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La fuite du temps

La fuite du temps

Titel: La fuite du temps
Autoren: Michel David
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pensais que c'était ta blonde
et que tu l'aimais.
     
    — Je l'aime
aussi.
     
    — Écoute donc,
Jean-Louis Morin! Lui as-tu dit que tu l'aimais, bonyeu?
     
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    — C'est gênant de
dire des affaires comme ça à une fille, admit son fils, apparemment très mal à
l'aise.
     
    — Là, j'ai mon
voyage! s'exclama sa mère. J'aurai tout entendu! Aïe, réveille-toi! T'es plus
un petit gars. T'as trente-deux ans. Tu devrais savoir depuis longtemps qu'une fille
aime pas avoir à deviner ces affaires-là. Tu dois lui dire! Maudit verrat,
veux-tu finir ta vie tout seul dans ton coin, comme un chien? Ton père et moi,
on sera pas toujours là. Quand on va être partis, veux-tu passer toutes tes
soirées tout seul, enfermé dans ta chambre sans avoir personne à qui parler? —
Ben non.
     
    — Ben, si c'est
pas ça que tu veux, je te conseille de te grouiller avant que ta Marthe
disparaisse parce qu'une fois partie, t'en trouveras pas une autre aussi fine.
Ça, je peux te le garantir, mon garçon. Demande-toi donc pourquoi et pour qui
tu vas travailler toute ta vie si t'as pas une famille.
     
    Jean-Louis ne dit
rien de plus. Il se leva, alla déposer son verre vide sur le comptoir, souhaita
une bonne nuit à ses parents et gagna sa chambre à coucher. Après avoir entendu
la porte de la chambre se refermer derrière lui, sa mère rangea soigneusement
les cigarettes qu'elle avait confectionnées dans la boîte métallique jaune de
tabac Matinée avant de remettre dans l'armoire ce qui lui avait servi à les
fabriquer. Elle s'alluma ensuite une cigarette avant d'aller rejoindre son mari
dans la salle de télévision.
     
    — Tiens, t'as
fini ton sermon? lui demanda ce dernier sur un ton narquois au moment où elle
prenait place dans son fauteuil.
     
    — A ce que je
vois, toi, t'haïs pas trop ça écouter en cachette, répliqua-t-elle sur le même
ton.
     
    — Cybole!
j'écoutais pas en cachette, se défendit Gérard. Tu parlais assez fort pour
qu'on t'entende de loin.
     
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    — Ben, tant
mieux! J'ai dit à notre garçon des affaires que toi, son père, t'aurais dû lui
dire depuis longtemps. En plus, tu peux pas prétendre que j'ai pas raison.
     
    — Moi, j'appelle
ça du tordage de bras. T'as l'air de vouloir absolument le caser.
     
    — Mais c'est en
plein ça, affirma la mère de famille avec force. Je veux qu'il se marie et je
trouve que Marthe est en plein le genre de fille qu'il lui faut. Viens pas me
faire accroire que t'aimerais pas l'avoir comme bru? — Pour ça, t'as raison,
admit Gérard. Elle est pas pire pantoute.
     
    Cette nuit-là, le
sommeil fuit longtemps la mère de famille. Elle ne cessait de songer au
problème de Jean-
    Louis. Quand elle
parvenait à distraire son esprit de l'avenir de son fils aîné, c'était pour
imaginer toutes sortes de scénarios dans lesquels elle parvenait à convaincre
son mari d'emménager rue Champagne. A deux heures du matin, désespérant de
s'endormir, elle se leva et alla fumer dans la cuisine. Elle ne s'endormit
finalement qu'un peu après quatre heures.
     
    À son réveil, le
lendemain matin, elle trouva la maison étrangement calme. Lorsqu'elle regarda
l'heure à l'horloge murale de la cuisine, elle se rendit compte qu'il était
près de dix heures. Évidemment, Jean-Louis avait quitté depuis longtemps la
maison. Il avait même pris la peine de laisser un court billet sur la table
pour signaler qu'il ne rentrerait pas souper ce soir-là. Elle laissa Gérard
faire la grasse matinée et ne le réveilla que pour dîner.
     
    L'après-midi lui
sembla interminable. Elle ne parvenait pas à chasser l'appartement de la rue
Champagne de ses pensées pendant qu'elle occupait ses mains à fixer des boutons
à deux chemises de son mari. Ce dernier, installé
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    dans la pièce
voisine, regardait un vieux film de Luis Mariano présenté au Canal 10.
     
    Soudain le
téléphone sonna et Laurette se précipita pour répondre.
     
    — Bonjour, madame
Morin, c'est Pierre.
     
    — Bonjour.
     
    — Vous m'avez
demandé hier soir de m'informer pour le logement de la rue Champagne. J'ai
téléphoné tout à l'heure à monsieur Vaccaro. L'appartement est pas encore pris.
Il veut le louer seulement quand j'aurai fini de le réparer.
     
    — Je comprends
ça.
     
    — Il m'a dit
qu'il allait demander cinquante piastres par mois pour le loyer.
     
    — Tant que ça!
s'exclama Laurette, dépitée.
     
    — Il faut
comprendre, madame Morin, que c'est un cinq et
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