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Faux frère

Faux frère

Titel: Faux frère
Autoren: Paul C. Doherty
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l’acier. Édouard, près du trône, venait de sortir sa grande épée du fourreau, qui pendait au dossier de la chaise.
    — Vous avez l’intention de me tuer, Sire ?
    Édouard se contenta de lui jeter un coup d’oeil furieux. Corbett comprit qu’il était au bord d’une de ses crises de colère spectaculaires. Il en reconnaissait les symptômes : visage pâle, lèvres mordillées, gestes de menace avec l’épée, coups de pied nerveux dans la jonchée. Comme un gamin, songea Corbett, comme un enfant gâté qu’on empêche de faire ses quatre volontés. Le clerc revint vers l’huis. La coupe lancée par le monarque manqua sa tête de justesse et alla rebondir sur la porte avant qu’il ne l’atteignît. Corbett allait soulever le loquet lorsqu’il sentit la pointe d’une dague sur son cou. Warrenne se tenait derrière lui. Un mot du roi et Corbett était un homme mort ! La garde de son poignard fut repoussée dans sa ceinture.
    — Et maintenant, Monseigneur ? murmura le clerc en observant, par-dessus son épaule, le souverain qui, affalé sur le trône, le suppliait du regard, tout courroux envolé.
    — Revenez, Hugh ! marmonna Édouard. Pour l'amour de Dieu, revenez !
    Il jeta son épée dans la jonchée. Le clerc comprit, avec sa perspicacité habituelle, que la patience royale était à bout. Il s’avança vers lui.
    — Rengainez votre dague, Warrenne. Nous sommes amis, par le ciel, pas trois voyageurs ivres dans une taverne ! Corbett, asseyez-vous !
    Il scruta le visage du clerc. Ce dernier vit les yeux du monarque s’embuer de larmes et grogna en son for intérieur. Il pouvait affronter un roi déchaîné, mais pas un roi larmoyant, à la fois pitoyable et extrêmement dangereux. Il avait dernièrement assisté à une rencontre entre le souverain et sa fille aînée. Celle-ci avait contracté un mariage secret avec un soupirant que son père considérait comme indigne d’elle. Édouard était passé du courroux aux larmes, puis, voyant que cela n’était guère efficace, il en était venu aux coups et avait jeté au feu les bijoux de sa fille avant de bannir la pauvre princesse et son époux dans le manoir le plus glacial de tout le pays. Ses accès de rage pouvaient avoir des conséquences encore plus graves. Certaines villes écossaises qui avaient eu la témérité de résister à un siège avaient été prises d’assaut et toute la population – femmes et enfants y compris – massacrée sans pitié.
    Le monarque claqua des doigts. Warrenne, sa dague rengainée, leur servit du vin, puis se rassit en avalant bruyamment sa boisson et en lançant au clerc des regards torves, comme s’il mourait d’envie de lui trancher la tête.
    — Je suis abandonné de tous ! se lamenta le roi. Ma bien-aimée Aliénor est morte. Burnell a disparu, lui aussi. Vous souvenez-vous de ce vieux gredin, Hugh ? Par la gueule de l’enfer, je regrette de ne pas l’avoir à mes côtés en ce moment !
    Il essuya ses larmes d’un revers de main. Corbett s’installa plus confortablement pour admirer Édouard – l’acteur jouant un de ses rôles favoris : le monarque chenu pleurant la gloire passée. Corbett n’avait pas oublié, bien sûr, Aliénor, la belle épouse castillane de son souverain. Lorsqu’elle était en vie, le roi réprimait ses emportements. Quant au chancelier Burnell, évêque de Bath et Wells, c’était un fin renard qui avait aimé Corbett comme son propre fils.
    — Tous sont partis, gémit à nouveau le roi. Mon fils me hait, mes filles épousent qui elles veulent. J’offre paix et prospérité aux Écossais, qui me les jettent à la figure, et Philippe de France joue au chat et à la souris avec moi.
    Il saisit le poignet de Corbett.
    — Mais je vous ai, Hugh, mon bras droit, mon épée, mon bouclier et mon défenseur !
    Corbett se mordit brusquement les lèvres. Il ne devait pas sourire, ni regarder Warrenne qui avait plongé le visage dans son hanap.
    — Je vous en supplie, l’implora Édouard. J’ai besoin de vous, Hugh, juste pour cette fois-ci ! Allez àLondres et réglez cette affaire ! Vous verrez votre épouse et votre petite fille.
    Il resserra sa prise.
    — Vous l’avez prénommée Aliénor. Je ne l’oublierai pas. Vous irez, n’est-ce pas ?
    Sa poigne de fer se durcit encore.
    — Oui, Sire ! Mais quand toute cette affaire sera élucidée et la partie gagnée, tiendrez-vous votre parole ?
    Édouard sourit hardiment, mais Corbett lut la
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