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Clio Kelly et l'éveil de la gardienne

Titel: Clio Kelly et l'éveil de la gardienne
Autoren: Angélique Ferreira
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Je viens de le remarquer, Ellen ! Je vous remercie ! lui répondit-il en sortant de sa douche, frigorifié, les cheveux encore pleins de shampooing.
    Quelques secondes plus tard, alors qu’il tentait d’enlever le surplus de savon qui lui brûlait les yeux, on frappa à la porte de la salle de bain. C’était la voix d’Ellen, à laquelle il ne répondit que par des grognements.
    — Je t’ai fait chauffer de l’eau ! lui dit-elle. Ouvre cette porte, on t’entend de la rue !
    Les yeux fermés, il eut envie de l'envoyer au diable mais la laissa pénétrer dans la pièce. Il serra néanmoins avec force la serviette autour de ses hanches d'un geste pudique, ce qui amusa la vieille femme.
    — Allons, mon enfant, je t’ai déjà vu sous tous les angles. Alors mets ta tête au-dessus du lavabo sans faire d’histoire !
    Avec un sourire complice, Morgan s’exécuta et se laissa rincer les cheveux tandis qu’Ellen alternait eau chaude et eau froide pour ne pas l’ébouillanter.
    Ellen May était entrée au service de la famille Chevalier alors qu’elle venait de fêter son dix-huitième anniversaire. Au début, elle avait travaillé pour les grands-parents de Morgan qui venaient de s’installer à Paris avec leur jeune fils de dix ans, Patrick. Elle avait servi de femme de chambre, chargée seulement du ménage.
    À la mort de ses parents, une vingtaine d'années plus tard, Patrick avait gardé Ellen au service de la maison pour seconder son épouse dans les tâches ménagères.
    À la naissance de Morgan, la vieille femme, n’ayant pas d’enfant, s’était prise d’affection pour le bébé dès le premier regard et avait eu pour tâche de veiller sur lui en tant que nourrice. Une grande complicité s’était alors instaurée entre ces deux êtres, complicité qui, aujourd’hui encore, persistait malgré la majorité du jeune homme.
    — Tu t’es levé bien tôt, constata Ellen lorsqu’elle eut fini de lui laver ses cheveux châtain foncé. Tu as reçu un appel important ?
    — Je pense que Nicolas a décidé de nous confier une nouvelle affaire. Je dois avouer que je commence à être fatigué de prendre des photos de grèves, de meetings politiques ou encore d’affrontements entre les jeunes et la police.
    À tâtons, il chercha la serviette. Lorsque ses doigts se refermèrent enfin sur l’objet de son désir, il la posa sur sa tête tout en maintenant celle qu’il avait autour de ses reins. L’obligeant à prendre place sur un tabouret, Ellen lui frictionna les cheveux afin de les sécher aussi vite que possible.
    — Tu sais, Ellen, que cela ne me déplaît pas d’être assis avec juste un truc qui me fait penser à une feuille de vigne à la taille pendant que tu me sèches les cheveux… mais je crois que je peux le faire moi-même, non ? dit-il avec humour.
    — Sache que je continuerai à m’occuper de cette tignasse, même lorsque tu auras quatre-vingts ans. Et puis tu as les plus jolies fesses qu’il m’ait jamais été donné de voir !
    — Parce que tu seras toujours là lorsque j’aurai quatre-vingts ans ? s’exclama-t-il, faussement horrifié.
    — Ne le sais-tu donc pas, Morgan ? Je suis cette maison !
    Un rire résonna dans la pièce ; Morgan se redressa en déposant un baiser sur sa joue et la regarda avec la même tendresse infantile qu’autrefois. Le temps ne semblait avoir aucune prise sur elle. Il n’avait jamais osé lui demander son âge mais il la savait assez vieille pour avoir servi trois générations de Chevalier.
    Elle avait dû être très séduisante dans sa jeunesse et elle avait conservé un certain charme ; l’éclat brillant de ses yeux, un mélange de vert et de jaune, pouvait faire penser à un félin. Ses cheveux autrefois blonds étaient à présent gris et retenus en chignon, qui lui donnait un air sévère pour ceux qui ne la connaissaient pas. Plus petite que Morgan, elle évoquait une de ces bonnes vieilles grands-mères adorant gâter leurs petits-enfants.
    Maladroitement, il retourna dans sa chambre et s’habilla avec rapidité. Dévalant plus qu’il ne descendit les escaliers, il traversa le salon en grandes enjambées pour se rendre dans la cuisine. L’odeur des croissants chauds lui étreignit l’estomac et accentua sa faim. Sa main se referma sur l’une des viennoiseries qui venaient tout juste d’arriver de chez le boulanger.
    Un froissement de tissu attira son attention lorsqu’il repassa par le salon, un pauvre sourire
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