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La Guerre Des Amoureuses

La Guerre Des Amoureuses

Titel: La Guerre Des Amoureuses
Autoren: Jean (d) Aillon
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gentilshommes et les gardes qui surveillaient l’entrée dans la
salle suivante le saluèrent et le laissèrent traverser.
    En entrant dans l’obscure salle du conseil, à
peine éclairée par le foyer de la cheminée et deux gros chandeliers sur
trépieds supportant chacun quatre bougies de cire, Rosny constata avec un brin
de dépit qu’il était le dernier. Cinq hommes étaient déjà installés autour de
la table rectangulaire sur laquelle était posés deux gros pains, des noix, du
jambon, de la charcutaille et plusieurs flacons de vin poussiéreux.
    Le baron les connaissait tous. Quatre d’entre
eux avaient son âge. Ceux-là portaient des collets de buffle ou de maroquin
matelassé, deux avaient même gardé leur plastron d’acier. Comme lui, ils
avaient enfilé des grègues sous leurs hautes bottes de cavaliers et ils
portaient épées et dagues, main gauche [6] ou miséricorde [7] en
travers de la poitrine. Le cinquième, plus âgé, était en pourpoint avec une
petite fraise. Il sourit aimablement en reconnaissant Rosny.
    Le baron s’approcha, réconforté par la douce
chaleur des lieux. À la lueur vacillante des chandelles il fut frappé par les
visages fatigués, épuisés même, de ses compagnons d’armes. Il se dit qu’il
devait avoir la même figure qu’eux.
    — Ah, Rosny ! Nous n’attendions que
toi pour commencer, s’exclama l’un des hommes, le seul à afficher une
expression enjouée, quasiment déplacée dans cette salle sinistre.
    Sa voix était rocailleuse, une voix de paysan,
de berger béarnais. Âgé d’une trentaine d’années, il portait une barbe grise
broussailleuse qui contrastait avec son visage rieur. Ses hauts-de-chausses
matelassés étaient blancs (ou plutôt gris tant ils étaient sales !), comme
sa chemise et son pourpoint, mais les manches en étaient tachées de sombres
auréoles, peut-être de transpiration et plus probablement de sang. Une écharpe
de laine, qui avait été blanche, barrait sa poitrine. Sur les épaules, il
portait un long manteau doublé de passements de soie et son chapeau clair était
orné d’un panache blanc.
    Il se nommait Henri de Bourbon. C’était le
gouverneur de Guyenne et le roi de Navarre, un petit royaume qu’il tenait de sa
mère Jeanne d’Albret. Par son père Antoine, il descendait de Louis de Clermont,
sixième fils de Saint Louis. Si Henri III n’avait pas de fils, ce
Bourbon-là régnerait sous le nom d’Henri IV.
    Il régnerait ? Oui, mais à une condition :
qu’il gagne son royaume ! Car pour l’instant il ne gouvernait plus que
quelques lieues autour de Nérac et de Pau, sa capitale !
    — Je suis désolé d’être en retard, monseigneur,
je recevais un messager parvenu à traverser l’avant-garde de Mayenne.
    — Bonnes nouvelles ?
    — Non, monseigneur. Mayenne se rapproche
un peu trop vite et l’armée de Matignon serait sur le point de le rejoindre. Cavaliers,
piquiers et arquebusiers, ils seraient près de vingt mille. Nous n’aurions
peut-être pas dû venir jusqu’ici, remarqua-t-il.
    Après avoir fait lever le siège de Castets, Navarre
disposait encore de deux mille arquebusiers. Ses capitaines lui conseillaient
de poursuivre son avantage et de surprendre l’avant-garde de Mayenne. Au contraire,
il avait dispersé ses hommes dans des châteaux et des garnisons, ne gardant
avec lui que deux cents fidèles à cheval. C’est avec cette petite troupe qu’il
s’était rendu à Pau, puis à Nérac, alors que Rosny lui proposait plutôt de se
fondre dans le Béarn où il pouvait facilement disparaître et échapper aux
troupes guisardes.
    Faisant fi du reproche, Navarre garda un
visage impassible et saisit dans une coupe deux noix qu’il cassa l’une contre l’autre.
Il sortit les cerneaux de l’une et les croqua.
    — C’est aussi ce que pense mon cousin
Condé ! s’exclama-t-il la bouche pleine. Il m’assure que la ville ne
résistera pas à un assaut, que j’aurais dû garder mes arquebusiers pour
défendre Nérac, et que s’il avait su ce que je faisais, il ne serait pas tombé
dans ce piège.
    C’était un reproche à peine voilé, et chacun
le sentit. Une allusion aussi à ce qui s’était passé quelques mois plus tôt.
    — Si Condé avait pris Brouage, nous n’en
serions pas là, ajouta le roi, mi-sérieux mi-rieur.
    En novembre, Henri de Condé avait abandonné le
siège de Brouage pour se précipiter vers Angers. Des espions l’avaient prévenu
qu’ils pouvaient
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