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L'Homme au masque de fer

L'Homme au masque de fer

Titel: L'Homme au masque de fer
Autoren: Arthur Bernède
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pays, auprès d’Agen, je reconnais que j’ai remporté quelques avantages…
    – Et vous voulez augmenter, ou plutôt couronner la série de vos exploits en ajoutant à vos conquêtes de terroir celle d’une jolie Parisienne !
    Toujours avec la même franchise, Gaëtan répliquait :
    – C’est déjà fait, mon cher comte !
    – Cela ne m’étonne pas. En amour comme en amitié, je vous crois capable de toutes les prouesses.
    Et, tout en posant son coude sur la table et en remplissant pour la troisième fois le verre du beau Gascon, il ajouta :
    – Racontez-moi l’histoire de cette conquête.
    – Oh ! après tout, faisait Castel-Rajac, je puis bien le faire sans manquer aux lois de l’honneur, car, quand bien même le voudrais-je, il me serait impossible de vous révéler le nom de celle qui, pendant huit jours, m’a rendu le plus heureux des hommes.
    L’Italien, qui semblait de plus en plus intéressé, conclut :
    – L’aventure devient de plus en plus piquante, et j’ai hâte d’en connaître la suite.
    Et, tout en mangeant, car Gaëtan-Nompar-Francequin méritait ce nom de loup affamé que lui avait donné son compagnon de souper, il reprit sur un ton de bonne humeur et de franchise :
    – Quelques mots d’abord sur moi. Oh ! ce ne sera pas long, car je suis de ceux qui, à vingt-cinq ans, n’ont pas de bien longues histoires à conter. Je suis le fils unique du baron de Castel-Rajac, ancien page, puis écuyer de Sa Majesté Henri IV, et qui, depuis l’arrivée au pouvoir de Son Éminence le cardinal Richelieu, vit retiré dans son manoir, si tant est qu’on puisse appeler ainsi la pauvre maison à moitié en ruine qui, avec trois maigres fermes, quelques vignes, un étang et un bois de cinquante arpents constitue tout son patrimoine, destiné à devenir le mien, le plus tard possible, si Dieu daigne le vouloir !
    » Ma mère passe son temps à s’occuper des soins de la maison, à prier dans l’église du village, à visiter les malheureux et à les soulager de ses soins les plus touchants, en même temps que de ses maigres aumônes. C’est donc vous dire que j’ai été élevé devant un horizon beaucoup trop étroit pour être tourmenté par des ambitions très vives.
    » Dans mon enfance, cependant, émerveillé par les récits de mon aïeul, de mon père et de leurs compagnons d’armes, je rêvais d’être à mon tour soldat, officier, et de me battre pour accomplir, moi aussi, de vaillantes prouesses. J’avais, tout jeune, appris à monter à cheval avec un ancien écuyer du brave Crillon, et les armes avec un vieux maître qui vivait retiré dans notre pays et se targuait, à juste titre, d’avoir appris l’art de tuer son prochain aux plus illustres capitaines de ce temps. C’est ainsi que je devins un cavalier assez solide et un escrimeur, ma foi, tout aussi bon qu’un autre.
    » Lorsque, ayant atteint ma dix-septième année, je fis part à mes parents de mon projet de m’enrôler dans les armées de Sa Majesté, mon père s’y opposa, sous prétexte que, n’ayant aucune protection à la Cour, quelle que fût ma valeur, je risquais fort de végéter dans les grades subalternes.
    » Peut-être aurais-je passé outre à la volonté paternelle, mais je ne pus résister aux larmes de ma mère, qui m’adjura si tendrement de renoncer à mon projet, que je lui cédai et que je restai au pays, me contentant de guerroyer contre les chevreuils, les cerfs, les sangliers et les loups.
    » Je vécus ainsi, non dans la joie, mais sans ennui, dépensant mes forces en courses, en galopades, en exercices de toutes sortes, jusqu’au jour où, sur la grande route d’Agen, j’eus l’occasion, une nuit, de dispenser un coup d’épée à trois ou quatre vauriens – je ne sais combien au juste – qui avaient eu l’audacieuse insolence de s’attaquer à un carrosse dans lequel se trouvait une jolie voyageuse évanouie.
    – Voici le roman qui commence, souligna l’Italien.
    Castel-Rajac, qui avait profité de cette interruption pour vider un nouveau verre de vin, reprenait :
    – En effet ! Et quel roman ! Le cocher et les laquais de ma belle inconnue, qui avaient tous été plus ou moins blessés au cours d’une rencontre où ils ne paraissaient point avoir déployé des prodiges de valeur, se lamentaient, incapables de porter secours à leur maîtresse. Je me précipitai vers elle et je me demandais comment j’allais bien m’y prendre pour la ramener
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