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Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain

Titel: Histoire de la décadence et de la chute de l’Empire romain
Autoren: Edward Gibbon
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probable de son existence. Dans le système qu’il
avait choisi, et qui fixait le règne de Sésostris environ vers le temps de
celui de Salomon, une seule objection l’embarrassait ; et la manière dont
il s’en tirait, ingénieuse comme il le dit lui-même pour un jeune homme de cet
âge, est curieuse, en ce qu’elle annonce l’esprit qui devait présider un jour à
la composition historique sur laquelle repose sa réputation. Voici le détail
tel qu’il est rapporté dans ses Mémoires . Dans la version des livres
sacrés , dit-il, le grand-prêtre Manéthon fait une seule et même personne
de Séthosis ou Sésostris, et du frère aîné de Danaüs, qui débarqua en Grèce,
selon les marbres de Paros, quinze cent dix ans avant Jésus-Christ ; mais
selon ma supposition, le grand-prêtre s’est rendu coupable d’une erreur
volontaire. La flatterie est mère du mensonge ; l’histoire d’Égypte de
Manéthon est dédiée à Ptolémée Philadelphe, qui faisait remonter son origine ou
fabuleuse ou illégitime aux rois macédoniens de la race d’Hercule. Danaüs est
un des ancêtres d’Hercule, et la branche aînée ayant manqué, ses descendants,
les Ptolémées, se trouvaient les seuls représentants de la famille royale, et
pouvaient prétendre par droit d’héritage au trône qu’ils occupaient par droit
de conquête . Un flatteur pouvait donc espérer de faire sa cour en
représentant Danaüs, la tige des Ptolémées, comme le frère des rois d’Égypte ;
et dès qu’un mensonge avait pu être utile, Gibbon supposait le mensonge. Le Siècle
de Sésostris fut discontinué, jeté au feu plusieurs années après, et Gibbon
renonça à concilier les antiquités judaïques, égyptiennes et grecques, perdues , 
dit-il, dans un nuage éloigné : mais ce fait, qu’il a conservé, m’a paru
remarquable en ce qu’il me semble y reconnaître déjà l’historien de la
Décadence de l’Empire romain et de l’établissement du Christianisme ; ce
critique qui, toujours armé du doute et de la probabilité, cherchant toujours
dans les passions ou l’intérêt des écrivains qu’il consulte de quoi combattre
ou modifier leur témoignage, n’a presque rien laissé de positif et d’entier
dans les crimes, et dans les vertus dont il a fait le tableau.
    Un esprit si inquisitif , livré à ses propres idées,
ne devait laisser sans examen aucun des objets dignes, d’attirer son
attention ; la même curiosité qui lui donnait le goût des controverses
historiques, l’avait jeté dans les controverses religieuses ; cette indépendance
d’opinions qui nous dispose à la révolte contre l’empire que semble vouloir
prendre sur nous une opinion généralement adoptée, fut peut-être ce qui le
détermina un instant contre la religion de son pays, de ses parents et de ses
maîtres : fier de supposer qu’il avait à lui seul trouvé la vérité, Gibbon à
seize ans se fit catholique. Différentes circonstances avaient amené sa
conversion ; l’ Histoire des Variations des Églises protestantes ,
par Bossuet, l’accomplit entièrement ; et du moins, dit-il, je
succombai sous un noble adversaire . Pour la seule fois de sa vie, entraîné
par un mouvement d’enthousiasme dont le résultat a peut-être contribué à le
dégoûter des mouvements de ce genre, il fit son abjuration à Londres, entre les
mains d’un prêtre catholique, le 8 Juin 1753, étant alors âgé de seize ans, un
mois et douze jours (il était né le 27 avril 1737). Cette abjuration fut faite
en secret dans une des excursions que lui permettait la négligence avec
laquelle il était surveillé à l’université d’Oxford, où on l’avait enfin fait
entrer. Cependant il crut devoir en instruire son père, qui, dans les premiers
mouvements de sa colère, divulgua le fatal secret. Le jeune Gibbon fut renvoyé
d’Oxford, et, bientôt après, éloigné de sa famille, qui le fit partir pour
Lausanne, où l’on espérait que quelques années de pénitence, et les
instructions de M. Pavilliard, ministre protestant entre les mains duquel il
fut remis, le feraient rentrer dans la voie dont il s’était écarté.
    Le genre de punition qu’on avait choisi était bien propre à
produire, sur un caractère tel que celui de Gibbon, l’effet qu’on en attendait.
Dévoué à l’ennui par son ignorance de la langue française, qu’on parlait à
Lausanne, mis à la gêne par la modicité de la pension à laquelle l’avait réduit
le
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