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Au Pays Des Bayous

Au Pays Des Bayous

Titel: Au Pays Des Bayous
Autoren: Maurice Denuzière
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moustiques. Il fallait aussi redouter la rencontre de tribus indiennes vindicatives. Cavelier de La Salle, qui fréquentait les indigènes depuis quinze années et parlait plusieurs langues ou dialectes, ne manqua pas une occasion, après avoir revêtu son plus bel habit, de rendre visite, tout en se tenant sur ses gardes, aux caciques des villages établis sur les rives du fleuve, de leur tendre son calumet, prouvant par là qu'il connaissait les usages et ne souhaitait que la paix. On l'entendit maintes fois répéter : « Je viens offrir aux nations de l'Amérique l'alliance du plus puissant des rois de la terre : le roi de France. » Il ajoutait même avec un certain aplomb : « Toutes les nations d'En-Haut se sont déjà engagées sous la domination d'un si grand prince. » Il faisait distribuer les cadeaux les plus prisés par les Sauvages, haches, couteaux, aiguilles à coudre, étoffes de couleur, chemises, cabans, chaudrons, marmites, colliers, bracelets, épées damasquinées pour les chefs. En échange de ces présents, les Français recevaient, en plus des offrandes rituelles, calumets, robes de fourrure, colliers de perles et pleines pirogues de vivres. Les Indiens sédentaires et cultivateurs offraient généreusement maïs, pois, patates douces, riz sauvage, melons d'eau, potirons, poulets, dindes, viande de bison ou de cerf séchée et quantité de fruits excellents. Il arriva même qu'un chef de tribu fît livrer aux visiteurs de succulentes pâtes de fruits, moulées en forme d'animaux et dignes de l'étalage d'une confiserie anglaise.
    Les explorateurs n'avaient pas manqué de constater, après avoir franchi le confluent de l'Ohio et salué les Kaskaskia, amis du père Marquette, que les Indiens du Sud étaient beaucoup plus évolués que ceux du Nord, surtout plus disciplinés et plus gais. Les Kappa ne perdaient jamais l'occasion de plaisanter et les Arkansa, occupants d'un vaste territoire au confluent du Mississippi et de la rivière qui porte leur nom, se souvenaient de la visite du jésuite et de Louis Joliet, en 1673. L'enseignement de l'évangéliste n'avait cependant laissé aucune trace chez ces animistes polygames. Cinquante lieues plus bas, chez les Taensa, Cavelier et ses compagnons découvrirent huit villages construits autour d'un lac et, dans celui où résidait le chef, la capitale, des maisons de pisé rigoureusement alignées au voisinage de vergers bien entretenus. Le cacique, monarque absolu, habitait un palais aux murs de trois mètres de haut peints à fresque et surmonté d'un dôme fait de cannes tressées. Il reçut ses hôtes en cape blanche, coiffé d'une impressionnante tiare emplumée et leur expliqua qu'on avait trouvé les perles fines qu'il portait aux oreilles dans des coquillages d'une lointaine mer de l'Ouest et non du Sud comme auraient voulu l'entendre dire les explorateurs. Il accepta d'échanger ces pendentifs contre le bracelet que lui proposa Tonty. Le vieillard usait de quatre épouses souriantes et chapeautées de paille. Douze guerriers assuraient sa garde. Des domestiques stylés le servaient à table et il ne sortait jamais sans que fût balayé le chemin qu'il devait emprunter. Ses conseillers étaient les chefs des villages établis autour du lac. Dans un temple, face au palais, où de nobles vieillards entretenaient un feu perpétuel devant un autel surmonté de trois aigles, les guerriers venaient, au lever et au coucher du soleil, faire leurs oraisons. « Ils hurlaient comme des loups. C'était là toute leur prière ! » rapporta le père Membré.
    L'expédition, arrivée le 22 mars chez les Taensa, dut passer plusieurs jours en leur compagnie puisqu'elle ne se présenta que le 26 mars devant le village des Natchez, où l'on évita de justesse une bagarre quand les Français s'aperçurent qu'ils étaient attendus sur la rive par deux cents guerriers prêts à faire usage de leur arc. La vue du calumet brandi par Tonty fit sur les excités plus d'effet que les mousquets pointés par ses compagnons. On pétuna de concert et les Natchez invitèrent les explorateurs à dîner. Ceux-ci se reposèrent jusqu'au dimanche de Pâques, jour qu'ils choisirent pour reprendre leur navigation. En descendant le fleuve, que les indigènes appelaient tantôt Espíritu Santo, comme l'avait nommé Soto en 1540, tantôt Messi-Sipi, les explorateurs étaient assurés de trouver la mer à dix journées du village des Natchez. Ces derniers, qui, d'après
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