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Traité du Gouvernement civil

Traité du Gouvernement civil

Titel: Traité du Gouvernement civil
Autoren: John LOCKE
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tout, grand-chose, et personne ne pouvait en être incommodé et en recevoir du dommage, à cause que la même abondance subsistait toujours en son entier, en faveur de ceux qui voulaient user de la même industrie, et employer le même travail.
    Avant l'appropriation des terres, celui qui amassait autant de fruits sauvages, et tuait, attrapait, ou apprivoisait autant de bêtes qu'il lui était possible, mettait, par sa peine, ces productions de la nature hors de l'état de nature, et acquérait sur elles un droit de propriété : mais si ces choses venaient à se gâter et à se corrompre pendant qu'elles étaient en sa possession, et qu'il n'en fît pas l'usage auquel elles étaient desti­nées; si ces fruits qu'il avait cueillis se gâtaient, si ce gibier qu'il avait pris se corrom­pait, avant qu'il pût s'en servir, il violait, sans doute, les lois communes de la nature, et méritait d'être puni, parce qu'il usurpait la portion de son prochain, à laquelle il n'avait nul droit, et qu'il ne pouvait posséder plus de bien qu'il lui en fallait pour la commodité de la vie.
     
    38. La même mesure règle assez les possessions de la terre. Quiconque cultive un fonds, y recueille et moissonne, en ramasse les fruits, et s'en sert, avant qu'ils se soient pourris et gâtés, y a un droit particulier et incontestable. Quiconque aussi a fermé d'une clôture une certaine étendue de terre, afin que le bétail qui y paîtra, et les fruits qui en proviendront, soient employés à sa nourriture, est le propriétaire légitime de cet endroit-là. Mais si l'herbe de son clos se pourrit sur la terre, ou que les fruits de ses plantes et de ses arbres se gâtent, sans qu'il se soit mis en peine de les recueillir et de les amasser, ce fonds, quoique fermé d'une clôture et de certaines bornes, doit être regardé comme une terre en friche et déserte, et peut devenir l'héritage d'un autre. Au commencement, Caïn pouvait prendre tant de terre qu'il en pouvait cultiver, et faire, de l'endroit qu'il aurait choisi, son bien propre et sa terre particulière, et en même temps en laisser assez à Abel pour son bétail. Peu d'arpents suffisaient à l'un et à l'autre. Cependant, comme les familles crûrent en nombre, et que l'industrie des hommes s'accrut aussi, leurs possessions furent pareillement plus étendues et plus grandes, à proportion de leurs besoins. On n'avait pas coutume pourtant de fixer une propriété à un certain endroit; cela ne s'est pratiqué qu'après que les hommes eurent composé quelque corps de société particulière, et qu'ils eurent bâti des villes : alors, d'un commun consentement, ils ont distingué leurs territoires par de certaines bornes; et, en vertu des lois qu'ils ont faites entre eux, ils ont fixé et assigné à chaque membre de leur société telles ou telles possessions. En effet, nous voyons que, dans cet endroit du monde qui demeura d'abord quelque temps inhabité, et qui vraisemblablement était commode, les hommes, du temps d'Abraham, allaient librement çà et là, de tous côtés, avec leur bétail et leurs troupeaux, qui étaient leurs richesses. Et il est à remar­quer qu'Abraham en usa de la sorte dans une contrée où il était étranger. De là, il s'ensuit, même bien clairement, que du moins une grande partie de la terre était com­mune, et que les habitants du monde ne s'appropriaient pas plus de possessions qu'il leur en fallait pour leur usage et leur subsistance. Que si, dans un même lieu, il n'y avait pas assez de place pour nourrir et faire paître ensemble leurs troupeaux; alors, par un accord entre eux, ils se séparaient  [2] , ainsi que firent  * Abraham et Lot, et étendaient leurs pâturages partout où il leur plaisait. Et c'est pour cela aussi qu'Ésaü abandonna son père  * * et son frère, et établit sa demeure en la montagne de Séir.
     
    39. Ainsi, sans supposer en Adam aucune domination particulière, ou aucune propriété sur tout le monde, exclusivement à tous les autres hommes, puisque l'on ne saurait prouver une telle domination et une telle propriété, ni fonder sur elle la pro­prié­té et la prérogative d'aucun autre homme, il faut supposer que la terre a été donnée aux enfants des hommes en commun; et nous voyons, d'une manière bien claire et bien distincte, par tout ce qui a été posé, comment le travail en rend propres et affectées, à quelques-uns d'eux, certaines parties, et les consacrent légitimement à leur usage; en sorte
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