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La Chute Des Géants: Le Siècle

La Chute Des Géants: Le Siècle

Titel: La Chute Des Géants: Le Siècle
Autoren: Ken Follett
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lui adressa un sourire
onctueux. « Camarade Pechkov, quel honneur !
    — Tu avais un autre ton,
dis-moi, le jour où je t’ai cassé la figure parce que tu harcelais une
malheureuse petite paysanne.
    — Les choses ont bien
changé, camarade – pour tout le monde.
    — Pourquoi a-t-on arrêté
Konstantin Vorotsintsev ?
    — Menées
contre-révolutionnaires.
    — C’est ridicule. Il était
président du groupe de discussion bolchevique aux usines Poutilov en 1914. Il a
été un des premiers députés du soviet de Petrograd. Il est plus bolchevik que
moi !
    — Ah, vraiment ?»
demanda Pinski d’une voix où perçait une trace de menace.
    Grigori l’ignora. « Fais-le
venir.
    — Tout de suite, camarade. »
    Konstantin apparut quelques
instants plus tard. Il était sale, mal rasé et il émanait de lui une odeur de
porcherie. Magda fondit en larmes et se jeta dans ses bras.
    « Je veux avoir un entretien
privé avec le détenu, dit Grigori à Pinski. Conduis-nous dans ton bureau. »
    Pinski secoua la tête. « Mon
humble…
    — Ne discute pas. Ton
bureau. » Pour affirmer son pouvoir, il ne devait pas laisser Pinski
relever la tête.
    Celui-ci les fit monter à l’étage,
dans une pièce qui donnait sur la cour intérieure. D’un geste preste, il
ramassa un coup-de-poing américain qui traînait sur une table et le fourra dans
un tiroir.
    Regardant par la fenêtre, Grigori
vit le jour se lever. « Attends dehors », ordonna-t-il à Pinski.
    Ils s’assirent et Grigori s’adressa
à Konstantin : « Bon sang, mais qu’est-ce qui se passe ?
    — On est venus à Moscou
quand le gouvernement a déménagé, expliqua Konstantin. Je pensais devenir
commissaire. Mais je me suis trompé. Je n’ai aucun soutien politique ici.
    — Alors qu’est-ce que tu as
fait ?
    — J’ai repris un boulot
normal. Je bosse à l’usine Tod, je fabrique des pièces détachées de moteur, des
dents d’engrenage, des pistons, des bagues de roulement.
    — Mais pourquoi est-ce que
la police te prend pour un contre-révolutionnaire ?
    — L’usine doit élire un
député au soviet de Moscou. Un des ingénieurs a annoncé sa candidature au nom
des mencheviks. Il a organisé une réunion et je suis allé l’écouter. Nous n’étions
qu’une douzaine. Je n’ai pas pris la parole, je suis parti avant la fin et je n’ai
pas voté pour lui. Le candidat bolchevique l’a emporté, évidemment. Mais après
l’élection, tous ceux qui avaient assisté à cette réunion menchevique ont été
virés. Et puis, la semaine dernière, on nous a tous arrêtés.
    — On ne peut pas faire ça,
protesta Grigori, désespéré. Pas même au nom de la révolution. On ne peut pas
arrêter des ouvriers parce qu’ils cherchent à s’informer des différentes
opinions. »
    Konstantin lui jeta un regard
intrigué. « Tu as été absent un moment ou quoi ?
    — Oui, bien sûr. Je suis
allé me battre contre les armées contre-révolutionnaires.
    — Voilà pourquoi tu ne sais
pas ce qui se passe.
    — Tu veux dire que c’est
déjà arrivé ?
    — Gricha, ça arrive tous les
jours.
    — Je ne te crois pas. »
    Magda intervint : « Et
la nuit dernière, j’ai reçu un message d’une amie qui a épousé un policier.
Elle voulait me prévenir que Konstantin et tous les autres seraient fusillés à
huit heures ce matin. »
    Grigori regarda sa
montre-bracelet de l’armée. Il était presque huit heures. « Pinski ! »
cria-t-il.
    Le policier entra.
    « Il faut empêcher cette
exécution.
    — Je crains qu’il ne soit
trop tard, camarade.
    — Tu veux dire qu’ils ont
déjà été fusillés ?
    — Pas tout à fait. »
Pinski s’approcha de la fenêtre.
    Grigori l’imita. Konstantin et
Magda le rejoignirent.
    En bas, dans la cour enneigée, un
peloton d’exécution s’était rassemblé dans la pâle lumière du matin. En face
des soldats, se tenaient une douzaine d’hommes aux yeux bandés, frissonnant
dans leurs vêtements légers. Un drapeau rouge flottait au-dessus de leurs
têtes.
    Sous les yeux de Grigori, les
soldats épaulèrent leurs fusils.
    Grigori hurla : « Non !
Arrêtez ! Ne tirez pas ! » Mais la vitre étouffa sa voix et
personne ne l’entendit.
    Un tir en rafale éclata presque
aussitôt.
    Les condamnés tombèrent. Grigori
regardait, atterré.
    Autour des corps effondrés, des
taches de sang s’élargirent dans la neige – rouge vif, comme le drapeau
qui flottait dans
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