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Le Glaive Et Les Amours

Le Glaive Et Les Amours

Titel: Le Glaive Et Les Amours
Autoren: Robert Merle
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puisse répondre à une telle ejercito [10] .
L’appel au ban et à l’arrière-ban n’a donné que des résultats chétifs et vous
en savez quelque chose, Monseigneur, poursuivit-il, se tournant vers moi,
puisque vous allez, avec d’autres, tâcher d’y remédier. Qui pis est, le roi
manque terriblement de clicailles et pécunes. En bref, si le roi et Richelieu
n’arrivent pas à rétablir la situation financière et à réveiller les Français
de leur torpeur couarde, j’ai bien peur que « nos lauriers d’Italie ne se
changent en cyprès » (c’était là un mot de Richelieu à qui le comte de
Sault l’empruntait, mais je ne l’appris que plus tard).
    — Dieu bon ! dit Madame de Guéméné. Paris est-il
jà menacé ? Dois-je gagner sans tant languir ma Bretagne ?
    — Nenni, nenni ! Madame. Gardez-vous bien d’une
décision aussi prématurée. Songez que votre hôtel de Paris, vide et clos,
pourrait bien être pillé par la canaille. Surtout ne répétez pas, de grâce, ce
que je vous ai appris. Gardez un front serein, mais faites provision de farine
et d’autres victuailles, et priez votre majordome d’acheter des poules, de les
mettre dans votre jardin et d’acheter aussi une chèvre lactaire. En temps de
guerre, comme vous savez, tout se raréfie, et l’idée d’un siège de Paris n’est
pas à écarter.
    Comme il était prévu, je me rendis le lendemain à cheval et
suivi du seul Nicolas au Parlement, où je fus reçu avec une froide courtoisie
par ces messieurs de robe qui voyaient en moi, à n’en pas douter, un espion du
roi, ce qui me fit résoudre de jouer, en effet, ce rôle puisqu’ils me
l’attribuaient. Ils me donnèrent un siège assez bien placé, et comme je
demandais avec bonhomie quel serait mon rôle en leur distinguée compagnie, l’un
d’eux qui s’appelait, je crois, Monsieur de Mesmes me dit :
    — Monseigneur, votre tâche est de nous écouter.
Cependant, il vous est loisible de demander la parole et de faire une
suggestion qui ne sera retenue que si le vote de la majorité l’accepte. Il
n’est pas prévu dans vos attributions que vous preniez part à nos votes.
    Ceci fut dit avec beaucoup de saluts et une courtoisie à la
limite de l’insolence.
    — Monsieur, dis-je froidement, je suis sûr que je
m’instruirai beaucoup rien qu’à vous écouter.
    Après cela, le bec clos et cousu, je demeurai immobile et
impassible sur mon siège, entouré de l’hostilité générale.
    Ces messieurs de robe obéissent à un protocole aussi
solennel que celui du Grand Conseil du roi, sur lequel il est du reste copié.
Mais à la parfin, la séance commença et le président, prenant la parole,
annonça que le roi, pour la conduite de la guerre, avait demandé à son
Parlement quinze millions d’or.
    Un frémissement furieux parcourut alors l’assemblée, mais
sans que personne ne s’en prît, soit par un reste de respect, soit en raison de
ma présence, à Sa Majesté.
    Une discussion très confuse commença alors, les uns disant
que c’était quasi impossible de racler une somme pareille, les autres demandant
s’il était opportun de le faire, alors que la guerre commençait à peine,
d’autres encore demandant non sans perfidie où iraient ces clicailles, sinon se
peut dans les poches d’un ministre qui aimait construire des palais fastueux.
    Cette perfide attaque contre Richelieu me tabusta au point que
je faillis déclore le bec pour la démentir. Mais point ne le fis, et fis bien,
car, au même moment, on frappa fortement à l’huis, le silence se fit, et
l’huissier, entrebâillant la porte, dit au président qu’il s’agissait d’un
courrier qui apportait, disait-il, une nouvelle de la guerre de la plus grande
conséquence.
    — Laissez-le entrer, dit le président.
    Le courrier alors entra, hirsute et couvert de poussière.
    — Messieurs du Parlement, dit-il, je suis bien triste
d’avoir à vous annoncer, concernant la fortune de nos armes, une bien mauvaise
nouvelle : les Espagnols se sont saisis de La Capelle.
    Il ne se peut, lecteur, que tu aies oublié La Capelle, car
cette place forte à la frontière des Pays-Bas est apparue deux fois en mes
Mémoires. La première, quand le jeune de Vardes, qui à vingt ans à peine
commandait la citadelle à la place de son père, s’était laissé convaincre de
livrer la place à la reine-mère, lors de la fuite qu’elle projetait.
    Sur l’ordre de Louis, j’allai alors quérir le père de
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