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Le dernier royaume

Le dernier royaume

Titel: Le dernier royaume
Autoren: Bernard Cornwell
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loin s’entremêlaient des toits de chaume, les clochers
de bois de trois églises et, sur la rivière, les mâts de la flotte dane. Nos
éclaireurs prétendaient que les Danes disposaient de trente-quatre navires,
soit une armée d’environ mille hommes. La nôtre était plus importante, proche
de quinze cents, mais c’était difficile d’en faire un compte exact. Personne ne
semblait la diriger. Nos deux chefs, Osbert et Ælla , campaient à part
et, bien qu’ayant officiellement conclu la paix, ils refusaient de communiquer
autrement que par messagers interposés. Mon père, le troisième personnage le
plus important de l’ost, parlait aussi bien à Osbert qu’à Ælla, mais il ne put
les persuader de se rencontrer, encore moins d’établir un plan de campagne.
Osbert voulait assiéger la cité et affamer les Danes, tandis qu’Ælla comptait
lancer l’attaque. Le rempart était brisé, disait-il, et un assaut permettrait
de pénétrer dans le dédale des rues pour y traquer les Danes. J’ignore ce que préférait
mon père, car il ne me le confia pas ; mais au bout du compte, la décision
ne nous revint pas.
    Notre armée ne pouvait attendre. Nous avions apporté des
vivres, mais ils furent rapidement épuisés et les hommes devaient aller chaque
jour plus loin pour s’en procurer. Certains ne revinrent jamais. Ils étaient
simplement retournés chez eux. D’autres affirmaient que leurs fermes avaient
besoin d’eux et qu’ils devraient affronter une année de famine s’ils ne
rentraient point. Les chefs se réunirent et passèrent toute une journée à se
quereller. Osbert y assista, Ælla n’y alla donc point, mais l’un de ses
partisans s’y rendit et insinua qu’Osbert rechignait à lancer l’assaut par
couardise. C’était probable : Osbert ne répondit pas à cette provocation
et proposa d’établir des fortifications en dehors de la ville. D’après lui,
trois ou quatre forts prendraient les Danes au piège. Nos meilleurs combattants
pouvaient y rester postés, tandis que les autres rentreraient chez eux
s’occuper de leurs terres. Un autre proposa de construire sur la rivière une
passerelle qui retiendrait la flotte dane et défendit longuement cette idée,
alors que j’eus l’impression que tout le monde savait que nous n’avions pas le
temps de bâtir un tel pont sur une rivière aussi large.
    — Par ailleurs, dit le roi Osbert, nous voulons que les
Danes repartent avec leurs navires. Laissons-les retourner en mer. Laissons-les
partir et en attaquer d’autres.
    Un évêque plaida pour que nous attendions, sous prétexte que
l’ealdorman Egbert, seigneur des terres au sud d’Eoferwic, n’était pas encore
arrivé avec son armée.
    — Pas plus que Ricsig, fit remarquer un prêtre, parlant
d’un autre seigneur.
    — Il est mal en point, commenta Osbert.
    — Il souffre d’un manque de courage, ricana le
porte-parole d’Ælla.
    — Accordez-leur du temps, suggéra l’évêque. Avec les
hommes d’Egbert et de Ricsig, nos troupes seront assez nombreuses pour effrayer
les Danes.
    Mon père ne dit rien durant l’assemblée, mais il était
évident que nombre de ses hommes voulaient qu’il prenne la parole, et son
silence me surprit. Cette nuit-là, Beocca m’en expliqua la raison :
    — S’il avait dit que nous devions attaquer, les hommes
auraient pensé qu’il prenait le parti d’Ælla ; et s’il avait déclaré
préférer le siège, on l’aurait tenu pour un partisan d’Osbert.
    — Quelle importance ?
    Beocca me regarda par-dessus le feu de camp. Du moins l’un
de ses yeux me regarda-t-il, tandis que l’autre se perdait dans la nuit.
    — Quand les Danes seront battus, dit-il, la querelle
d’Osbert et Ælla reprendra. Ton père ne veut point s’en mêler.
    — Mais celui qu’il soutiendra remportera la victoire.
    — Imagine qu’ils s’entretuent. Qui sera roi,
alors ?
    Je le regardai, compris et me tus.
    — Et qui sera le roi, ensuite ? poursuivit Beocca.
(Il tendit le bras vers moi.) Toi. Et un roi doit savoir lire et écrire.
    — Un roi, répondis-je avec mépris, peut toujours
prendre à son service des hommes sachant lire et écrire.
    Le lendemain matin, la décision d’attaquer fut prise, car
nous apprîmes que d’autres navires danes étaient arrivés à l’embouchure de la
rivière Humber. Cela ne pouvait signifier qu’une chose : l’ennemi allait
recevoir des renforts sous quelques jours. Aussi, mon père, qui
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