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Perceval Le Gallois

Perceval Le Gallois

Titel: Perceval Le Gallois
Autoren: Jean Markale
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jamais ne manquait la venaison à la table de la Veuve Dame. Et, curieusement, lorsqu’il avait abattu une bête si lourde qu’un mulet aurait eu peine à la porter, le garçon réussissait à la rapporter au manoir sans même la dépecer, tant il était fort et musclé.
    Un jour, il aperçut parmi le troupeau de chèvres de sa mère deux chevreaux qui folâtraient, et il s’étonna grandement que ceux-ci fussent dépourvus de cornes, alors que toutes les autres bêtes en étaient munies. Aussi supposa-t-il qu’après s’être longtemps égarés dans la forêt, ils avaient perdu leurs cornes en se heurtant aux troncs des arbres. Se disant en lui-même qu’il fallait les ramener à la petite cabane affectée au troupeau, derrière le manoir, il réussit, à force de vaillance et d’agilité, à les y faire entrer. Puis il alla trouver la Veuve Dame. « Mère, dit-il, je viens de voir ici une chose étonnante : deux de tes chèvres sont devenues sauvages ! Elles se sont égarées si longtemps dans le bois qu’elles en ont perdu leurs cornes ! Je me suis donné une peine infinie à les rassembler ! » À ces mots, la Veuve Dame et ses servantes se levèrent et se rendirent dans l’étable. Mais, quitte à s’apercevoir qu’il s’agissait là de chevreaux nouvellement nés, elles se turent et se contentèrent de féliciter le garçon d’avoir ramené le troupeau tout entier.
    Revint l’époque où les arbres fleurissent, où les bocages se couvrent de feuilles et les prés d’herbe verte et où, dès l’aube, les oiseaux chantent doucement en leur latin, tandis que toute créature s’enflamme de joie et de bonheur. Un matin, le fils de la Veuve Dame se leva plein d’enthousiasme, au cœur de la Gaste Forêt solitaire, en saluant les rayons du soleil. Il gagna l’écurie, sella rapidement son petit cheval de chasse et prit trois javelots. Ainsi équipé, il sortit du manoir maternel et se promit d’aller voir les herseurs qui étaient à l’œuvre dans les avoines, avec leurs douze bœufs et leurs six herses. Il entra dans les bois et, tout aussitôt, son cœur redoubla d’allégresse à cause de la douceur du temps et du joyeux ramage des oiseaux qui lui plaisait tant.
    Il faisait si beau et si calme qu’ôtant le frein de son cheval, il le laissa errer à sa guise et paître la jeune herbe verdoyante. Quant à lui, qui était si habile à lancer le javelot, il allait, jetant de tous côtés ceux qu’il portait, vers l’avant, l’arrière, le haut, le bas, mettant ensuite pied à terre pour les récupérer. C’est alors qu’il entendit du bruit dans la futaie. C’étaient cinq chevaliers qui approchaient, armés de toutes pièces et menant grand fracas, car leurs armes heurtaient à tout instant les rameaux des chênes et des charmes. Le fer des lances faisait sonner celui des boucliers, leur bois vibrait, les mailles des hauberts cliquetaient ; enfin, c’était un fier tapage qui assourdissait le garçon, mais il ne pouvait encore voir ceux qui le causaient en survenant à si vive allure.
    « Sur mon âme, dit-il, m’est avis que je n’ai jamais entendu plus horrible vacarme ! Ma dame ma mère ne m’a pas menti quand elle affirmait qu’il n’y avait rien de plus effrayant que les diables d’enfer ! Elle m’a conseillé de me garder d’eux et, pour cela, de faire sur moi le signe de la Croix. J’en suis bien averti, mais je ne l’entends pas de cette oreille. Se signe qui voudra ! Pour ma part, je vais choisir le plus fort d’entre eux et le frapper d’un de mes javelots. Après quoi, je doute que les autres aient grande envie de m’approcher ! »
    Ainsi parlait-il avant de les voir. Mais, quand ils débouchèrent d’entre les arbres, presque à ses côtés, le spectacle des hauberts étincelants, des heaumes brillants, des lances et des boucliers peints de couleurs vives l’éblouit. Jamais il n’avait rien vu de semblable et, ne pouvant s’empêcher d’admirer le vert et le vermeil, l’or, l’azur et l’argent qui brillaient au soleil, il s’écria : « Ah ! seigneur Dieu, pardonne-moi mes mauvaises pensées ! Comme ils sont beaux, ceux que je vois là ! Pour sûr, ce sont des anges ! Quel péché est le mien de les avoir pris pour des diables de l’enfer ! Ma mère, je dois l’admettre, était dans le vrai quand elle me contait que les anges étaient les êtres les plus beaux qui soient, hormis Dieu lui-même, lequel est plus beau et plus
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