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Le prix de l'hérésie

Le prix de l'hérésie

Titel: Le prix de l'hérésie
Autoren: S.J. Parris
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sa
famille. »
    Il poussa un grand soupir et j’eus l’impression que son âme
allait se disloquer. Son chagrin était tel qu’il pèserait sur sa conscience
jusqu’à la fin de sa vie. Je réalisai à cet instant que Sophia m’avait dit la
vérité : par sa froideur, il se donnait la possibilité de se séparer
d’elle pour de bon s’il le jugeait nécessaire. Dans ses yeux se lisait la peine
d’un homme qui avait déjà perdu ses deux enfants. J’aurais voulu dire un mot,
plaider en faveur de sa fille, mais je préférai tenir ma langue. Je m’étais
déjà assez mêlé des affaires de ce collège, et en particulier de cette famille.
    Il me raccompagna jusqu’à l’entrée en silence, le parquet
craquant sous nos pas.
    « Je ne crois pas que vous reviendrez à Oxford, docteur
Bruno, me dit-il avec raideur. À la lumière des récents événements, je regrette
de ne pas m’être confié à vous plus tôt, mais ici à Oxford, nous ne sommes pas
habitués à regarder les étrangers comme… Eh bien, je suppose que vous comprenez
ma position. »
    Alors que nous nous serrions la main, il me saisit le
poignet avec un regard implorant. Sophia avait de la chance, me dis-je, que ses
yeux ressemblent plutôt à ceux de sa mère. Ou peut-être que ce n’était pas une
chance, que sa situation eût été différente si elle n’avait pas été aussi
belle.
    « Au chapitre de mes regrets, je ne peux que déplorer
de n’avoir pas été un meilleur hôte et un ami pour vous. Si j’avais su vos liens
avec certaines personnes… Je peux m’en vouloir pour beaucoup de choses, comme
vous l’imaginez. Serait-ce trop vous demander, si vous en avez l’occasion,
d’expliquer au comte de Leicester que je me suis toujours efforcé de le servir,
ainsi que l’université, du mieux que je le pouvais ? Je m’attends à avoir
de ses nouvelles, et je ne sais trop comment il accueillera toute cette
affaire. »
    Il s’agrippait à mon poignet, tenaillé par la peur.
    « Je vous aiderai si je le peux, lui promis-je, mais je
crains que vous ne vous mépreniez sur mes rapports avec le comte. Je ne l’ai
jamais rencontré de ma vie. »
    Sa déception était palpable et je cherchai des mots
d’encouragement.
    « Mais je suis certain que si j’en parle à Sir Philip
Sidney, il ne pourra pas ignorer votre loyauté. »
    Le recteur opina solennellement du chef et me lâcha la main.
    « Merci. C’est plus que je ne mérite. Vous avez été un
digne adversaire de débat, docteur Bruno. Je serai ravi d’avoir une autre fois
le loisir d’échanger des arguments avec vous. »
    Vous avez la mémoire courte, pensai-je en souriant
poliment. Je vous ai été supérieur en substance et en conduite, mais vous
n’avez pas hésité à me ridiculiser devant toute l’université. Cependant,
cette humiliation semblait bien triviale aujourd’hui.
    « J’aimerais vous demander une faveur en retour, dis-je
comme nous approchions de la porte. J’ai appris que Cobbett avait été relevé de
ses fonctions.
    — C’est exact, reconnut le recteur. Maître Slythurst
s’est plaint vertement. Il a désobéi alors qu’il lui ordonnait de lui restituer
des documents compromettants, ce qui a aussi permis à un voleur de s’évader du
collège.
    — Mais enfin, recteur, vous n’ignorez pas que le
voleur, c’était moi ? Et si Cobbett n’avait pas désobéi et fait porter un
message en urgence à Sir Philip Sidney, je serais mort à l’heure qu’il est, de
même que votre fille !
    — Cependant, répliqua le recteur en affectant de se
soucier d’un fil qui pendait à sa robe, maître Slythurst est l’un des membres
de l’administration du collège. Cobbett aurait dû obéir à ses ordres, et non à
ceux d’un invité pris en train de voler des affaires dans la chambre d’un
élève. Je l’ai donc sanctionné.
    — Ces papiers, entre les mains de Sir Philip, ont
permis de sauver votre fille ! grondai-je. Entre les mains de Slythurst,
ce n’aurait sans doute pas été le cas. Cobbett a agi selon sa conscience et
vous feriez mieux de le récompenser. »
    Underhill cessa de s’intéresser au fil de sa robe pour me
regarder droit dans les yeux.
    « C’est votre opinion », me dit-il, impassible.
    Je n’arrivais pas à en croire mes oreilles.
    « Par ses actions, il a sauvé la vie de votre fille,
répétai-je lentement au cas où il n’aurait pas bien compris. Et celle de
l’enfant qu’elle porte. Vous ne croyez
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