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Fiora et le Pape

Fiora et le Pape

Titel: Fiora et le Pape
Autoren: Juliette Benzoni
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qu’il en reste encore beaucoup ? Je ne crois
pas que l’on ait eu le temps d’en fondre de neuves ?
    Le
frère leva sur lui un regard stupéfait :
    – Vous
allez, dans un moment, paraître devant Dieu, mon frère ! Ne croyez-vous
pas qu’il serait convenable d’avoir d’autres pensées ?
    – Je
vais quitter la terre. Laissez-moi m’y intéresser encore un peu ! Alors,
ces cloches ?
    – On
a surtout pris celles des villages. Ici, les églises en ont donné aussi, mais
les moins belles. Certaines sont de véritables œuvres d’art, avec des voix
divines. C’eût été un sacrilège d’en faire des bouches à feu.
    – Les
humbles cloches des villages avaient autant de valeur pour tous ces paysans
dont elles comptaient les heures. Ne rougissez pas, mon frère ! Là où il
est... où je vais le rejoindre dans un moment, le duc Charles n’a plus que
faire des mesquineries des hommes.
    – Croyez-vous
être vraiment en mesure de juger, à cette heure ? Oubliez ce que vous avez
été pour songer à n’être qu’un homme parmi les hommes, qui a offensé Dieu.
    – Je
lui en demanderai pardon dans un moment. Plus un mot à présent, mon frère :
nous arrivons !
    Philippe
éprouvait une sensation bizarre. Il venait de quitter le cachot où Marie de
Brévailles avait souffert les douleurs de l’enfantement ; à présent, il s’en
allait vers la mort dans un vieux tombereau, peut-être celui-là même du dernier
voyage des jeunes amants incestueux, et il se sentait tout à coup proche d’eux
comme il ne l’avait jamais été. Ce frémissement léger, sur son épaule, était-ce
la douce main de sa jeune belle-mère ? Ce chuchotement qui arrivait à son
oreille, était-ce la voix de Jean qui, jadis, alors qu’il n’était lui-même qu’un
page turbulent, savait si bien le ramener dans le droit chemin et lui éviter
les sévères corrections du chambellan ducal ? Nullement superstitieux et
peu enclin à s’interroger sur les mystères de l’au-delà, le condamné se sentait
pourtant enveloppé d’une sorte de bien-être, environné par quelque chose de
chaleureux qui n’avait rien à voir avec l’ardeur du soleil, mais qui
réconfortait son âme et soutenait son courage. Et ce fut tout naturellement qu’il
murmura :
    – Veillez
sur eux, je vous en prie ! Sur ma femme et sur mon enfant. Ils vont en
avoir besoin. Moi, dans un moment, je vous aurai rejoints...
    – Que
dites-vous, mon frère ? s’enquit le moine.
    – Rien.
Je priais.
     
    Comme
de coutume lors d’une exécution capitale, la place du Morimont était noire de
monde. La ville entière s’y entassait, serrée au point qu’il était impossible
de distinguer un visage. Il y en avait sur les toits et dans les arbres et, sur
cette mer humaine, l’échafaud tendu de noir ressemblait à un radeau voguant
vers la haute tribune, sur laquelle avaient pris place La Trémoille, ses
officiers et quelques échevins dont les robes rouges s’accordaient étrangement
à la vêture de l’homme en cagoule debout près du billot, appuyé des deux mains
sur une longue épée à large lame.
    A l’arrivée
du tombereau, la foule fit silence. L’aspect du condamné et sa fierté lui en
imposaient. On savait qu’il appartenait à l’une des plus nobles familles de
Bourgogne, qu’il était chevalier de la Toison d’or et qu’il avait été l’ami du
Téméraire. En outre, il était beau, et nombreux furent les yeux de femmes qui
se mouillèrent. Pour les hommes, il était l’image d’un passé superbe et
fastueux dont beaucoup ne voulaient plus, peut-être parce qu’il les avait
conduits aux abords de la ruine, mais qui demeurait prestigieux. Les chaperons,
les bonnets quittèrent les têtes tandis que les femmes se signaient.
    Le
lugubre équipage avançait lentement en fendant la multitude que les
hallebardiers ouvraient devant lui. Et, soudain, il y eut un remous. Un homme
vêtu de noir et brandissant une épée venait de bondir sur l’échafaud et hurlait :
    – Peuple
de Bourgogne, es-tu donc devenu assez lâche et assez veule pour laisser égorger
sans broncher les meilleurs des tiens ? Cet homme n’a commis aucun crime.
Il a seulement voulu que notre vieille terre demeure indépendante. Il a voulu
qu’elle reste fidèle à sa duchesse, Madame Marie, qui seule a droit de régner
ici et non les hommes du roi de France... Peuple de Bourgogne, tu étais fier et
brave, jadis, mais à présent tu ressembles à un
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