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Le Gerfaut

Le Gerfaut

Titel: Le Gerfaut
Autoren: Juliette Benzoni
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par nos armes sur l’Angleterre ?
    — L’Amérique ? Y étiez-vous donc, monsieur ?
    — Voici deux mois que j’en suis revenu à la suite de M. le duc de Lauzun que le comte de Rochambeau et le général Washington avaient chargé de porter à Versailles la nouvelle de leur victoire.
    — Une victoire ! En Amérique ! Décidément, ici nous sommes ignorants comme des sauvages. Ah ! chevalier, il va vous falloir attendre ici le retour de mon époux. Il m’en voudrait infiniment de ne pas avoir retenu un homme aussi intéressant. Je ne vous lâche plus.
    — Hélas, madame… Je crains de ne pouvoir m’attarder. Puis-je vous rappeler que je suis ici pour affaire grave ?… et urgente !
    La châtelaine rougit, esquissant un sourire confus.
    — Pardonnez-moi, je l’avais oublié. Vous mettez tant de bonne grâce que je vous traitais déjà en vieil ami.
    — J’espère que vous me traiterez encore de même lorsque j’aurai parlé. Encore que je doive vous rappeler un vilain souvenir. Madame… Il y a peu, aux vigiles de Noël, les abords de ce château ont été le théâtre d’un drame atroce. Une jeune femme, vêtue d’une robe de mariée…
    Mme de Châteaugiron se leva d’une pièce, lâchant la pelote de laine qui alla rouler jusqu’au milieu du salon. Elle était devenue si pâle que Gilles crut, un instant, qu’elle allait s’évanouir. Elle mit ses deux mains sur ses oreilles comme si, dans un lointain connu d’elle seule, elle entendait des cris.
    — Pour l’amour du ciel, monsieur, ne me parlez pas de cette abominable histoire ! Je ne veux plus en entendre parler… Je ne pourrais pas le supporter… Elle hante mes nuits…
    — À mon tour de vous dire : pour l’amour de Dieu, madame, ayez pitié ! Je devine combien cette évocation doit vous être pénible, mais daignez songer que, moi, cette histoire me tue. Depuis que je l’ai entendu conter je crains… mon Dieu ! je devrais dire je meurs de peur d’apprendre que la victime en était la jeune fille que j’aimais, celle pour qui je me suis battu en Amérique, celle que je revenais chercher. Écoutez-moi, madame. Ne refusez pas de m’écouter ! Il faut que vous m’aidiez.
    De son tabouret, il n’avait eu aucune peine à s’agenouiller à demi aux pieds de la Comtesse qui, lentement, laissa retomber ses mains tandis qu’un peu de rose revenait à ses pommettes.
    — Si l’on vous a raconté l’histoire, monsieur, je ne vois pas ce que je pourrais vous dire de plus, fit-elle d’une voix éteinte. D’ailleurs… d’où la tenez-vous ?
    — D’un certain Guégan, le sabotier de Campénéac…
    — L’homme qui était dans l’arbre ? Je comprends.
    — Ce malheureux, lui aussi, a perdu le sommeil. Il boit et quand il a bu, il parle. Madame, je vous en supplie, il n’entre pas dans mes intentions de vous faire souffrir mais j’ai besoin que vous répondiez à une question… à une seule !
    — Laquelle ?
    — D’après le récit de Guégan, la victime n’était pas tout à fait morte quand on l’a tirée de… Il s’est écoulé un assez long moment avant que votre époux ne porte la nouvelle de sa mort définitive. Il se peut qu’elle ait un instant repris connaissance… qu’elle ait pu vous apprendre son nom ?
    — Si c’est là votre question, Monsieur le chevalier, je n’y répondrai pas.
    Lentement, Gilles se releva de manière à pouvoir plonger son regard dans celui de la châtelaine.
    — Non. Ce n’est pas ma question. Vous n’y répondriez pas en effet car il se peut que vous conserviez envers moi quelque méfiance. Ma question va venir dans un instant. Je vais vous dire un nom, Madame la Comtesse. En échange, je ne vous demande qu’un mot de trois lettres : oui… ou non ! Rien de plus !
    Il dominait la jeune femme de toute la tête, cherchant à capter un regard qui se refusait et qui pourtant, peu à peu, se laissa prendre. L’horreur qu’il y lut n’était pas feinte, ni d’ailleurs l’angoisse.
    — Mais enfin, chevalier, qu’est-ce qui peut vous faire croire que je puisse répondre à cette question ? Qui vous dit que cette pauvre enfant a pu…
    — Rien, madame ! Si ce n’est mon cœur et la foi que j’ai en Dieu. Il n’a pas pu laisser perpétrer un forfait aussi infâme sans laisser une trace, si petite soit-elle, pour la vengeance.
    — La vengeance ! Est-ce à dire que, si je pouvais répondre à votre question… et répondre
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