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La bonne guerre

La bonne guerre

Titel: La bonne guerre
Autoren: Studs Terkell
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à
bout de l’incendie, parce qu’ils voulaient pouvoir examiner les animaux qui
étaient à bord. J’ai lutté contre le feu pendant trois heures. Ensuite, on est
revenus sur une péniche de débarquement qui nous a emmenés à ce qu’ils
appelaient le point de contrôle. Il y avait là un chercheur scientifique qui
nous examinait avec des compteurs Geiger, pour voir si on n’avait pas ramassé
des radiations.
    Est-ce que les chercheurs ont fait des remarques
quelconques ?
    Pas le moins du monde. On ne savait même pas ce qu’ils
faisaient. On n’en avait pas la moindre idée. Ils ne nous l’ont jamais dit. Pendant
ces quelques jours, on a eu le droit de nager, de faire ce qu’on voulait. On
buvait l’eau de mer dessalée à bord du bateau, et on lavait nos vêtements avec.
Quand on est repartis à bord du Sumner, on buvait l’eau du lagon, et on
s’y est baignés. Rien ne nous était interdit. On ne nous a strictement jamais
rien dit.
    À Bikini j’ai fait partie de ceux qui ont décroché les
appareils photos et les caméras des tours où ils étaient installés. C’étaient
des tours d’acier, brûlantes sous le soleil, et je ne savais pas du tout que l’acier
concentrait les radiations comme ça. Pas la moindre idée. D’ailleurs, tout le
temps qu’on a passé là-bas on ne nous a jamais parlé de radiations.
    Le 25 juillet on nous a dit qu’ils allaient faire exploser
une autre bombe. Celle-là était enfouie à trente mètres sous l’eau. On est
repartis vers le Mount MacKinley, et on a recommencé à faire nos ronds
dans l’eau. On a vu la bombe exploser, le code, cette fois, c’était Baker. Elle
était plus importante. Quand cette bombe a éclaté il s’est créé une espèce de
vide autour, on aurait dit un gigantesque champignon qui surgissait de l’océan,
il s’est élevé dans les airs, emportant du sable, de l’eau, et toutes sortes de
débris du fond de l’océan. Puis un énorme nuage s’est formé au-dessus de nos
têtes, et comme on était sous le vent par rapport au nuage, une multitude d’infimes
gouttelettes se sont abattues sur nous. À cause de ça il a fallu entièrement
nous laver.
    Une fois de plus les savants sont venus à bord avec leurs
compteurs Geiger. On ne savait toujours pas ce qu’ils faisaient. Et dix heures
plus tard on se retrouvait au point d’impact. Il commençait à régner une
certaine confusion. Le deuxième jour, des gars qui avaient été pris en train de
se baigner avaient été punis. Pourtant, cette fois-là, on n’avait pas plus de
restrictions qu’avant. On a vraiment passé de bons moments là-bas, on a bien
rigolé. On ne pensait pas qu’il pourrait y avoir des problèmes.
    Vers la fin du mois d’août j’ai découvert sur mes jambes et
sur mes pieds des traces de brûlures rouges de la taille d’une pièce d’un
dollar, j’en avais à peu près cinq ou six. Je suis allé à l’infirmerie, ils m’ont
badigeonné de pommade blanche avec un abaisse-langue, ont mis un morceau de
gaze sur chaque petite plaie, et m’ont ordonné de rester au lit. Puis ça a
disparu. Une semaine plus tard, environ, mes deux jambes et mes deux pieds ont
commencé à enfler. J’ai de nouveau dû rester au lit, et l’enflure a disparu. Mais
ça n’a pas cessé de se reproduire tout le temps que j’ai passé sur le bateau. Je
ne pouvais plus me chausser à cause de l’enflure de mes pieds et de mes jambes.
    On est revenus à Pearl Harbor vers la fin novembre. J’ai été
admis à l’hôpital. Ils ont commencé à me faire des examens, et ils ont conclu
que j’avais des problèmes rénaux. J’ai été transféré en Californie. Nous étions
en 1947. J’ai été libéré pour raisons médicales.
    Ils m’ont dit de retourner chez moi, et que si l’œdème
continuait je devais me surélever les jambes jusqu’à ce qu’il disparaisse. Mais
à chaque fois ça empirait : l’œdème remontait petit à petit. Jusqu’au jour
où, en 76, on m’a admis à l’hôpital militaire.
    En 77, on m’a amputé de la jambe gauche, car les chairs s’ouvraient
en de si nombreux endroits que c’en était devenu extrêmement douloureux. Un
mois après ma sortie j’étais de nouveau hospitalisé parce que ma jambe droite
avait terriblement enflé. En août 77, ma jambe droite n’était plus qu’une plaie
béante du genou à la cheville, et il a fallu l’amputer aussi. Juste avant ma
sortie de l’hôpital, mon bras gauche a commencé à enfler.
    Au
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