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Alias Caracalla

Alias Caracalla

Titel: Alias Caracalla
Autoren: Daniel Cordier
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vingt et un ans. Je devais obtenir l’autorisation de
mon père, qui refusa. Ce fut l’origine, le jour de l’an
1940, d’une explication atroce : je proclamai ma
volonté de rompre avec lui « pour toujours », tandis qu’il me maudissait. Le destin, hélas ! m’entendit : il mourut en novembre 1943, sans que je l’eusse
revu.

    À la suite de cette rupture, j’allai vivre chez mamère et mon beau-père à Bescat, petit village de la
vallée d’Ossau. Pour la première fois de mon existence, j’étais libre et vivais en famille. J’ai honte
d’avouer que la drôle de guerre fut la période la plus
heureuse de ma jeunesse : outre le bonheur d’intégrer
une vraie famille, je partageais mon temps entre
lecture, ski et politique. C’est ainsi que le printemps
1940 fut marqué par quatre événements pour moi
décisifs : le projet d’un journal pour le cercle, la
campagne de Maurras en faveur de Pétain, mon
premier amour et la débâcle de l’armée française.

    Le projet d’un journal n’était pas nouveau. À
l’imitation de mon grand-père Cordier, je rêvais
d’être journaliste. Bien que d’une vaste inculture, je
n’y voyais nulle contradiction. Avec un camarade
du cercle Charles-Maurras, Jean Arfel, nous projetions de nous emparer de Guyenne et Gascogne , mensuel de l’Action française remplaçant Le Nouvelliste .
Notre projet fut l’objet d’une longue correspondance. Pendant ce temps, j’assurais, à Pau, la direction du cercle La-Tour-du-Pin, dont le président et les
animateurs avaient été mobilisés.

    À partir de mars 1940, Maurras entreprit une campagne en faveur de la désignation du maréchal Pétain,
ambassadeur de France à Madrid, au poste de président du Conseil. Je m’engageai avec passion pour
le soutenir. Le postulat de Maurras était convaincant  :
la guerre était la fonction des militaires ; pour la
gagner, la France devait en confier la conduite au
meilleur d’entre eux, le maréchal Pétain, vainqueur
de Verdun. Cette campagne, à laquelle je participai
avec mon ardeur coutumière, fut interrompue parle début des opérations militaires : le 10 mai 1940,
l’Allemagne envahissait la Belgique.

    Appartenant à la classe 1940, je devais attendre
encore deux mois ma mobilisation. Je piaffais
d’impatience.

    Un nuage voila cependant l’azur de ces jours parfaits. Dans le courant du mois de mai, Maurras rédigea plusieurs éditoriaux dénonçant l’erreur criminelle
d’un éventuel armistice : « Nous disons, nous — Faisons la guerre. À fond. » Bien qu’informé, comme
tous les Français, dès l’automne de 1939 des cruautés des Allemands au cours de la destruction de la
Pologne, je ne compris pas le pessimisme de cet
article  : Qui songeait à demander l’armistice ? Pourquoi s’alarmer puisque notre victoire était acquise ?

    Pourtant, la conclusion de Maurras ne souffrait
pas d’équivoque : si nous voulions échapper à la
destruction de la France, la seule solution était de
combattre furieusement jusqu’à la victoire, puisque,
sans elle, la France serait rayée de l’histoire. Nos
vœux furent en partie exaucés : le 15 mai, le maréchal Pétain devenait vice-président du Conseil. Cette
première étape vers le pouvoir prouvait que Maurras
avait eu raison : la guerre était gagnée.

    Quelques jours plus tard, mon enthousiasme belliqueux fut stoppé net : le 20 mai, j’apercevais Domino
au ski ; le 30, je faisais sa connaissance. Elle ressemblait, en fuseau, à un garçon, mais c’était une
fille au visage orné d’une fossette désarmante, qui
préparait son bac au lycée Louis-Barthou de Pau.
Saisissement du premier amour et confusion des
sentiments : il reléguait à jamais, pensais-je, les
passions « impures » des collèges.

    Pour marquer ce nouveau départ, je brûlai tous
les billets et lettres des garçons que j’avais aimés.Dès lors, mon temps se consuma dans la rédaction
de ses devoirs de français et d’une correspondance
débridée. Avec l’amour, la littérature reprenait ses
droits tandis que la guerre perdait les siens.

    Lorsque, au début de juin, la radio annonça que
la classe 1940 serait mobilisée par anticipation, je
tombai des nues : La guerre ? Quelle guerre ?

    Même au milieu de cet incendie sentimental, une
activité me reliait encore à l’actualité politique : la
vente de L’Action française à la criée. Contre toute
attente, le chiffre des
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