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L'Anneau d'Atlantide

L'Anneau d'Atlantide

Titel: L'Anneau d'Atlantide
Autoren: Juliette Benzoni
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une seconde cigarette, repris par le charme de sa ville bien-aimée. Le temps s’était effacé avec le bruit de la civilisation. Seul, le miaulement indigné d’un chat noctambule trouvant porte close vint rappeler à Aldo qu’il ne se mouvait pas dans un monde de pierre et d’eau figé dans sa splendeur. Et puis soudain, aigu, désespéré, il y eut un cri suivi presque aussitôt d’un râle affreux – mais déjà Aldo courait dans sa direction. La lune déversait suffisamment de lumière pour qu’il aperçût trois hommes en train d’en malmener un autre. À pleins poumons, il hurla :
    — Tenez bon ! J’arrive !
    Simultanément, il tirait d’une poche le revolver plat qui ne le quittait plus guère lorsqu’il sortait la nuit, tira deux coups en l’air dans l’espoir d’attirer l’attention des gens dans ce quartier trop silencieux. Un juron lui répondit aussitôt, suivi d’un bruit de galopade et, en arrivant sur place, il constata que les malandrins s’étaient enfuis, abandonnant à terre un homme inanimé qui, curieusement, ne portait sur lui que sa chemise et ses sous-vêtements.
    Un instant, il le crut mort à la vue du sang coulant de sa poitrine, mais le pouls battait encore faiblement. Aldo hésita, sa demeure n’était pas loin et l’homme, âgé, ne devait pas peser lourd… Le silence était toujours aussi accablant : les cris qui l’avaient alerté n’avaient attiré personne et il ne put retenir une grimace de mépris. Depuis que le  Fascio  de Mussolini régnait sur l’Italie, un de ses tentacules s’était enroulé autour de l’ancienne Sérénissime République où l’on avait appris à redouter ces hommes en chemise noire, déambulant par deux, espions sans cesse à l’affût qui ne cherchaient surtout pas à dissimuler ce qu’ils faisaient. C’était à pleurer !
    Prenant son parti, il se pencha pour soulever le blessé et l’emporter. Ses muscles régulièrement entraînés devaient le lui permettre, mais quand il voulut le redresser, l’homme se raidit :
    — No  !…  Too late (1)  ! souffla-t-il.
    — Vous n’en savez rien ! Et je veux seulement vous transporter chez moi ! J’habite à deux pas : le palais Morosini.
    Parce que c’était la langue que l’on employait chez lui dans la vie quotidienne, Aldo avait parlé français. L’œil fermé du blessé se rouvrit, cependant qu’il cherchait un souffle en train de le fuir :
    — Moro… sini ! Loué soit… Dieu… ! Cherchez… Là ! ajouta-t-il en s’efforçant de tendre une main tremblante en direction de son pied gauche dont on avait aussi enlevé la chaussure.
    — Votre jambe ? La chaussette ? demanda Aldo en se penchant sur l’endroit indiqué revêtu de soie noire qu’il tâta et d’où il tira un petit sachet de daim, noir également.
    Sans l’ouvrir, il voulut le placer dans la main de l’homme, mais celui-ci le repoussa :
    — Ga… gardez ! Très… impor… tant… ! Et partez !
    Le souffle s’épuisait et il était évident que le blessé allait mourir. Aldo s’apprêtait à explorer sa trouvaille où il sentit quelque chose de dur, mais le mourant, s’accrochant à sa main au prix d’un effort terrible, parvint à murmurer :
    — As… souan… ! Sanctu… aire… la Reine… Inconnue… ! Ibrahim…
    Ce fut tout. La pression de la main céda tandis que l’homme à demi redressé se laissait aller sur les pavés. Aldo accompagna son mouvement puis se releva. Il lui fallait du secours. Immédiatement ! Or, autour de lui, c’était toujours le silence d’une ville morte. Furieux, il hurla :
    — Réveillez-vous, bon sang ! À l’aide ! Appelez la police !
    Il achevait tout juste sa phrase que celle-ci se matérialisait sous les apparences, efficaces en général mais plutôt débonnaires, du commissaire Salviati, ce dont il fut grandement soulagé. Grâce à Dieu, ce n’était pas un séide du  Fascio  mais un honnête policier à l’ancienne mode qu’il connaissait bien pour l’avoir rencontré à la suite du cambriolage chez sa cousine Orseolo.
    — C’est vraiment le Ciel qui vous envoie ! s’exclama Morosini. Je commençais à croire que j’avais changé de planète ! Bonsoir, commissaire !
    — Bonsoir, prince ! Le Ciel n’y est pour rien. C’est le teinturier de San Polo qui nous a alertés.
    — Il aurait pu venir
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