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Les Fils de France

Les Fils de France

Titel: Les Fils de France
Autoren: Franck Ferrand
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pourrait se révéler haineuse à ton égard. Dieu te garde, mon enfant, de la décevoir jamais !
    La duchessina réprima un frisson ; et des relents vaseux, remontés sans doute avec les rames, empuantirent soudain l’air ambiant.

    — Vous voulez dire qu’elle n’a pas touché la terre depuis douze jours ?
    — C’est ce qu’on dit, ma chère. La pauvre enfant va tituber sous nos yeux...
    Marguerite de Navarre, sœur du roi François, se mordit la lèvre pour ne pas rire elle-même de son impertinence. À ses côtés, dans l’antichambre du souverain pontife, la jeune Anne de Pisseleu s’amusait à la dissiper.
    — J’espère au moins, murmura-t-elle, qu’elle a le pied marin...
    Elles s’esclaffèrent en même temps. La reine de France, Éléonore de Habsbourg, s’en irrita ; elle échangea un regard en coin avec Diane de Brézé, sa dame d’honneur.
    — L’on s’amuse bien, là-derrière...
    Diane leva les yeux au ciel. Depuis qu’elle était veuve du grand sénéchal, elle faisait profession de sérieux, et n’arborait d’ailleurs que des tenues fort strictes – mais qui soulignaient sa beauté.
    — Mademoiselle de Pisseleu, siffla-t-elle, trouve matière à rire de tout...
    Le roi et ses fils entrèrent, venant du château comtal par une galerie jetée sur la rue. Une suite limitée de grands serviteurs les accompagnait, où l’on repérait surtout le maréchal de Montmorency, grand maître, et le grand amiral Chabot de Brion. François I er avait, comme toujours, fière allure dans ses atours de soie brochée. On s’abîma en révérences sur son passage. Le monarque arborait une mine épanouie. Il s’en vint tout droit vers les dames.
    — Je me languis de connaître ma bru, confia-t-il à la cantonade.
    Un gloussement collectif lui répondit. Le dauphin François, assez mal élevé, s’amusait à tirer la toque de son plus jeune frère, le prince Charles, duc d’Angoulême. Quant au jeune fiancé, le duc d’Orléans, on aurait pu le croire sous le coup d’un arrêt de justice. Droit, figé, austère même, Henri paraissait au supplice. Les traits de son long visage – nez droit, bouche pincée, œil triste – lui conféraient, avec le teint hâlé et la barbe naissante, un air de gravité trop virile pour ses quatorze ans.
    Son regard ne s’anima que lorsqu’il croisa celui de la grande sénéchale ; la Cour entière bruissait du chaste penchant de ce jeune prince pour la belle veuve en blanc et noir ; le roi lui-même s’en amusait.
    — Vous êtes donc venue en parente, dit-il aimablement à Diane.
    Elle s’inclina. Catherine de Médicis était en effet sa cousine : leurs grands-parents, nés La Tour d’Auvergne, étaient frère et sœur.
    — Cette alliance comble ma famille comme elle réjouit le royaume, répondit-elle sans aucun naturel.
    Dans un grincement de bois, les huissiers du pape ouvrirent grand les portes de la chambre. Le roi, la reine, les princes, suivis de la Cour, s’y engouffrèrent. Henri de France, sitôt entré, chercha des yeux cette fiancée qu’il n’avait encore vue qu’en portraits. Seulement il y avait foule autour du Saint-Père et les cardinaux, dans leur capa magna , les Suisses en grande livrée, les soldats magyars du cardinal Hippolyte de Médicis, coiffés de turbans à aigrettes, concouraient à brouiller les pistes...
    Enfin il la repéra ; et son cœur se serra.
    Henri retint son souffle jusqu’à ce que le premier sentiment, de vive déception, fût balayé par un autre, plus raisonnable et plus civil. « Elle n’est pas belle, se dit-il, amer. Point de taille ni de formes... Cet œil saillant, et puis ces lèvres ! »
    Il aurait voulu se sauver pour aller pleurer.
    Catherine, de son côté, faisait bon visage. Elle posait sur son futur époux des regards émus et, moins discrète, aurait pu passer de longs instants à le contempler ; visiblement elle n’éprouvait, quant à elle, aucune déception.
    Polie avant tout, elle se dirigea vers son futur beau-père et lui réserva sa plus belle révérence. La relevant galamment, selon un geste habituel chez lui, François I er ramena l’enfant vers Clément VII, dont il baisa les gants blancs. Puis il fit signe à Henri de s’avancer à son tour ; le prince s’inclina très bas devant le pape, avant de reprendre sa place. La petite Florentine avait bien remarqué sa froideur, mais elle continuait à sourire. C’est alors que le roi, lui ramenant son fils, le
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