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Piège pour Catherine

Piège pour Catherine

Titel: Piège pour Catherine
Autoren: Juliette Benzoni
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pourtant, avant même que Catherine eût donné le premier ordre, le château avait commencé à se préparer et à revêtir son armure de guerre.
    C'était la première fois, depuis sa construction, qu'il allait essuyer le feu de l'ennemi. Il n'y avait pas un an qu'il était terminé. Les Montsalvy l'avaient fait bâtir en remplacement de la vieille forteresse du Puy de l'Arbre, jadis détruite par ordre du Roi, avec les sommes importantes que leur versait chaque année leur ami, le marchand Jacques Cœur, auquel, dans un moment difficile, Catherine avait spontanément offert le plus fastueux de ses joyaux, le fameux diamant noir, maintenant déposé au trésor de Notre-Dame du Puy-en-Velay.
    Cette fois, on l'avait bâti près de la porte sud, adossé au rempart dont sa masse crénelée doublait et même triplait la muraille à cet endroit.
    Et, dans sa majestueuse rudesse, avec ses épaisses courtines de granit gris bien garnies de hourds en cœur de chêne, son haut donjon carré flanqué de minces tourelles dont la masse dominait les hautes fenêtres sculptées du logis neuf et la dentelle des girouettes dorées, avec les sept tours à bec renforçant sa muraille, il ressemblait assez à l'un de ces dragons de légende, tapis à l'entrée des profondes cavernes pour en défendre les trésors. Mais saurait-il bien, l'heure des assauts venue, soutenir le feu de l'ennemi, le choc des perrières et des mangonneaux ou de toute autre machine de guerre amenée contre ses murailles ?
    Tout à l'heure, quand, au détour d'un taillis, Catherine était presque tombée sur les loups du Gévaudan occupés à leur sinistre besogne de mort, elle n'avait guère pris le temps d'évaluer leur force. Elle avait tout juste trouvé celui de tourner la tête de son cheval et de prendre la fuite quand un cri l'avait signalée et Josse, qui l'avait suivie, n'en avait pas vu davantage. Qui pouvait savoir ce que les Apchier amenaient dans leurs bagages ? Et Catherine craignait pour son château, comme elle craignait pour ses gens. C'est qu'il était un peu son œuvre personnelle.
    C'était elle qui en avait posé la première pierre, qui en avait discuté les plans avec l'abbé Bernard et le frère architecte de l'abbaye, au temps où chacun à Montsalvy, et elle, la toute première, croyait bien ne jamais revoir messire Arnaud en ce bas monde. Elle l'avait voulu imprenable, inaccessible, mais elle n'ignorait pas qu'il eût fallu, pour cela, bâtir sur quelque roc abrupt et lui donner pour premiers gardiens le vertige et la solitude. Elle avait tenu à ce qu'il fût, avant tout, la sauvegarde de la ville et de l'abbaye, quitte à sacrifier un peu de sa propre sécurité. Et, ainsi incorporé aux remparts de Montsalvy, le château avait ses faiblesses que la châtelaine connaissait et dont la pire, sans doute, était le danger de trahison toujours possible.
    Certes, Catherine avait pleine confiance dans ses vingt-cinq hommes d'armes et dans Nicolas Barrai, leur chef. Mais qui pouvait dire si, parmi les quelque onze cents âmes encloses dans la cité, il ne s'en trouverait pas une qui fût assez vile pour se laisser tenter par les trente deniers de Judas ? Il y avait déjà un précédent : cet homme, ce Gervais Malfrat, qu'elle avait fait chasser hors des remparts à coups de fouet parce qu'il lui répugnait d'ordonner une pendaison et qui avait rejoint Bérault d'Apchier... Une sotte clémence, en vérité, et qui mettrait Arnaud hors de lui-même s'il l'apprenait, car Gervais Malfrat méritait cent fois la corde ! C'était un voleur, agile comme un renard, et qui savait aussi aisément se glisser dans les poulaillers que dans le lit des filles. Il volait les pères et engrossait les filles mais, chose curieuse, si les premiers enrageaient et juraient d'avoir sa peau, aucune des filles ne se plaignait jamais. On aurait dit qu'elles étaient heureuses de leur malheur, malgré la honte encourue.
    Et puis, il y avait eu la dernière, la jolie petite Bertille, la fille de Martin, le tisserand de toile. Celle-là n'avait pas supporté sa honte et, un matin, on l'avait repêchée dans la Truyère, aussi livide et froide que cette aube de malheur. Et, malgré le chagrin de sa mère, malgré les prières de Catherine, on n'avait pas pu l'enterrer en terre bénite mais au bord du chemin, comme une maudite. Le seul adoucissement que la châtelaine avait pu offrir aux parents avait été de faire creuser la mince tombe auprès de la chapelle du
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