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Perceval Le Gallois

Perceval Le Gallois

Titel: Perceval Le Gallois
Autoren: Jean Markale
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réfléchi au sujet de son fils et de ses domaines, elle finit par se résoudre à se retirer dans un endroit désert, en pleine forêt, qui lui épargnerait tout contact avec le monde turbulent qu’elle n’avait, pour son malheur, que trop connu. Aussi n’y admit-elle pour compagnie que des femmes et quelques hommes paisibles, aussi incapables de combattre que de guerroyer. De la sorte fut élevé le fils de la Veuve Dame, à l’abri du fracas des armes, dans les solitudes de la Gaste Forêt.
    L’enfant allait tous les jours dans les bois pour jouer et lancer des baguettes et des bâtons. Puis, au fur et à mesure qu’il grandissait, il prit l’habitude de chasser. Il s’était fabriqué des javelots avec des branches de houx, et il s’était même taillé un arc et de petites flèches avec lesquels il tuait les nombreux oiseaux qu’il venait à croiser. Mais à peine avait-il abattu l’un de ceux dont le chant retentissait parmi les frondaisons que, désespéré de son forfait, il se mettait à pleurer et s’arrachait les cheveux. Et pourtant, chaque jour, il ne pouvait résister à la tentation. Alors, il redoublait de tristesse et de remords.
    C’était néanmoins un fier garçon, bien bâti et musclé, au visage agréable, au teint blanc, avec des sourcils bien dessinés. Tous les matins, il allait se baigner dans la rivière qui serpentait dans la vallée. Rien ne troublait sa paix, sauf le chant des oiseaux dont les doux accents pénétraient son cœur et dilataient sa petite poitrine. Il courait alors tout en larmes vers sa mère. Celle-ci lui disait : « Qui t’a fait de la peine ? Tu es sorti d’ici pour aller dans la vallée : as-tu rencontré quelqu’un qui t’ait manqué de respect ? » Mais l’enfant, loin de répondre, s’enfermait dans un mutisme qui intriguait fort la Veuve Dame.
    Ce comportement la rendait souvent songeuse. Or, un jour, elle surprit son fils immobile au pied d’un arbre, les yeux levés vers les branches, et tout au ravissement du ramage des oiseaux. Elle vit qu’à leurs seuls accents, la poitrine du garçon se gonflait à se rompre, tant sa nature était sensible à toutes les émotions. Alors, sans trop savoir pourquoi, la Veuve Dame se prit à haïr les oiseaux. Désirant éliminer leur chant, elle donna l’ordre à ses forestiers et à ses laboureurs de les capturer puis de les étrangler. Mais les oiseaux étaient si adroits et rapides que la plupart échappèrent à la mort et se reprirent de plus belle à chanter.
    Cependant, l’enfant, s’étant aperçu qu’on les traquait impitoyablement, dit à sa mère : « Que reproche-t-on à ces petits oiseaux ? Quel mal ont-ils fait qu’on veuille ainsi les prendre ? » Et il la supplia d’ordonner qu’on les laissât en paix. La Veuve Dame en eut les larmes aux yeux. Elle baisa tendrement son fils et lui dit : « Tu as raison, mon enfant, je ne vois pas pourquoi je m’en prendrais aux créatures de Dieu et à l’ordonnancement du monde tel qu’il l’a voulu. Les oiseaux doivent-ils perdre toute joie à cause de moi ? Que Dieu me pardonne ! » Le garçon lui dit alors : « Mère, qu’est-ce donc que Dieu ?
    — Mon fils, je vais te le dire en toute vérité : c’est l’être qui a créé le ciel et la terre et tout ce qui existe en ce monde. Mais si tout ce que tu vois sur cette terre est beau, je puis te l’affirmer, Dieu l’est encore davantage. Il est toute splendeur et toute lumière, et rien ne le peut surpasser. Aussi, retiens bien la leçon : quand tu seras dans la peine, implore-le et demande-lui de te donner sa lumière. En revanche, prends garde de jamais écouter l’Ennemi, celui qu’on nomme le Maître de l’Enfer. Celui-là est plus sombre que le charbon, et sa noirceur n’a d’égale que sa méchanceté. Il est laid, et sa laideur est à l’image de sa fausseté. Détourne de lui ta pensée et ne doute jamais de la bonté de Dieu. » Et elle lui apprit également à distinguer les ténèbres de la clarté, lui expliquant que tout ce qui était beau était bon, tout ce qui était laid, mauvais. Sur ce, sans répondre et avec toute la vivacité de la jeunesse, l’enfant s’en fut en bondissant.
    Il grandissait de jour en jour. Il apprit par lui-même à si bien lancer le javelot qu’il abattit maint cerf dans la forêt, gibier dont profitaient sa mère et tous ses gens. Qu’il y eût de la neige, de la pluie, du vent, qu’il fît un temps merveilleux,
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