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Claude, empereur malgré lui

Claude, empereur malgré lui

Titel: Claude, empereur malgré lui
Autoren: Robert Graves
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j’entends, par opposition aux provinces frontières, dont je désignais moi-même les gouverneurs militaires en ma qualité de commandant en chef) ne s’attardent pas dans Rome, désœuvrés, comme ils le faisaient en général, jusqu’en juin ou juillet –  époque où la navigation devenait agréable  – , mais se mettent en route dès la mi-avril.
    Messaline et moi poursuivant la révision complète de la liste des citoyens avions constaté qu’un grand nombre de sujets indignes y figuraient. Je confiai à mon épouse presque entièrement le soin de ce travail   ; des milliers de noms furent rayés et remplacés par des dizaines de milliers d’autres. Je ne voyais pas d’objection à l’allongement de la liste. La citoyenneté romaine conférait à tous ceux qui la possédaient un immense avantage sur les affranchis, provinciaux ou étrangers, et tant qu’elle ne deviendrait pas une association ou trop ouverte, ou trop exclusive, mais garderait une importance justement proportionnée à l’ensemble de la population de l’Empire romain –  soit environ un citoyen sur six ou sept  – , elle demeurerait un facteur essentiel de stabilité dans la politique mondiale. J’exigeai seulement que les nouveaux citoyens fussent des hommes de valeur, de naissance honorable et de réputation sans tache, qu’ils fussent capables de parler latin et que leur connaissance de la loi, de la religion et de la morale romaines fût suffisante, qu’enfin dans leur comportement et leur tenue ils fussent dignes de l’honneur qui leur était fait. Tout postulant, dûment qualifié et parrainé par un sénateur de bon renom était inscrit sur la liste. Je comptais toutefois sur lui pour faire un don proportionné à ses moyens au Trésor public, dont il allait désormais bénéficier de bien des façons. Ceux qui n’avaient personne pour les parrainer s’adressaient indirectement à moi par l’intermédiaire de mes secrétaires et Messaline se renseignait alors sur leurs antécédents. Je mettais sur la liste ceux qu’elle me recommandait, sans les interroger plus avant. Sur le moment, je ne compris pas qu’elle extorquait de lourdes redevances aux candidats pour prix de son intervention auprès de moi et que les affranchis, particulièrement Amphéus et Polybe, que j’avais provisoirement affectés à cette tâche, empochaient, eux aussi, d’énormes sommes d’argent. De nombreux sénateurs qui patronnaient des prétendants à la citoyenneté eurent vent de ces agissements et commencèrent à toucher des dessous de table (selon l’expression)   ; certains même tâtèrent de la publicité clandestine par l’intermédiaire d’agents appointés annonçant que leur tarif de parrainage était inférieur à celui des autres sénateurs. À l’époque, je demeurais dans une totale ignorance. Tous pensaient, du moins je le suppose, que je profitais largement de la situation, Messaline me servant d’intermédiaire, et que, par conséquent, je fermerais les yeux sur leur petit trafic.
    Je savais, j’en conviens, que nombre de mes secrétaires recevaient des postulants des cadeaux en argent. J’en discutai un jour avec eux et leur dis   : «   Je vous autorise à accepter des présents, mais je vous interdis de les solliciter. Je ne vous ferai pas l’injure de suggérer que l’on pourrait vous pousser, en vous soudoyant, à commettre des falsifications ou toute autre irrégularité, et je ne vois pas pourquoi vous ne devriez pas être récompensés pour avoir rendu service à des gens qui vous prennent votre temps et votre travail et pour avoir, ceteris partibus, fait passer leur affaire en priorité. Si une centaine de candidatures au même poste sont envoyées simultanément, que rien ne permette de choisir entre les candidats et que, pourtant, dix seulement peuvent voir aboutir leur requête, alors je vous trouverais vraiment bien sots de ne pas opter pour les dix candidats les plus en mesure de vous prouver leur gratitude. Mon ami et allié fidèle, le roi Hérode Agrippa, aime à citer un proverbe juif –  ou plutôt une loi juive passée en proverbe  – «   Ne muselle pas le bœuf qui écrase le blé   ». C’est un dicton juste et plein d’à-propos. Mais je ne veux pas de marchandage indécent, pas de mise aux enchères des faveurs et des priorités   ; et si je découvre que l’un de mes bœufs est plus soucieux d’engloutir une brassée de blé que de l’écraser, je l’emmènerai
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