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Trois Ans Dans Une Chambre à Gaz D'Auschwitz

Trois Ans Dans Une Chambre à Gaz D'Auschwitz

Titel: Trois Ans Dans Une Chambre à Gaz D'Auschwitz
Autoren: Filip Muller
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camp m’avait appris que les conditions d’existence des détenus dans un commando de spécialistes étaient toujours meilleures et plus supportables que celles de la grande masse. C’est pourquoi je me présentai sans hésiter. Le groupe des électriciens dont je faisais maintenant partie sans avoir la moindre notion de cette spécialité fut affecté, après la désinfection habituelle, au camp annexe de Gusen I. Pendant le déplacement, je m’entretins avec un camarade français, spécialiste en électricité, et nous nous mîmes d’accord pour un travail en commun. Il fut entendu qu’il me guiderait en cas de difficulté.
    Notre nouveau lieu de travail était un chantier de montage des usines Messerschmitt. D’un côté, des prisonniers de guerre russes travaillaient dans un grand vacarme métallique au rivetage de pièces de carrosserie d’avions, alors que nous-mêmes étions chargés de procéder au montage des fils et des câbles électriques des carlingues placées sur cales. Une fois notre travail terminé, les carrosseries étaient camouflées et elles étaient expédiées sur Linz, pour le montage des moteurs.
    C’était déjà le mois d’avril. La situation n’avait jamais été pire pour l’ennemi. Les voies de chemins de fer étaient détruites et les voies terrestres pilonnées sans répit sous le feu rasant des Alliés, paralysant tout le trafic. Nous partions chaque jour au travail en deux équipes alternativement et fort heureusement mes appréhensions relatives à mon inaptitude professionnelle se révélèrent non justifiées. Comme aucun avion ne quittait plus le hall du montage, nous étions pratiquement sans travail et nous restions la plupart du temps inactifs autour des appareils. Il était évident que la fin était maintenant imminente et que cette situation ne pouvait plus se prolonger davantage. Mais les jours nous semblaient une éternité. Nous mourions de faim, à l’affût de tout ce qui nous paraissait comestible : de la vaseline grasse, de l’herbe, jusqu’à de la terre lourde et humide !…
    Nous vivions la dernière phase de notre existence de détenus. Il s’agissait donc de rassembler toutes nos forces pour ne pas périr misérablement de faim ou d’épuisement au dernier instant. Les attaques aériennes incessantes des Alliés nous contraignaient à nous tenir la plus grande partie du temps dans un abri aménagé dans une colline à quelques centaines de mètres du hall de montage. Lorsque les sirènes commençaient à hurler, les S.S. armés de leurs matraques nous repoussaient, en criant, dans les abris. Un jour, au moment d’une nouvelle alerte, je courais jusqu’à l’abri lorsque je me trouvai soudain en face de Gorges, la matraque brandie et criant : Los ! Dalli, dalli ! M’ayant reconnu, il me laissa cependant fuir en courant, en retenant le coup de matraque qu’il s’apprêtait à m’assener.
    Arrivé à l’abri, j’allai me terrer dans un recoin, car je ne tenais pas du tout à le rencontrer de nouveau. J’étais paralysé par la peur et par l’angoisse. La tête me tournait et je me demandais ce qui maintenant allait arriver. Il n’y avait aucun doute possible il m’avait reconnu. Allait-il me dénoncer ?
    Cette question m’obsédait, mais il ne se passa rien de ce que je redoutais. Après l’alerte aérienne, je retournai avec les autres dans l’atelier de montage et me dissimulai à l’écart sous un avion d’où je guettai sans discontinuer le retour éventuel de Gorges. Deux jours plus tard, il reparut devant moi comme un fantôme effroyable. Mais il me parla comme si de rien n’était. Il demanda même de mes nouvelles. Je repris donc contenance et lui fis comprendre que je n’avais rien à manger.
    Je demeurais cependant extrêmement anxieux, Gorges pouvant à tout moment me dénoncer à la direction du camp. Dans un état de perpétuelle dépression et d’incertitude, j’étais littéralement dévoré par cette obsession, et fus incapable de trouver, la nuit, le moindre repos. Je pensais bien aux possibilités de travailler dans un autre commando, mais je ne connaissais personne capable de m’aider dans ce sens.
    Le lendemain matin, je me rendis le cœur battant dans l’atelier de montage, et me glissai sous un fuselage d’avion dans un endroit très reculé, afin de ne pas tomber sur Gorges. C’était peine perdue, car il ne tarda pas à me découvrir. À ma grande surprise, il avait apporté un morceau de
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