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Souvenir d'un officier de la grande armée

Souvenir d'un officier de la grande armée

Titel: Souvenir d'un officier de la grande armée
Autoren: Jean-Baptiste Auguste Barrès
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opinion sur notre jeune armée, qu’on venait en quelque sorte de recréer. Je pris toutes mes mesures, en passant de fréquentes inspections, pour que mon bataillon fût aussi beau, aussi nombreux que possible. Je réussis complètement.
    18 juin. – La garnison, les troupes arrivées pour les revues du roi et les gardes nationales des arrondissements de Strasbourg et Wissembourg, prirent les armes pour border la haie, depuis la porte Blanche ou Nationale, jusqu’au Palais royal. Le roi fit son entrée solennelle à cheval, ayant à ses côtés ses deux fils, les ducs d’Orléans et de Nemours, accompagnés par les maréchaux Soult et Gérard, par le ministre du Commerce, comte d’Argout, et par un immense état-major. Il était précédé et suivi de douze régiments de cavalerie, et de plusieurs centaines de voitures alsaciennes ornées de feuillages et de rubans, pavoisées de drapeaux tricolores et remplies de jeunes et fraîches paysannes, costumées dans le goût du pays. Cette entrée dans une ville guerrière célèbre, fut magnifiquement imposante. Un concours immense de citoyens et aussi d’étrangers à l’Alsace, une allégresse générale et de vives acclamations, spontanément manifestées sur le passage du roi, prouvaient qu’il avait l’assentiment des populations entières.
    L’esprit public était encore bon, les menées démagogiques n’avaient pas encore perverti les masses, et changé en indifférence coupable les témoignages d’affection que le roi avait reçus jusqu’alors.
    Le passage fini et les rangs rompus, les officiers se réunirent pour aller chez le roi, où ils furent présentés par le général Brayer, commandant la division. Nous trouvâmes là le grand duc de Bade et une nombreuse suite, les envoyés des souverains allemands, et les ambassadeurs ou agents français attachés à ces cours.
    19 juin. – Nous prîmes les armes de grand matin, pour être rendus de bonne heure au polygone. Ce vaste champ de manœuvre fut bientôt rempli de troupes de toutes armes, et d’une foule de spectateurs français et allemands. Indépendamment des gardes nationales à pied et à cheval, il y avait trois régiments d’infanterie (59 ème de ligne, 5 ème et 15 ème légers), douze régiments de cavalerie, deux d’artillerie, et plus de cinq cents voitures attelées, telles que canons, caissons, fourgons, équipages de pont, etc. Les étrangers, comme les nationaux furent étonnamment surpris de voir qu’en si peu de mois, on était parvenu à réorganiser l’armée, à tripler son effectif, à monter la cavalerie et à créer un immense matériel de campagne. Grâce au maréchal Soult, la France avait déjà 40 000 hommes bons à faire la guerre, 600 pièces de canon attelées, et tous les autres services militaires portés à ce degré, presque miraculeux, de nombre et d’instruction.
    L’arrivée du roi fut saluée par les éclatantes acclamations d’un peuple immense, par une décharge générale de toutes les pièces de canon, par les clairons, les tambours et les musiques de tous les corps formés en bataille sur plusieurs lignes. Lorsque le souverain eut pris place sur une vaste estrade, élevée sur un des côtés de ce vaste carré, les colonels ou chefs de corps se rendirent auprès de lui pour recevoir de ses mains les drapeaux et étendards de leur régiment, qu’ils vinrent faire reconnaître et saluer par leurs subordonnés. Les cris de « Vive le roi ! » se joignant aux bruyantes batteries des tambours qui battaient aux champs, annoncèrent que les soldats saluaient avec enthousiasme l’insigne national, qui devait les guider et les conduire à la victoire.
    Cette reconnaissance terminée, le roi passa successivement devant tous les corps. En arrivant au centre du régiment, il me fit appeler, me remit la croix d’officier de la Légion d’honneur, et me dit qu’il s’estimait très heureux de pouvoir récompenser, par une nouvelle distinction, mes longs et loyaux services. Cet avancement dans l’ordre me fut très agréable, sans cependant me flatter autant que lorsque je fus nommé simple légionnaire en 1813. Le général Schramm avait eu la complaisance de venir me prévenir et de me complimenter sur ma nomination, avant que Sa Majesté me décorât elle-même.
    Dans cette journée, je recevais ma troisième décoration et prêtais serment à un sixième drapeau. Le premier, avec un aigle, au Champ de Mars, sous l’Empire ; le deuxième en
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