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Histoire De France 1758-1789, Volume 19

Histoire De France 1758-1789, Volume 19

Titel: Histoire De France 1758-1789, Volume 19
Autoren: Jules Michelet
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de rente, leur misère, elle le forçait d'avancer, n'importe comment.
    Le meilleur de leur patrimoine avait été la trahison.Les Choiseul rendirent ici un service immense à l'Autriche. C'est l'un d'eux qui, voyant la tête déménagée de Fleury, décida cet imbécile à retenir le secours qui allait sauver notre armée de Prague. De là l'affreuse catastrophe, l'armée gelée (comme à Moscou). Le fils de ce bon conseiller, tout jeune, le célèbre Choiseul, est en récompense créé colonel. Il fait quelque peu la guerre, mais surtout la chasse aux femmes. C'était un petit doguin, roux et laid, avec une audace cavalière, une impertinence polie, un persiflage habituel, qui le faisait redouter. Il plaisait d'autant plus aux femmes qu'il leur ressemblait davantage. Le grand observateur Quesnay, sous sa surface brillante, le perce à jour. «Il eût été, dit-il, un ami d'Henri III.» ( Hausset .)
    La place de méchant était vacante: il la prend. Il veut qu'on croie qu'il est le Méchant de Gresset. Il veut continuer Maurepas, spécule sur les petites flèches qu'il lance à la Pompadour. Spéculation bien calculée avec une femme fanée, qui a peur du moindre mot. Il l'inquiète, puis tout à coup la charme en se donnant à elle, trahissant une Choiseul qui visait au Roi. La Pompadour le paye avec un riche mariage. Elle lui fit épouser la petite Crozat Duchâtel, fort riche. Mais on ne lui mit pas cette fortune dans les mains. Il n'en eut que la jouissance. Si sa femme (enfant de douze ans) mourait, ou si les parents la reprenaient, il était pauvre.
    C'était en 1750, à l'avènement de Mesdames Henriette et Adélaïde. Choiseul crut ne pas déplaire en disant venir de Lorraine, en établissant chez lui sasœur, qui était chanoinesse. Elle avait vingt ans, lui trente. C'était une grande forte personne, d'une voix désagréable, d'un visage fort coloré, percé de petits trous ardents. L'enfant de douze ans, l'épouse nominale, ne les gêna guère. Choiseul à côté mit sa sœur, et vécut avec elle fort publiquement ( Lauzun , p. 9, éd. 1858; Dumouriez , I, 159).
    Le roi n'en était pas fâché, en riait. Après un sermon, il lui dit: «Le Père, ce me semble, a jeté des pierres dans votre jardin...—Mais, Sire, n'en est-il pas tombé au parc de V. M.?—Vous serez damné, Choiseul (dit le roi en souriant).—Mais vous, Sire?—Oh! c'est différent... Moi, je suis l'Oint du Seigneur.» ( Mss. Choiseul , Al. de S. Priest ).
    L'inceste étant moins à la mode en 1759, Choiseul maria sa sœur, mais il ne lui donna qu'un mari nominal, M. de Grammont, un interdit. Elle resta constamment avec son frère, au désespoir de la pauvre petite madame de Choiseul, qui alors avait dix sept ans. Il ne faisait rien sans sa sœur. Et je doute fort que, sans elle, il eût pris la responsabilité de se poser contre la paix, au moment où Louis XV désirait négocier, au moment où Marie-Thérèse était lasse, ne recevant plus notre argent, mais des coups terribles de Prusse qui même après un succès la mirent en pleine retraite. Ce n'est pas seulement Duclos qui nous le dit; c'est le bon sens: oui, chacun désirait la paix.
    Bernis à Marie-Thérèse montrait la France agonisante. Qu'à ce moment quelqu'un soit plus autrichien que l'Autriche, la raffermisse dans la guerre, lui dise que Bernis s'est trompé, que la France a encore dusang!... C'est chose énorme, au delà du caractère de Choiseul. Sans sa sœur et ses Lorraines qui le poussaient par derrière, et poussaient la Pompadour, je ne crois pas qu'il eût lui-même franchi ce sanglant Rubicon.
    L'audace de présenter l'impudent traité au roi implique que Louis XV était encore plus absent de lui-même, plus étranger aux affaires, en décembre 1758, qu'il ne l'était l'autre année en septembre 1757 au traité de Babiole.
    Il eut cette année le mal que Richelieu venait d'avoir, des dartres par tout le corps.
    Il vivait d'une cuisine excitante et irritante, pour faire face à l'exigence non moins irritante et malsaine du Parc-aux-Cerfs. De là un cerveau flottant, faible, plein de noires visions. Damiens y rôdait toujours, et la mort, et le successeur, les théories régicides des Jésuites, amis de son fils. Choiseul tirait cette ficelle, l'excitait contre le Dauphin.
    Choiseul, qui ne croyait à rien, profitait des lueurs dévotes qu'avait le Roi dans ses heures d'épuisement. Quelle expiation meilleure que d'accabler Frédéric? Quoi de plus agréable à
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