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L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford

L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford

Titel: L’assassinat de Jesse James par le lâche Robert Ford
Autoren: Ron Hansen
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le wagon encore éclairé au petit trot, dérapant un peu sur l’étroit
tapis persan qui garnissait l’allée et faisant tinter un crachoir en cuivre
contre une colonne dorique en chêne. Ils atteignirent la plate-forme, Jesse
tapa contre la porte vitrée de la voiture pour dames avec son pistolet et Frank
se retourna, puis les invita à entrer de la main.
    « Commencez par ce bout jusqu’au milieu »,
intima-t-il à Charley et Dick qui se précipitaient déjà dans la voiture en se
bousculant.
    S’éleva alors un concert de voix querelleuses
et plaintives entremêlées, comme les bandits se présentaient devant chaque
adulte et le ou la mettait en demeure de cracher au bassinet. Lorsque la somme
versée était trop faible, la personne se voyait coller un pistolet sur le front
et signifier de chercher davantage. Ed Miller soulagea de sept cents dollars un
homme qui portait une barbe et des lunettes, mais Jesse eut une intuition et, à
l’issue d’investigations tatillonnes, dénicha cent dollars de plus. Lorsque
Charley réveilla d’une bourrade un Hollandais qui, d’après Williams, l’employé
des wagons-lits, dormait depuis qu’il avait terminé de dîner à Columbia, le
voyageur crut d’abord qu’on lui réclamait de s’acquitter une seconde fois du
prix de son billet ; Charley pressa alors son revolver contre la joue du
Hollandais et lui vola les trois cents dollars avec lesquels ce dernier
escomptait acheter une ferme à Joplin. Mr C. R. Camp, l’organisateur
de circuits de visites à l’intention d’investisseurs fonciers de New York, chiffra
plus tard les pertes du groupe qu’il accompagnait à quatre mille vingt et un
dollars. Clarence Hite s’accroupit devant un enfant en bas âge à qui il enleva
ses chaussures afin de glisser un doigt dedans et en retira Dieu sait quoi. John
O‘Brien, qui avait dissimulé dans son pantalon plusieurs centaines de dollars
sous la forme d’une liasse de billets attachés par un élastique, se délesta, sur
les instances de Frank James, d’un millier de dollars destiné à couvrir ses
frais professionnels. Malheureusement, alors que Frank venait de passer son
chemin, l’argent personnel d’O’Brien glissa le long de sa jambe et roula par
terre, où sa fille le ramassa en carillonnant : « Tiens, encore un
peu d’argent, papa ! » Sur quoi Frank se retourna et chipa la liasse
des mains de la fillette. Dick Liddil commanda à Mrs C. A. Dunakin de
lever les bras au-dessus de sa tête et de pivoter quatre fois sur elle-même
pendant qu’il l’inspectait.
    « La prochaine fois, on prévoira une dame
pour fouiller les passagères, maugréa-t-il.
    — Que ce soit une femme ou un homme
déguisé en femme, ce ne sera certainement pas une dame », répliqua Mrs Dunakin.
    Un immigrant dont le portefeuille avait fini
au fond d’un sac implora Jesse de l’autoriser à récupérer son contrat d’assurance
qui était dedans, mais sa requête fut rejetée sous prétexte que cela eût pris
trop longtemps. Des enfants pleuraient dans des coins ; plusieurs femmes
furent prises d’hystérie et restèrent dans cet état toute la nuit ; certains
hommes demeurèrent assis sur leur siège, le visage vide, les mains inertes dans
leur giron, ayant perdu des fortunes : le fruit d’économies obstinées, de
quoi acheter une petite maison, le produit de la vente aux enchères de six
vaches Holstein, une montre paresseuse offerte pour des noces d’argent.
    Jesse contourna Williams, qui avait déjà été
fouillé, et poussa jusque dans la voiture-lit, écartant les rideaux de velours
vert de chaque couchette. Il terrorisa une vieille femme avec des tresses qui
avait le teint cireux et priait de ses frêles mains jointes ; le reste de
la voiture semblait vide. Il entrouvrit les pans de la portière en toile et
avisa, dans l’entrée de la voiture, deux femmes en chemise de nuit et un gros
homme massif comme un piano qui se blottissaient contre le chef de train. La
pusillanimité de ce groupe le démoralisa et il sortit sur la plate-forme. Frank
et une partie des autres étaient sur le ballast et versaient le butin dans un
sac à farine. Des cheminots du train de marchandises s’étaient aventurés jusqu’au
fourgon de queue afin d’observer innocemment les opérations et d’en débattre à
voix basse. Les chevaux étaient là, ils hennissaient et s’ébrouaient doucement
dans le grenier d’herbes et de taillis en contre-haut du déblai. Dans
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