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Les guerriers fauves

Les guerriers fauves

Titel: Les guerriers fauves
Autoren: Viviane Moore
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gamines en reculant, effrayées par l’animal.
    Les soldats écartèrent les derniers curieux. Leur chef maugréa en découvrant le corps :
    — Sortez-moi tout ce monde de là ! ordonna-t-il. Apportez-moi une torche, on n’y voit rien.
    Ses hommes s’exécutèrent et l’un d’eux revint avec un flambeau qu’il leva haut au-dessus du cadavre. Le regard vif du vieux soldat parcourut la scène : la terre piétinée par les badauds, l’absence de traces de sang sur les murs, celui coagulé sur la chainse {1} déchirée. La victime était un jeune garçon. Ses mains étaient abîmées par le travail, ses pieds nus calleux. Il se pencha et toucha le corps, déjà froid et marbré. Il se releva. Ce n’était pas là un fils de notable.
    Eudes se sentit à la fois soulagé et en colère contre lui-même.
    Le « loup », ainsi que le surnommaient les habitants de Barfleur, ne s’en prenait pour l’instant qu’aux petites gens. Le loup ! Tout ça parce que les victimes étaient massacrées avec sauvagerie ! Comme si l’humain n’en pouvait être capable ! Du coup, beaucoup de gens, même parmi les bourgeois, commençaient à accuser son chien d’être le coupable.
    — Emmenez-le ! ordonna-t-il à ses hommes avant de sortir du passage et de se retrouver en pleine lumière, au milieu d’un cercle de curieux.
    Les gens murmuraient entre eux, attendant ils ne savaient quoi de lui. Il soupira. Au loin la mer était basse et houleuse et le soleil y accrochait des éclats de lumière. Des barques échouées reposaient sur la vase. L’air sentait le sel et le varech. Tout avait l’air si paisible... Il se ressaisit, scruta les visages qui l’entouraient, et demanda :
    — Qui l’a trouvé ?
    La petite qui était restée au milieu de la foule, bousculée par les uns et les autres, ne répondit pas. Mais une lavandière la désigna du doigt.
    — C’est elle, messire prévôt, c’est elle ! Elle criait « Au feu ! », c’est pour ça qu’on est venus ! fit-elle d’une voix hargneuse.
    — Elle a eu raison. Reculez-vous tous ! Vous allez l’étouffer, cette gamine.
    Les gens s’écartèrent et formèrent cercle autour de la fillette. L’homme d’armes l’examina. Le visage était clairsemé de taches de rousseur, les cheveux noirs, la peau rougie par le vent. Malgré le froid d’avril, la gamine – elle ne devait guère avoir plus de neuf ans – était pieds nus et vêtue d’une simple cotte de drap et d’un gilet de laine fermé par des boutons de bois. Le chien s’approcha d’elle, mais l’homme l’arrêta d’un claquement de langue.
    — Tu le connaissais, celui-là ? demanda-t-il en désignant le garçonnet que ses soldats avaient recouvert d’un linceul.
    L’enfant secoua la tête. Tout cela l’effrayait et elle ne pensait qu’à s’enfuir. Comme s’il avait compris, le prévôt la saisit par le bras.
    — Allez viens, on va parler un peu, et après je te renverrai chez toi.
    Terrifiée à l’idée de partir avec ceux-là qui ne prenaient jamais que les assassins et les voleurs pour les pendre ou les mettre au pilori, elle se débattit.
    — Non ! Non ! J’ai rien fait ! Pitié !
    Mais la main de l’homme la maintenait fermement.
    — Allons, calme-toi ! gronda-t-il. Je ne te ferai pas de mal. Tiens-toi tranquille. Et puis, si tu te sauvais, mon chien te rattraperait. Il court aussi vite qu’un destrier mais il est moins aimable. Ses dents peuvent broyer le crâne d’un homme. Alors celui d’une gamine...
    L’enfant glissa un regard apeuré vers l’animal et se tut.
    — En avant, vous autres ! ordonna le prévôt.
    Et la patrouille se mit en marche, escortée par une foule de plus en plus dense au fur et à mesure qu’ils traversaient la ville. Des maisons de bois, des abris de planches aux toits de joncs sortaient des gens que la rumeur attirait. Quand l’attroupement se faisait trop compact autour du brancard de fortune, les soldats frappaient les dos et les épaules de leurs gourdins. Ils longèrent les quais, traversèrent une place et arrivèrent devant la prévôté.
    La maison forte était l’un des seuls bâtiments de granit de la ville avec le château, l’hôtel-Dieu et quelques demeures appartenant à des abbayes ou à des notables. Le portail d’entrée était défendu par des gardes revêtus d’épaisses cottes de cuir et de métal, armés de lances et de boucliers.
    Ils s’écartèrent sur un signe du prévôt, laissant la
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