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Faux frère

Faux frère

Titel: Faux frère
Autoren: Paul C. Doherty
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« Édouard ne veut pas me laisser partir, mais lui reste-t-il longtemps à vivre ? » Le regard rivé au sol, il fit glisser la flûte dans ses mains, caressant avec plaisir le bois poli.
    — Envisager la mort du souverain est de la haute trahison, chuchota-t-il.
    Mais le roi avait la soixantaine. Qu’arriverait-il à sa mort ? Le prince de Galles, grand jeune homme blond, était d’une tout autre trempe : amateur de chasse et de beaux garçons, il goûtait fort les joies du lit et de la table.
    À la mort d’Édouard, se demandait Corbett, que ferait son successeur ? Le nouveau monarque l’emploierait-il ou le remplacerait-il ? Que dirait Maeve ? À la pensée de son épouse, Corbett se rappela ce qu’avait annoncé le roi au sujet de De Craon.
    — Que cherche donc ce goupil, ce maudit rouquin ? s’interrogea-t-il à mi-voix.
    Il se leva du lit pour s’approcher de la table qui croulait sous les parchemins. Deux feuilles attirèrent son attention : l’une, du vélin sale et maculé de traces de doigts, était couverte d’un mélange de chiffres et de signes cabalistiques, code employé par son agent à Paris ; l’autre était la traduction de ces phrases codées, nettement rédigée à l’encre bleu-vert par l’un des clercs du Sceau privé. Corbett s’en empara, la parcourut rapidement et poussa un juron. Il avait eu l’intention de mettre le roi au courant. L’agent, qui se faisait passer pour un négociant venu à Paris acheter du vin, avait aperçu le hors-la-loi et fugitif anglais Richard Puddlicott en compagnie du garde du Sceau de Philippe IV, Guillaume de Nogaret, dans une taverne près du grand portail du Louvre. Puddlicott était recherché en Angleterre pour vol, assassinat – il avait tué un courrier royal – et surtout pour escroquerie. On n’avait pas son signalement précis, mais ses agissements frauduleux avaient fait s’envoler les bénéfices de plus d’un marchand. Autrefois clerc à Cambridge, il utilisait à présent son intelligence remarquable et son esprit d’à-propos pour soutirer à ses victimes leur argent durement gagné. Il réapparaissait à intervalles réguliers, soit en Angleterre, soit en France, prêt à jouer ses tours pendables. Aucun représentant de la loi n’était parvenu à lui mettre la main au collet. L’agent de Corbett à Paris le décrivait comme étant un blond rubicond à la légère claudication. Pourtant le sénéchal de Bordeaux le signalait comme étant un brun au teint cireux et au corps bien découplé.
    Corbett relut la lettre. Tout ce que son agent avait pu apprendre, c’était que le garde du Sceau avait parlé à Puddlicott, mais il ignorait quelle avait été la teneur de leur conversation. Guillaume de Nogaret avait semblé prêter une oreille fort attentive et bienveillante aux propos de Puddlicott.
    « J’aurais dû le dire au roi ! » se morigéna Corbett avant de se diriger à grands pas vers le seuil, les documents dans sa main crispée, et d’ordonner d’une voix de stentor à un clerc de les apporter immédiatement au monarque.
    Ensuite il contempla la pièce en désordre. L’agitation, née de l’entrevue avec son souverain, s’était apaisée et il décida qu’il valait mieux partir sur-le-champ.
    — Plus vite je serai en route, plus vite j’en aurai fini, marmonna-t-il. Bon, où se trouve mon fidèle et honnête Ranulf ?
    L’honnête Ranulf, son serviteur, était en compagnie de gardes de la Maison du roi. Accroupi dans un coin de la grand-salle, il leur faisait précautionneusement miroiter les délices d’une partie de dés. Le visage blême sous sa tignasse rousse, il arborait un air sérieux et ses yeux pers, pareils à ceux d’un chat, parcouraient la pièce sans ciller.
    Il murmura d’un ton solennel :
    — Je ne m’y connais guère en dés.
    Les soldats grimacèrent un sourire à l’idée qu’ils allaient plumer un pigeon. Ranulf fit tinter ses pièces.
    — Mon compagnon et moi avons quelques économies !
    Il se retourna vers Maltote, le palefrenier de Corbett. Ce blond au visage replet, qui avait l’allure d’un garçon de ferme sans malice, fixait les soldats d’un regard de hibou, un rictus aux lèvres. Ranulf sourit : son traquenard semblait marcher. Ils lancèrent les dés. Ranulf perdit, puis se mit à gagner au milieu des cris de « C’est la veine des débutants ». Le jeu l’absorba complètement jusqu’au moment où il vit les gardes lever des yeux
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