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Templa Mentis

Templa Mentis

Titel: Templa Mentis
Autoren: Andrea H. Japp
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qui le suivait tel un chiot, le harcelait de questions au sujet de l’art médical. La voracité de connaissances du garçonnet de presque douze ans enchantait et émouvait Druon. Quant à son intarissable bavardise, elle faisait agréablement passer les heures.
    Pourtant, à son étonnement, Huguelin, l’air grave, restait bien silencieux depuis un moment.
    — Que rumines-tu ?
    — Je ru… je ne rumine point. Je réfléchis à vos révélations d’hier.

    La veille, Druon avait jugé le moment opportun pour se confier à l’enfant. En vérité, plus qu’opportun puisqu’il se sentait coupable d’entraîner Huguelin dans une aventure dont il pressentait les dangers, sans toutefois parvenir à les cerner. Au fond, il eût mieux valu que leurs routes se séparassent, même si le jeune mire s’était attaché à Huguelin au point de le considérer en jeune frère, peut-être en fils. Mais celui-ci refusait maintenant de le quitter pour les mêmes raisons d’attachement. Il n’en demeurait pas moins que Druon devait le mettre en garde contre des menaces obscures mais redoutables.
    Druon lui avait donc narré sa douce vie d’avant, lorsqu’il se nommait Héluise, aux côtés de son incomparable père, Jehan Fauvel, aesculapius . En plus de l’art médical, son père lui avait enseigné les mathématiques, l’astronomie, le grec 2 et le latin. Héluise était devenue une bretteuse de talent, dans le plus grand secret, frappant de taille 3 et d’estoc 4 avec aise. Jehan Fauvel avait martelé qu’elle devait feindre l’aimable ignorance de la douce gent et ne se prétendre férue que de poésie, de broderie, dotée d’un certain talent pour le chant et la guiterne 5 , en plus de son application à la prière. Magnifiques souvenirs que ces heures d’études, de passion, d’étonnement qu’ils avaient partagées, enfermés dans le petit bureau de son père qui redoutait les indiscrétions de serviteurs. Et le monde d’Héluise s’était soudain écroulé lorsqu’elle avait appris l’arrestation de Jehan par l’Inquisition*, la Question à laquelle il avait été soumis, lorsqu’elle avait compris que Foulques de Sevrin, évêque d’Alençon, qu’elle considérait tel un parrain, l’ami d’âme de son père, avait trahi ce dernier, le livrant à ses tortionnaires. Affolée, désespérée, elle avait soudoyé un garde afin d’abréger les horribles souffrances de Jehan Fauvel. Elle avait pleuré des nuits entières, luttant pied à pied contre son imagination qui lui faisait entrevoir les derniers instants de celui-ci dans sa geôle.
    Obéissant au dernier ordre de Jehan, juste avant qu’il ne rende sa belle âme, Druon de Brévaux, jeune mire itinérant, avait pris la place d’Héluise. Ses lourds cheveux bruns frisés avaient crissé sous la lame qui les tranchait. Puis, la fuite par les routes afin d’échapper aux griffes implacables de l’Inquisition, sans savoir ce qui motivait son acharnement. Certes, Héluise n’ignorait pas que son père poursuivait une quête depuis longtemps, sans avoir le moindre soupçon quant à sa nature. Druon avait alors décidé de rejoindre Alençon, de pousser Foulques de Sevrin dans ses retranchements, d’exiger des explications, peut-être même de le tuer.
    Chemin faisant, après avoir secouru Huguelin, souffre-douleur, souillon et apaisement de sens d’une répugnante gargotière, leur route avait croisé celle du seigneur Béatrice, baronne d’Antigny, honorable, valeureuse mais féroce. Une haute et maigre femme brune aux yeux presque jaunes veillait sur la baronne d’Antigny. Igraine, une inquiétante mage dont Druon était maintenant certain qu’elle poursuivait un but confidentiel dans lequel il jouait un rôle important. Igraine… Igraine avait vu le bûcher sur lequel la dépouille de Jehan Fauvel avait été ligotée, su que Druon était fille. Elle avait mentionné une pierre rouge, aussi rouge que le sang qu’elle avait fait verser, insistant sur le fait que le mire la devait retrouver coûte que coûte afin d’en percer le secret. La mage avait également évoqué une femme belle, très redoutable, dont il se devrait défier. Surtout, elle avait affirmé que la quête d’Héluise, travestie en Druon, reprendrait à l’est.
    Sur les conseils de son père, Héluise, ou plutôt Druon, se méfiait des mages, des prétendus sorciers et devins, bref des bonimenteurs qui exploitaient la crédulité, la peur, l’envie, la cupidité
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