Le tombeau d'Alexandre

partir.
    — Pour qu’elle aille vendre son histoire à la presse dès qu’elle aura tourné les talons ?
    — Elle n’en fera rien. Dis-lui, Gaëlle. Donne-lui ta parole.
    — Qu’il aille se faire foutre, marmonna Gaëlle, qui claquait des dents. Je reste avec toi.
    Hassan rit à nouveau, à la fois amusé et admiratif.
    — Il semblerait que vous les aimiez belles plutôt qu’intelligentes, lança-t-il.
    — Vous ne vous en sortirez pas comme ça, déclara Knox.
    — Me sortir de quoi ? Je vous ai tirés d’une situation extrêmement dangereuse. C’est tout ce que j’ai fait. Vous devriez me remercier. Mais maintenant...
    — Maintenant ?
    — Vous m’avez humilié à Charm, monsieur Knox, chuchota Hassan les tendons du cou tendus à l’extrême. On s’est moqué de moi. De moi, monsieur Knox. De moi ! Je ne peux pas laisser passer ce genre de choses sans obtenir... réparation. Vous en êtes certainement conscient.
    Il fit un pas en avant et pencha son visage contre celui de Knox en lui soufflant son haleine fétide dans les narines.
    — C’est une simple question de respect, expliqua-t-il.
    — De respect ! Vous étiez en train de violer une fille !
    Hassan plissa les yeux et se redressa, les poings serrés. Knox se raidit, s’attendant à recevoir un coup, mais Hassan se retint et parvint même à le gratifier d’un sourire crispé.
    — J’avais pratiquement perdu tout espoir de vous retrouver. Mais cet après-midi, vous m’avez téléphoné sans crier gare. Au début, j’ai cru que c’était une plaisanterie. J’ai pensé que vous vouliez me faire marcher, car vous ne pouviez pas ignorer le sort qui vous attendait. Puis une nouvelle extraordinaire a été diffusée dans tout le pays. Un homme hospitalisé à Siwa a tout raconté : la découverte de la tombe d’Alexandre le Grand et de tout l’or qu’elle contenait, la conspiration des Grecs et l’intervention d’un dénommé Knox, qui lui avait sauvé la vie. Soudain, votre appel a pris un sens. J’ai compris que ces Grecs et leur butin constituaient la cargaison dont vous m’aviez parlé.
    — Quel plaisir j’ai dû vous faire en vous apportant tout cet or clés en main ! Vous n’en avez donc pas encore assez ?
    — Un homme n’a jamais assez d’or, monsieur Knox. Mais d’une certaine façon, vous avez raison. L’argent n’a jamais été un problème pour moi. Et j’ai besoin d’autre chose, qu’il m’est beaucoup plus difficile d’acquérir. Or, vous venez de me l’offrir sur un plateau. Cette affaire va me propulser directement là où est ma véritable place.
    — En prison ?
    Hassan s’esclaffa.
    — Vous n’y êtes pas du tout. Je ne suis pas un voleur. Les hommes que vous avez vus font partie des unités parachutistes de l’armée. Ce sont d’anciens camarades de Nessim. Croyez-vous vraiment que je puisse avoir trente tireurs d’élite à ma disposition sur un simple claquement de doigts ? C’était une opération officielle ou, disons, semi-officielle. Voilà pourquoi vous n’avez pas été inquiétés à votre arrivée à Suez. Et voilà pourquoi personne n’a tiré sur le camion, excepté lorsque le chauffeur a essayé de s’enfuir.
    — Je ne comprends pas, intervint Gaëlle. Qu’est-ce que vous voulez ?
    — Je veux vous offrir un moyen de sortir d’ici vivants, répondit Hassan. Nous avons tout à y gagner.
    — On vous écoute, dit Knox.
    — La maturité fait naître des ambitions différentes de celles de la jeunesse, monsieur Knox. Vous vous en êtes probablement rendu compte par vous-même. Quand j’étais jeune, je ne pensais qu’à l’argent car, sans argent, on n’a rien. Mais quand on en a...
    Il fit un geste de dédain et laissa sa phrase en suspens.
    — Alors que voulez-vous ?
    — La légitimité. La respectabilité. Une petite place dans le cœur de mon peuple. L’opportunité de servir la nation.
    — De servir la nation ! Je n’arrive pas à y croire. Vous voulez vous lancer dans la politique ?
    — Notre nation est dirigée par une génération vieillissante. Une génération qui n’est plus en prise avec les préoccupations des Égyptiens. L’Égypte a besoin de sang neuf, d’hommes empreints d’une vision nouvelle, qui aient des idées novatrices et suffisamment d’énergie pour les concrétiser. Je crois que je fais partie de ces hommes. Malheureusement, en Égypte, il n’est pas facile d’entrer en politique, surtout quand on