Bücher online kostenlos Kostenlos Online Lesen
La Volte Des Vertugadins

La Volte Des Vertugadins

Titel: La Volte Des Vertugadins
Autoren: Robert Merle
Vom Netzwerk:
Bassompierre ? Le plus beau galant
de la cour ? Ne vas-tu pas regretter ton maître ? On dit qu’on mène
joyeuse vie chez Monsieur de Bassompierre.
    — C’est vrai, mais cela est fatigant à vivre à la
longue, bien que ces messieurs soient si polis.
    — De quels messieurs parles-tu, Toinon ?
    — Se peut-il que vous ne connaissiez pas les amis de
mon maître ?
    — Se peut que non.
    — Je m’en vais donc vous les nommer : Schomberg,
Bellegarde, Joinville, D’Auvergne, Sommerive, pour ne nommer que ceux-là.
    Je fus béant de l’entendre réciter ces grands noms aussi
familièrement que s’il se fût agi de petits apprentis de boutique.
    — Eh quoi, dis-je, ne les aimais-tu pas ?
    — Oh que si. Monsieur ! dit-elle. C’est qu’ils
sont, de vrai, fort aimables et en outre si beaux et si bien faits qu’il n’est
pas possible de plus ! Mais chez Monsieur de Bassompierre, la nuit est
pareille au jour ! On vit à la chandelle comme à la lumière du soleil. Et
il n’y a quasiment pas d’instant que l’on puisse accorder au sommeil. Et moi,
Monsieur, pour mon malheur, je suis dormeuse comme loir. Et bien aise je me
trouve d’entrer aujourd’hui dans une maison bien réglée, comme on dit que l’est
la vôtre.
    Et moi trouvant qu’elle parlait joliment pour une
chambrière, je l’écoutai. Et longtemps après qu’elle eut fini son petit
discours, et qu’elle se fut mise à son travail dans ma chambre, je la regardai
et d’autant plus volontiers que tournant comme elle faisait autour de mon lit,
je pouvais la considérer sous tous les angles.
    Cependant, mon silence devenant gênant pour moi-même sans
pour autant que je voulusse que l’entretien se terminât, je résolus de parler.
    — Ainsi, dis-je, ne sachant trop que dire, n’ayant pas l’esprit
à mes paroles, tu es notre nouvelle chambrière ?
    Toinon se releva, fit la moue et des pieds à la tête
gracieusement se tortilla.
    — Soubrette, Monsieur, pour vous servir ! Plaise à
vous de m’appeler ainsi : sans cela, je croirais déchoir.
    — Tu croirais déchoir ! Toinon, ne serais-tu pas
un peu façonnière ?
    — Comment l’entend Monsieur ?
    — Comme quelqu’une qui fait des façons.
    — Oh non ! Monsieur, ce n’est pas ma nature !
Je suis toute simplette. Je me plais à qui je plais. Point de manières !
Et si vous désirez vous en assurer, Monsieur, il n’est que de me prendre dans
vos bras.
    Quoi disant, elle m’adressa une deuxième petite moue, si
gentille et si attachante que je me levai de mon escabelle et laissant là mon
Suétone, je fis tout de gob comme elle avait dit et m’en trouvai bien, son
petit corps contre le mien étant potelé et frétillant.
    — Eh bien. Monsieur, dit-elle, vous ai-je menti ?
Est-ce que je fais céans la renchérie ? Où voyez-vous ici des
façons ? N’y vais-je pas tout rondement, et à la franche marguerite ?
    Ah certes ! si alors j’avais été plus vieux, j’y serais
allé, moi aussi, à la franche marguerite et j’aurais incontinent avec elle
défait le lit qu’elle venait de refaire. Mais je venais à peine de passer les
douze ans et quoique fort grand et robuste pour mon âge, je n’avais pas encore
de ces audaces-là. Avec Frédérique, je n’avais pas dépassé les mignonneries
auxquelles l’obscurité et la tiédeur du lit semblaient nous inviter. Et pour le
dire tout net, le pire que mon père redoutait ne s’était pas produit. J’en
avais la capacité. Je n’en avais pas la connaissance.
    J’hésitai. Toinon le sentit. Elle ne voulut pas pousser les
choses au point où j’eusse pu défaillir. Elle se désengagea avec beaucoup de
grâce de mes bras, non sans me promettre d’y revenir, résolue, comme bien elle
le montra, à parvenir par degrés à la fin que je désirais.
    Ignorant et béjaune que j’étais alors, je m’imaginais devoir
sa complaisance soit à ma bonne mine, célébrée à l’envi par mes nourrices et ma
marraine, soit encore à une générale pliabilité des femmes, par où ce suave
sexe se rendrait aussitôt docile à l’appétit du nôtre, dès lors qu’il
s’exprimait. Mon père ne m’encourageant pas à me paonner de mon apparence, je
m’arrêtai à l’idée que je viens de dire et je me souviens encore du scandale et
de la stupéfaction où je fus plongé quand, trois ans plus tard, une coquette,
que je courtisais, me rebuta.
    Dans la conversation, fort de mon rang, et de mon petit
savoir, je
Vom Netzwerk:

Weitere Kostenlose Bücher