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La Religion

La Religion

Titel: La Religion
Autoren: Collectif
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chariot à deux roues. Le corps de Nicodemus n’avait pas pu être retrouvé. Sous un pâle soleil qui montait au-dessus du sommet du mont San Salvatore, ils les emmenèrent jusqu’à la nécropole d’Hal Saflieni, et, une fois là-bas, les allongèrent pour qu’ils reposent parmi d’antiques compagnons. Également à la demande de Carla, frère Lazaro était venu, et même s’il tremblait devant ces terres païennes, à elle il ne pouvait vraiment pas le refuser. Il consacra donc les niches qu’ils avaient choisies, car, selon le droit canon, chaque homme peut choisir l’emplacement de sa mise en terre. Il aspergea les corps d’eau bénite, le kyrie et le cantique de bénédiction furent récités et Lazaro accomplit avec fidélité les rites de la foi catholique. Puis il s’en alla, récitant le De profundis en disparaissant à leurs yeux, tandis qu’eux trois et leurs deux amis disparus demeuraient dans les catacombes, dans un silence douloureux à supporter.
    De la charrette Tannhauser sortit la viole de gambe. Et Carla joua.
    Elle joua jusqu’à croire que son cœur allait se rompre. Et en regardant Tannhauser, il lui sembla que le sien l’était déjà, et elle se rendit compte qu’elle l’avait perdu, quelque part dans le chagrin. Quand Carla sentit qu’elle ne pouvait plus jouer, elle regarda Orlandu, qui lui rendit son regard, les yeux forts, chauds et fermes, puis il lui sourit, un peu timidement, et elle se remit à jouer, portée par la flamme de bonheur qu’il venait d’allumer.
     
    ILS REPRIRENT LE CHEMIN du Borgo, et Mattias lui expliqua qu’il avait décidé de partir pour Venise sur le premier bateau. L’amour de Carla pour lui n’avait pas décru, au contraire, sa chaleur et son ardeur étaient plus intenses encore. Mais la mort d’Amparo pesait aussi lourdement sur lui que sur elle, peut-être même plus encore, et un chagrin mutuellement partagé faisait un piètre terrain pour la floraison d’une passion. Il ne fit pas mention de leur accord, et elle non plus. Il lui demanda si elle resterait à Malte, et elle répondit que non. Elle allait régler les affaires de succession de son père, puis retourner en Aquitaine avec Orlandu, et Mattias comprit, car les chevaliers réclamaient désormais l’île par droit du sang, et pas comme simple résidence, et ils allaient la changer en une forteresse entièrement consacrée à la guerre. Comme ils approchaient de la porte de Kalkara, ils descendirent de cheval et Tannhauser se tourna vers elle.
    « La nuit où ils nous ont pris ici, dit-il, vous souvenez-vous des tout derniers mots qu’Amparo m’a dits ?
    – Oui, bien sûr, répliqua Carla. Que signifiaient-ils ? »
    Elle vit la douleur sur son visage. « Je ne parviens pas à m’en souvenir, dit-il. Cela m’a apporté un tourment considérable.
    – Le rossignol est heureux, dit Carla.
    Tannhauser hocha la tête. « Bien sûr. » Il souriait, mais ses yeux étaient brillants de tristesse.
    « Que voulait-elle dire ? demanda Carla.
    – Elle voulait dire que j’étais sa rose rouge sang », répondit Tannhauser.
    Carla le fixait, intriguée, attendant plus.
    « C’est une fable que les Arabes racontent, dit-il, et Amparo l’aimait beaucoup.
    – Me la raconterez-vous ? »
    Tannhauser la prit dans ses bras et la serra tant qu’elle crut qu’il allait écraser la vie en elle. Elle sentit qu’il prenait une décision qui le déchirait, et ses bras la relâchèrent. Il la regarda et, dans les charbons bleu ardent de ses yeux, elle vit une tristesse trop profonde, insondable, et elle eut une appréhension soudaine. Sa voix chancela.
    « Me diras-tu cette fable ? demanda-t-elle à nouveau.
    – Oui, dit Tannhauser. Un jour. »

É PILOGUE
    LA GRÂCE DE DIEU

1566
     
    LE VICE-ROI DE SICILE, l’Espagnol Garcia de Toledo, arriva à Malte une semaine après que le siège avait été levé, et il fut si saisi par les souffrances extrêmes qu’il découvrit que certains affirment qu’il versa des larmes de pitié, quand d’autres disent qu’elles étaient de honte. On fit faire à Toledo une visite du champ de bataille imprégné de sang, il entendit les vaillants faits d’armes qui y avaient eu lieu, et il réclama le corps de son fils Federico, enseveli dans la crypte depuis sa mort lors de la bataille pour la première tour de siège turque. Trois jours plus tard, Toledo s’en alla. Il ne revint jamais à Malte et retomba
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