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La Marquise de Pompadour

Titel: La Marquise de Pompadour
Autoren: Michel Zévaco
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demanda Saint-Germain.
    – Un valet seulement.
    – Et dans les autres pavillons ? regardez bien…
    – Dans celui du fond, personne !… Dans celui de droite, un homme et une femme… vous me les avez désignés sous le nom de comte et comtesse du Barry.
    – Ah ! ah ! fit Saint-Germain en tressaillant. Cela devient limpide. Entendez-vous ce qu’ils disent ?…
    – Ils ne se disent rien…
    – Alors, mon enfant, je suis obligé de vous demander un gros effort…
    La dormeuse se raidit encore davantage.
    Saint-Germain étreignit ses mains dans les siennes et reprit :
    – Ecoutez ce que chacun d’eux se raconte à lui-même…
    Eva, pendant près d’une demi-heure, parut faire un prodigieux effort. Haletant, la sueur au front, penché sur elle, Saint-Germain ne la perdait pas de vue et continuait à serrer ses mains.
    – Je ne peux pas ! murmura la dormeuse en râlant.
    – Il le faut ! ordonna durement Saint-Germain. Allons ! Encore un effort… écoutez… entendez-vous ?…
    – J’entends ! fit Eva dans un souffle.
    – Bien, mon enfant, très bien… Vous êtes admirable…
    Une expression de fierté et d’indicible bonheur se répandit sur le visage convulsé de la dormeuse.
    – Maître ! dit-elle, j’entends ! J’entends très bien…
    – Ecoutez ce que la femme se dit…
    – Elle se dit qu’elle sera souveraine à la cour de France… et que dès qu’elle pourra… elle fera arrêter un M. Jacques… et le comte du Barry… elle les voit à la Bastille… elle sourit… Maintenant, elle voit le roi… maintenant, elle voit le chevalier d’Assas… elle ne veut pas qu’il meure, elle veut le sauver… maintenant, elle voit M me  d’Etioles…
    – Assez, mon enfant… Ecoutez du Barry… que se dit-il ?…
    – Des choses remplies de désespoir et de haine surtout…
    – De la haine ?… Contre qui ?…
    – Contre le roi… contre Jacques, contre vous, mon cher seigneur !… Oh ! le misérable !… prenez garde !…
    – Ensuite, mon enfant !…
    – De la haine, toujours ! Contre la femme qui est près de lui… contre M me  d’Etioles… contre le chevalier… il va le tuer, il prépare le meurtre, il cherche l’heure favorable… il le tuera dans l’entrée du pavillon lorsque le chevalier sortira… il ne sait pas encore comment il le tuera…
    – Assez, mon enfant ! dit Saint-Germain à bout de forces lui-même. Ne regardez plus, n’écoutez plus. Revenez à moi…
    Un sourire radieux transfigura le visage de la dormeuse.
    – Ecoutez-moi, reprit le magnétiseur. Pendant toute mon absence, je vous défends la tristesse, vous m’entendez bien ? Vous songerez que je vais bientôt revenir, que je pense à vous, et vous serez heureuse… je le veux… Maintenant, dormez en paix, mon enfant… Vous vous réveillerez dans deux heures…
    La raideur cataleptique disparut alors presque soudainement.
    Saint-Germain fit quelques passes sur le front d’Eva qui, allongée sur le divan, prostrée par une extrême fatigue, parut passer sans secousse du sommeil magnétique à un souriant et heureux sommeil naturel.
    Alors le comte de Saint-Germain déposa un long baiser sur le front de la jeune femme qui, sous ce baiser, tressaillit…
    Puis il passa dans sa chambre, se défit rapidement du costume qu’il portait, se dépouilla de tous ses bijoux et revêtit un vêtement de bourgeois modeste, d’une couleur neutre.
    Seulement, sous ce vêtement, il avait revêtu une cotte de mailles, – un de ces chefs-d’œuvre des armuriers de Milan dont les mailles légères, serrées comme celles d’un tissu de lin, pouvaient arrêter une balle et émoussaient la pointe des poignards. Alors, il appela un domestique et lui dit quelques mots.
    Moins de cinq minutes plus tard, le valet revint en disant :
    – La voiture de monsieur le comte est prête.
    Saint-Germain descendit et, dans la cour de l’hôtel même, monta dans une berline d’aspect très modeste, mais attelée à un cheval qui avait toutes les qualités apparentes d’un trotteur de premier ordre.
    – Vous arrêterez aux premières maisons de Versailles, dit-il au cocher. Et vous me réveillerez.
    La voiture s’ébranla aussitôt.
    Le comte de Saint-Germain s’étendit sur les coussins et murmura :
    – Je vais dormir jusqu’à Versailles. C’est plus qu’il ne m’en faut pour me reposer de cette rude séance…
    Dix secondes plus tard, il dormait profondément, tandis que la
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