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Amours, Délices Et Orgues

Amours, Délices Et Orgues

Titel: Amours, Délices Et Orgues
Autoren: Alphonse Allais
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sa forte patte sur l’échine, et :
    – Eh bien, mon vieux Loup, digéras-tu à ta convenance ?
    – On ne saurait imaginer mieux, mon Lord.
    – Alors, à mon tour.
    Le Loup, à ce moment, vit que le Lion ne badinait pas, et il devint blanc comme un singe.
    – Quoi ! vous allez me manger ?
    – Non, je vais me gêner ! Car j’ai une faim de Loup, si j’ose m’exprimer ainsi.
    – Mais alors, pourquoi n’avez-vous pas, ce matin, dévoré le Chacal, puisque lui était dans son tort ?
    – Dans son tort ou non, le Chacal vivant exhale une odeur qui me coupe l’appétit.
    – Et moi, pourquoi avoir attendu jusqu’à ce soir, puisque vous me teniez ce matin en votre pouvoir ?
    – Ce matin, tu étais trop maigre, mon pauvre ami.
    Et, passant à l’action, le Lion mangea le Loup, dans des conditions exceptionnelles de prestesse et de bonne humeur.
    MORALITÉ
    Soyez chacals ou soyez loups,
    Les juges sont plus forts que vous.
    Écoutez-moi (la chose est sûre),
    Méfiez-vous d’la magistrature !
     
    ÉBÉNOID
    Or, un matin, toute rose d’émoi, elle lui murmura :
    – Ça y est ! j’en suis sûre, maintenant. Ça y est !
    Et lui, tout au plus réveillé, grommelant, s’étirant :
    – Quoi ? qu’est-ce qu’y est ?
    Mais elle, plus rose encore, si rose qu’à peine on entendit sa voix :
    – Mon ami, le ciel a béni notre union.
    L’homme sursauta de ravissement :
    – Tu blagues ? douta-t-il encore, trivial.
    – Je ne blague jamais avec ce sujet-là.
    Ce fut alors une joie par toute la chambre.
    Mariés depuis tantôt huit ans, les époux Duzinc n’avaient jamais pu, malgré d’incessants labeurs, obtenir l’ombre d’une progéniture.
    À quoi tenait cet état de choses ? On ne sait pas. La faute à l’un ? La faute à l’autre ? La faute aux deux ?
    Quien sabe  ? comme disait Montaigne au toréador qui le rasait de ses questions indiscrètes.
    Du coup, M. Duzinc décida qu’il n’irait pas à son bureau ce jour-là.
    Père ! il allait être père !
    Au déjeuner, sauta le bouchon du mousseux Léon Laurent.
    Et au dîner aussi.
    À la santé du petit !
    Ou de la petite !
    La grossesse de madame Duzinc se présenta aussi bien que les plus favorisés phénomènes de ce genre.
    Comme toutes ses congénères, M me  Duzinc eut des envies.
    Quelques-unes, étranges. Par exemple, celle de déguster cette odieuse ratatouille : des confitures de fraises mélangées de tripes à la mode de Caen. Ce mets n’était pas d’un très joli ton.
    Et de plus étranges encore : renouveler tout leur mobilier, leur mobilier clair, qu’on remplacerait par un autre en ébène. Un mobilier en ébène ! Voilà qui serait gai ! M. Duzinc, net, refusa !
    La belle-mère de M. Duzinc eut beau représenter à M. Duzinc tout le danger qui peut résulter d’une non-exécutée envie, M. Duzinc tint bon. Un mobilier en ébène ! Jamais de la vie !
    La pauvre petite M me  Duzinc pleura toutes les larmes de son corps. Et puis, arriva ce qui devait arriver : au bout du temps requis. M me  Duzinc mit au monde un enfant noir. Un enfant d’un très beau noir.
    Je dois, pour l’honneur de la vérité, finir par où j’aurais dû commencer :
    M me  Duzinc, neuf mois avant la naissance du surprenant baby, avait cru devoir partager la couche d’un jeune attaché à la légation d’Haïti.
    Cette histoire de mobilier d’ébène n’était qu’une frime.
    Habile, d’ailleurs.
     
    CUPIDES MÉDICASTRES
    Certains journaux sont fort durs, en ce moment, pour le corps médical.
    MM. les médecins de Paris, au dire des folliculaires, auraient décidé la création d’un Livre noir, où seraient inscrits les noms de tous les malades mauvais payeurs, et se seraient mutuellement engagés à ne plus les soigner avant le règlement des notes préalables.
    Et les gazettes de crier à l’inhumanité et d’appeler sur les médecins les foudres vengeresses du tollé général.
    La situation très délicate que me crée, dans le gouvernement, le dernier vote du Sénat, m’interdit de prendre parti pour ou contre, en cette question.
    Néanmoins, je dois reconnaître que certains praticiens ne brillent pas par une excessive sensibilité et qu’ils suppriment volontiers les saucisses dans le système d’attache de leurs fidèles toutous.
    Il s’en rencontre même dont le mémoire ne concorde jamais avec celle du malade.
    Témoin ce médecin qui réclamait le prix de deux visites à
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