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L'Homme au masque de fer

L'Homme au masque de fer

Titel: L'Homme au masque de fer
Autoren: Arthur Bernède
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à la vie, lorsque ses yeux s’ouvrirent ! Mordious ! quels yeux !… à faire damner un évêque ! Me prenant sans doute pour l’un de ses agresseurs, elle me supplia, d’une voix que j’entendrai toujours :
    » – Faites de moi ce que vous voudrez, mais laissez-moi la vie !
    » – Madame, répondis-je à l’adorable créature, que sa frayeur rendait encore plus aguichante, croyez que je n’ai nullement l’intention d’abréger vos jours ; je ne demande, au contraire, qu’à vous servir. Je suis le chevalier de Castel-Rajac ; je dépose à vos pieds l’hommage de mon respect et de mon dévouement le plus absolu.
    » La voyageuse, visiblement rassurée par ces paroles, répliqua :
    » – Monsieur, je vous sais gré de votre attitude si courageuse. Je tiens donc à vous en exprimer tout de suite ma reconnaissance. Et puisque vous me l’offrez si galamment, puis-je vous demander de rallier mes gens et de me conduire jusqu’au village le plus rapproché, où je pourrai trouver un gîte ?
    » Je ne pouvais qu’acquiescer à une telle requête.
    » Je ne vous cacherai pas, mon cher comte, que j’étais déjà follement amoureux de mon exquise inconnue. Je fis donc ce qu’elle me demandait. Je ravivai le courage de ses serviteurs, je convainquis le cocher de reprendre ses chevaux en mains et les deux laquais de regagner leur place à l’arrière du carrosse, et, sautant en selle, je conduisis sans encombre mon adorable voyageuse jusqu’au village de Saint-Marcelin, situé à une demi-lieue de là, où il y avait une hostellerie qui, sans être aussi accueillante que celle-ci, n’en offrait pas moins un gîte convenable.
    » Je réveillai les tenanciers que je connaissais, et qui s’empressèrent de mettre leur meilleure chambre à la disposition de la jeune femme dont la richesse de l’équipage ne pouvait que favorablement disposer les patrons du Faisan d’Or.
    » Je l’aidai à descendre de carrosse. Lorsqu’elle posa sa main sur mon poignet, je sentis comme un frisson me parcourir. Alors, elle me regarda. J’en fus comme étourdi, grisé, car il venait d’allumer en moi un incendie aussi subit que dévorant et, dans un geste spontané et respectueux, je lui saisis la taille et l’attirai vers moi.
    » À peine avais-je esquissé ce mouvement que je le regrettai : car j’étais persuadé que j’allais être repoussé ; mais il n’en fut rien… Elle me sourit, au contraire. Ah ! mordious ! ce sourire… Il acheva de m’affoler à un tel point que ma bouche s’approcha de la sienne et que nos lèvres s’unirent !
    » Je dois dire, d’ailleurs, mon cher comte, quitte à passer pour un fat, que la charmante femme ne fit rien pour éviter ce baiser.
    » Une minute après, je pénétrai avec elle dans l’hostellerie, et au moment où elle mettait le pied sur la première marche de l’escalier qui conduisait à sa chambre, elle se tourna vers moi et me dit à voix basse :
    » – Allez m’attendre sous ma fenêtre, allez !
    » Je crus que je rêvais. Il n’en était rien car, ayant obéi et m’étant rendu devant l’hostellerie, je n’attendis pas plus de cinq minutes pour voir, à la hauteur du premier étage, au-dessus d’une porte encadrée de pilastres, une baie vitrée s’ouvrir lentement et laisser apparaître, dans un rayon de lune, la tête blonde de mon inconnue.
    » Elle se livra à une pantomime qui signifiait clairement : « Tâchez de venir me rejoindre sans que personne s’en aperçoive. » Ce soir-là, je me sentais de taille à escalader les murailles les plus hautes. Aussi, fût-ce pour moi un jeu d’enfant de grimper le long d’un des pilastres jusqu’à la baie derrière laquelle le bonheur semblait m’être promis.
    » Mes prévisions se réalisèrent bien au-delà de mes espérances !
    » Quelle était cette femme, me demandez-vous, n’est-ce pas ? Je ne saurais vous le dire, car non seulement elle refusa de me révéler son nom, mais elle me fit jurer de ne pas interroger ses serviteurs à ce sujet et de respecter son incognito.
    » Nous dûmes nous séparer quand le soleil se leva. Je repartis par le même chemin et je rentrai chez moi, ravi de cette aventure à laquelle, cependant, je n’attachais pas une excessive importance. Mais je ne tardai pas à m’apercevoir qu’elle avait pris une place tellement importante dans ma vie, qu’elle allait la bouleverser de fond en comble.
    » En effet, mon entrevue avec
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