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La Revanche de Blanche

La Revanche de Blanche

Titel: La Revanche de Blanche
Autoren: Emmanuelle Boysson (de)
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noiraude à l’œil sournois, toujours un panier sous le bras. À l’heure des rafraîchissements, elle interroge la marquise. Athénaïs renverse son verre de jus de pomme :
    — De quoi te mêles-tu ? Françoise Filastre est ma nouvelle chambrière. Une femme de confiance. Elle a travaillé chez Madeleine Chappelain, une lointaine cousine qui vit dans un hôtel, rue de Berry. Je l’ai recommandée à Angélique. Elle est d’Auvergne, ça fera plaisir à la petite…
    Étonnée par ce regain de bonté, Blanche se mord les lèvres pour ne pas moucher son amie. Un valet lui remet une lettre d’Antoine. Elle se retire, la dévore :
    Ma belle ,
    Comme le temps me paraît long sans toi. Je t’écris sur notre navire qui vogue vers les îles Marquises. On dirait que le Seigneur a posé sur la mer des seins de femme. Je n’ai jamais vu des plages si douces, de vraies invitations au péché. Nous y avons planté un drapeau et une croix. Elles appartiendront à la Couronne. Nul n’a encore foulé ces rivages ni dormi sous ces palmes exotiques. Des milliers de poissons phosphorescents peuplent leurs eaux chaudes à souhait. Mais, je m’attarde. J’imagine que tu es encore à la Cour. Ton « travail » doit te paraître de plus en plus pesant. Être la dame de compagnie d’une vaniteuse n’est pas une sinécure ! J’ai appris que la Chambre ardente procédait à de nombreuses arrestations et coupait des têtes à tour de bras. Méfie-toi de ceux et de celles qui se disent tes amis. De leurs coups de poignard dans le dos. Tu es trop soucieuse du bien des autres. Je veux ton bonheur. Je t’attends. Je t’aime.
    Antoine
    Blanche embrasse le billet, le fourre sous son oreiller, se love dans ses draps frais. Comme il est loin ce temps où la musique les réunissait un soir d’été à Villarceaux ! Nos amours se conjuguent-ils avec des moments de notre vie ? Antoine a-t-il changé ou est-ce moi qui me suis délestée de mes ambitions ?
     
    Septembre : la chasse est ouverte. Le cortège s’arrête pour une collation. Louis en profite pour s’éclipser dans les sous-bois avec sa blonde. Au bout d’une heure, la Fontanges sort d’un fourré échevelée, une boule de cheveux au sommet du crâne, un ruban sur le front.
    — Vos agapes vous ont décoiffée, mademoiselle, sifflote la Palatine.
    — Ses cheveux se sont accrochés à une branche. Je lui ai demandé de ne rien toucher, n’est-ce pas charmant ? se pâme Louis.
    — Sa coiffure a un je-ne-sais-quoi de négligé qui la flatte, se fend la Palatine.
    — Elle a l’air d’une dinde ! raille Athénaïs.
    Lassée de ces crêpages de chignon, Blanche boude.
    Angélique a de la suite dans les idées. Elle ordonne à Gaspard, serrurier du roi, de fabriquer, à l’aide de fils de fer et de grillage, une pièce montée de trois étages qui s’adapte à son crâne. La coiffure « à la Fontanges » est née. Toutes les dames veulent la leur. Les vieilles se contentent de postiches, les plus osées se font poser un échafaudage sur lequel viennent s’arrimer dentelles, pierreries et autres colifichets coûteux. Un mécanisme permet même de tasser le tout pour passer les portes. Mme de Maintenon se refuse à adopter cette extravagance et use d’un simple chignon sous de grandes mantes de dentelles assorties à ses robes noires.
    Un soir où les grillons crissent derrière les persiennes, Athénaïs se plonge dans une bassine de cuivre. Blanche lui lave les cheveux. La marquise vitupère :
    — Cette coiffure grotesque est la goutte d’eau qui fait déborder le vase. La comédie a assez duré !
    La Filastre toque à la porte. Sur ordre de sa maîtresse, Blanche se retire, tend l’oreille.
    — Ce sera long, mais sûr…
    Que veut dire cette intrigante ? Pourquoi tant de secrets ?
     
    Les bois sentent le roussi. Début octobre, le roi affiche une mine grave et s’enferme avec ses ministres dans ses appartements. Atterré par les déclarations de Lesage qui a donné les noms de plusieurs duchesses et princesses impliquées dans l’affaire des poisons, il invite La Reynie « à faire la lumière sur toutes les tentatives criminelles, si haut placés que fussent les coupables ».
    Le soir de la Toussaint, Blanche croise Angélique. Chignon défait, la jeune fille sanglote :
    — Les ours de la Montespan ont failli me dévorer. Je la hais ! Je la hais !
    Dans son salon, deux ours arrachent de leurs griffes rideaux et tapisseries
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