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Helvétie

Helvétie

Titel: Helvétie
Autoren: Maurice Denuzière
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qui s’était vaillamment battu lors de la première campagne d’Italie, assumait maintenant les fonctions de chef d’état-major du général Jean Boudet. Au contraire de son adjoint, ce dernier était un authentique roturier, ancien dragon du régiment de Penthièvre, élu lieutenant du 7 e  bataillon de l’armée de la Gironde en 1792.
     
    Le capitaine Fontsalte voulut savoir quelles étaient les unités déjà présentes en ville.
     
    – La division Boudet est en train de se regrouper pour la revue. Nous avons à Vevey, depuis le 16 avril, un bataillon, fort de huit cents hommes, du 9 e  régiment d’infanterie légère. Les autres bataillons ont rejoint ces jours-ci et puis sont arrivés le 30 e et le 59 e de bataille. On annonce encore quatre escadrons du 15 e  chasseurs. On a vu passer, il y a quelques jours, le 22 e de cavalerie. Il marchait vers… le bout du lac, paraît-il. On attend encore des éléments de la division du général Loison, de la cavalerie et de l’artillerie du général Boudet.
     
    Le gendarme apprit également à Fontsalte, tout en tendant les billets de logement à l’ordonnance, qu’il serait hébergé par la famille Métaz.
     
    – Vous avez de la chance, capitaine, Rive-Reine est une des plus belles et plus vastes maisons de la ville. Une terrasse sur le lac, un jardin d’agrément, des écuries et dépendances, en somme, ce qu’on appelait autrefois chez nous une gentilhommière. Le propriétaire, M. Métaz, le bourgeois Guillaume Métaz – vous verrez qu’ici le titre de bourgeois a encore son importance – aime bien les Français et admire beaucoup le général Bonaparte. Vous ne pouviez mieux tomber.
     
    Fontsalte avait noté l’inflexion pompeuse du lieutenant au mot gentilhommière, choisi avec intention. Il n’en demandait pas tant. Mais le gendarme se montra disert. Il apprit à Fontsalte, dont le regard bizarre intriguait toujours ses interlocuteurs, que M. Métaz possédait plusieurs vignobles, des barques de charge sur le lac, une carrière de pierre à Meillerie et le plus important chantier naval du canton.
     
    – Naturellement, c’est un huguenot, un homme pieux, qui ne manque pas un service au temple, prévint le lieutenant. Mais, s’empressa-t-il d’ajouter, il n’est point compassé, plutôt bon vivant, sait rire et régaler ses amis. Son épouse, M me  Métaz, est toute jeunette, très instruite, catholique et papiste à ce que je crois savoir. C’est un cas dans le pays, car les mariages mixtes, autorisés depuis deux ans, sont encore rares et les catholiques tolérés mais plutôt mal vus. Je vous dis cela, entre nous, capitaine, car je crois qu’il est bon qu’un officier sache dans quelle famille il tombe. Cela évite parfois des bévues, n’est-ce pas ? Les gens d’ici sont assez susceptibles, surtout en matière de religion. Le mois prochain, ça fera six mois que je suis à Vevey : j’ai appris à les bien connaître.
     
    – Votre faculté d’observation, votre perspicacité et l’aisance avec laquelle vous dispensez d’utiles informations font honneur à la gendarmerie, lieutenant, dit Fontsalte en saluant avant de s’éloigner.
     
    L’ironie du compliment échappa à l’intéressé mais fut clairement perçue par Titus.
     
    – Vous avez très bien tourné ça, capitaine. Pour l’observation, ils ne craignent personne ! Je suis sûr que ce barjaque aurait pu vous dire combien de fois par semaine ce bourgeois, chez qui vous allez dormir, mignotte sa femme ! commenta, hilare, le maréchal des logis.
     
    Fontsalte ne releva pas le propos émis par Trévotte à l’égard d’un lieutenant qui, tout gendarme qu’il fût, méritait que l’on respectât ses galons.
     
    Les cavaliers parcoururent un bout de rue et débouchèrent sur la place du Marché, qui occupait une vaste surface de terre battue.
     
    – Un vrai champ de manœuvre, dit Trévotte, évaluant la superficie de l’esplanade, en pente douce jusqu’au lac et bordée, sur trois côtés, de maisons, dont quelques-unes de belle apparence.
     
    Côté sud, au-delà du Léman, dominant la masse sombre des montagnes, les pics savoyards, file de pénitents géants à cagoule blanche, se découpaient sur le ciel limpide où couraient quelques nuées. Blaise de Fontsalte apprécia la féerie du décor.
     
    – Peut-on rêver pareil théâtre pour une revue militaire ! dit-il.
     
    Il nota mentalement que les consignes, envoyées la veille
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