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Dans l'ombre de la reine

Dans l'ombre de la reine

Titel: Dans l'ombre de la reine
Autoren: Fiona Buckley
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vu juste, mais elle s’était méprise en incriminant son mari.
    — À la fin, Forster recula. Il déclara qu’il se bornerait à laisser le champ libre. Toute l’entreprise faillit échouer.
    Lady Catherine se concentrait sur le fil des événements, presque au point d’oublier qu’elle se livrait à une confession. Tant de bêtise me laissait pantoise. Elle déplorait encore que Forster leur eût accordé une aide aussi dérisoire !
    — Parce qu’il n’était pas disposé à se salir les mains en tordant le cou de Lady Dudley.
    — Pourquoi faut-il que vous présentiez les choses d’une façon aussi odieuse ?
    — Parce qu’elles le sont. Je me réjouis que Forster possède encore une once de conscience ! Peut-être le fait d’être le régisseur de Dudley l’a-t-il refréné un tant soit peu !
    Lady Catherine me regarda comme si je lui avais assené un coup de pied et dit sur un ton maussade :
    — Nous avons eu d’interminables soucis avec Forster. Plus tard, il a exigé un contrat, une promesse de paiement écrite portant nos trois signatures. Et cela, rien que pour nous faciliter la tâche !
    — Et je sais qu’il a eu son contrat.
    — C’est impossible ! répliqua-t-elle, le front plissé, en me dévisageant. Comment l’auriez-vous appris ?
    — Vous en seriez étonnée. Donc, Forster refusait de se salir les mains. Que s’est-il passé ensuite ?
    — Sir Thomas et Derby tentèrent de convaincre Verney de s’en charger, mais il se montrait réticent. En dépit de l’argent et de l’effacement de ses dettes, il refusait d’agir seul.
    — Quel terrible ennui !
    — Ils se demandaient encore que faire, quand je lançai ma petite plaisanterie. Je mentionnai Holme, qui faisait tout ce que je lui demandais, et Derby me suggéra de lui demander d’aider Verney. Sir Thomas s’opposait à ce que je me mêle de cette affaire, au début. Il n’a pas une très haute opinion des femmes.
    Je jugeai possible qu’il n’eût simplement pas une très haute opinion d’elle.
    — Et vous débattiez de tout cela dans l’antichambre ? Au milieu de tant d’oreilles indiscrètes ?
    — Non. Une fois que… chacun d’entre nous comprit que les autres étaient sérieux, Derby proposa que nous nous retrouvions dans le jardin clos. Sir Thomas objecta, mais Derby passa outre. J’étais assez effrayée, me confia-t-elle comme si elle s’attendait à de la compassion, mais j’y allai tout de même et Sir Thomas dit que c’était d’accord pour Holme. Quelques jours plus tard, pendant que nous accompagnions la reine à sa promenade dans le parc, je pus leur confirmer qu’Holme acceptait.
    — Pas un instant ils n’ont envisagé de le faire eux-mêmes, à ce que je vois !
    — Impossible, répliqua Lady Catherine, dédaigneuse. Ils sont connus et ne pouvaient courir le risque d’être aperçus dans la région au moment crucial. En outre… Enfin, pour Derby, je ne suis pas sûre, mais Sir Thomas avait dit, à ce rendez-vous dans le jardin clos, que lui n’aurait jamais pu commettre un tel acte ; il avait même été tenté de renoncer. Il ne s’était ravisé qu’au retour de Sir William Cecil, en voyant que la reine s’intéressait à peine à sa mission en Écosse car elle n’avait que Dudley en tête. Sir Thomas a su alors que nous devrions aller jusqu’au bout, car la simple loyauté envers la reine l’exigeait.
    — Miséricorde ! dis-je à mi-voix.
    — L’association entre Verney et Holme était idéale. Verney, travaillant pour Dudley, pouvait se rendre à Cumnor à sa guise, et Holme passait pour son valet. Ils y sont allés deux fois pour mettre au point les détails pratiques avec Forster.
    Je restais debout, inébranlable aux yeux de Lady Catherine, alors que j’aurais voulu m’effondrer et enfouir ma tête entre mes bras. La cour, que j’avais trouvée si palpitante, où je m’étais sentie chez moi, m’apparaissait soudain tel l’antre du mal, peuplé de traîtres qui ourdissaient leur toile et appâtaient les autres à l’aide de beaux mensonges sur l’intérêt du royaume, la loyauté, la délivrance charitable d’une pauvre malade.
    Ces gens dansaient et dînaient, riaient et jouaient de la musique, formaient des alliances sanglantes et nourrissaient des haines intenses, au point que si le hasard voulait qu’elles haïssent la même personne, le fait que leurs raisons fussent différentes, voire opposées, ne les empêchait pas de
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