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Fidel Castro une vie

Fidel Castro une vie

Titel: Fidel Castro une vie
Autoren: Jean-Pierre Clerc
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à leur caractère d’Espagnols. Le garçon rayonne devant l’objectif du photographe, au milieu de ses camarades, dans l’uniforme de Dolores : pantalons blancs, veste bleue, cravate.
    Fidel était déjà, depuis Birán, un bon nageur et un passionné d’escalade. Ces qualités lui serviront plus tard. Le jeune Castro brille moins dans des activités collectives comme le foot. Enbase-ball, qui est le sport le plus populaire à Cuba, il a, selon l’Américain Lee Lockwood, « un bon contrôle » comme lanceur, mais « guère d’étoffe ». C’est un de ses regrets. Il sera un bon joueur de volley, avec son quasi-mètre quatre-vingt-dix ; et plus encore il brillera au basket : un sport qui, « requérant sens tactique, vision stratégique, rapidité et agilité, prépare très bien à la guérilla ».
    L’été 1939, au lieu de prendre des vacances, Fidel reste à Santiago et suit des cours particuliers avec une enseignante « de qualité ». L’objectif est de mettre les bouchées doubles pour réussir à bifurquer du « primaire supérieur » au secondaire général. Détail souligné par Fidel : cette enseignante était noire. Le trait retient d’autant plus l’attention que sa première institutrice à Birán était, dit-il, « métisse ». Ainsi le futur chef a-t-il eu la chance, selon lui, de boire
aussi
à la mamelle culturelle de « l’autre race » insulaire. Sa marraine était d’ailleurs, elle aussi, métisse, a-t-il affirmé, et son parrain, son époux, n’était-il pas, lui, « haïtien » ?
    Plusieurs aspects des établissements jésuites – Dolores de Santiago puis, à partir de 1941, Belén de La Havane – déplairont à Castro : outre le dogmatisme de l’enseignement religieux, une certaine discrimination sociale. Bien que les droits d’inscription fussent, tout compte fait, assez bon marché, « il fallait pour aller dans ces collèges appartenir à une classe relativement riche » assurera-t-il à
Frei
Betto. À l’intérieur même de cette couche privilégiée, le garçon sent une distinction entre « ceux qui appartenaient à la moyenne bourgeoisie et les fils de la haute bourgeoisie ». Chez ces derniers se « notait un certain esprit aristocratique de supériorité ».
    C’est là une des sources de la construction de la personnalité de Fidel. Voici donc un jeune homme non dépourvu de qualités intellectuelles, doté d’énergie et nullement compté parmi les damnés de la terre ; et pourtant certains le snobent ! Il pourrait leur « casser la gueule », il en a la force ; mais le milieu ne le permet pas. Quelque chose, à Birán, peut lui avoir évoqué cette discrimination : d’évidence, sa famille tient le haut du pavé parmi la masse des petits paysans et ouvriers agricoles. Mais trois
latifundios
nord-américains, cent fois plus étendus que Manacas, encerclent le domaine paternel ; et on peut faireconfiance aux Yankee
s
: il n’était certainement pas question pour eux de faire ami-ami avec le fermier du coin.
    Alors le jeune Castro se replie dans ce qu’il nomme « sa dignité personnelle », secrètement blessée. Son orgueil – qui est immense, parce qu’il a conscience de ses qualités – lui facilitera cette opération alchimique interne ; ce « et, d’abord, je m’en fous » que connaissent bien les psychologues. C’est un état d’esprit qui peut conduire soit à un renfermement involutif, soit à une hyper affirmation de l’ego. Et, de fait, des camarades de lycée de Fidel se remémorent des phases de repli dépressif suivies d’éclats violents. Fidel a d’autant plus aisément privilégié,
in fine
, l’extraversion du moi qu’il est, dans certains domaines, en mesure de faire reconnaître sa supériorité : pour l’essentiel dans les disciplines sportives, où il pulvérise ses camarades aristocrates ou bourgeois. Il a été, en 1944, dans le collège Belén de La Havane qui accueille selon son expression « la crème de la crème » de l’île, consacré « meilleur athlète lycéen de Cuba » : première reconnaissance d’une excellence nationale.
    En courant plus vite, en nageant mieux, en étant meilleur au basket, le jeune homme se conforte dans le sentiment de sa supériorité, dans ce besoin de devenir puis de rester le premier qui l’accompagnera toute sa vie.
    Son sens et son goût de la nature, acquis à Birán, sont un autre atout face aux gosses de riches des villes. Car les jésuites, pour favoriser la formation du
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