche que Léon et sa femme s'aiment. En semaine, ils n'ont guère le temps. Le dimanche, après la messe, ils déjeunent vite, se couchent, ne se relèvent que pour aller aux vêpres. Puis ils se couchent encore jusqu'au lendemain matin quatre heures. Ils se séparent alors, retournant, lui à ses bêtes, elle à ses pots.
Il faut aimer la nature et les hommes malgré la boue.
28 mars.
Quand un ami de collège vient taper sur le ventre de Barrès et lui dire : « Te rappelles-tu ? » Barrès répond :
- Oui, oui ! Nous nous sommes rencontrés sur le trottoir.
A propos de L'Ennemi des Lois, Valentin Simond ayant demandé à Barrès ce qu'il voulait :
    - Oh ! dit-il, je n'entends rien aux questions d'argent. Vous me donnerez ce que vous donnez à Anatole France et nous n'en parlerons plus.
- Mais, Maurice, cette histoire que tu racontes n'est pas de toi !
- Oh ! ma chère, répond Barrès à sa femme, quand je trouve une histoire amusante, je serais bien sot de ne pas me l'approprier.
- Vous êtes, parmi les jeunes, le plus fort analyste, me dit Léon Daudet. Goncourt me disait : « On ne peut pas aller plus loin. » Vous prenez l'amour, et vous dites :
« Tenez ! Voilà comment ça se passe. Je vais vous montrer. » Vous devez aimer Taine.
- Pas du tout ! dis-je. Il m'est aussi indifférent que Zola.
- Enfin, vous êtes très sûr de vous. Vous avez une méthode infaillible, et vous vous appliquerez constamment à décortiquer l'univers.
- Je suis un inquiet, dis-je, un troublé, et, si je savais ce que je dois faire demain, je chercherais tout de suite autre chose.
- Le goût est tout en art, qui nous retient d'écrire une chose moins bien que telle autre.
30 mars.
Il faudrait faire du théâtre satirique avec la netteté d'un Beaumarchais et l'abondance d'un Rabelais.
    Il y a des gens qui, toute leur vie, se contentent de dire : « Évidemment ! Parfaitement ! C'est
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