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Cathares

Cathares

Titel: Cathares
Autoren: Patrick Weber
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cherchait-elle ? La réaction (somme toute légitime) de Joyeux l’avait dissuadé de revenir sur le sujet avec son ami. Mais celui-ci n’était pas aveugle et encore moins idiot. Il avait compris que la raison du changement de comportement de Le Bihan était liée à l’incroyable fable qu’il lui avait racontée. Pour autant, il préférait ne pas l’importuner en se disant que cette idée fixe finirait bien par lui passer, comme tant d’autres avant elle.
    Ce jour-là, Le Bihan avait mis un peu plus de coeur à l’ouvrage. Le moment était venu d’aborder avec ses élèves l’épisode de la conquête de l’Angleterre et de l’épopée du duc Guillaume à travers la tapisserie de Bayeux. Les événements qu’il avait vécus pendant la guerre et qui l’avaient conduit à étudier de très près le précieux document lui donnaient toujours envie de partager sa passion avec les jeunes. Bien sûr, tous n’étaient pas passionnés par le sujet, mais il se disait que s’il réussissait à en intéresser un ou deux, il n’avait pas tout à fait perdu son temps. Plus que toute autre chose, il aimait partager la connaissance de sa région et la curiosité de son histoire. Malgré les origines bretonnes de sa famille, Le Bihan était devenu plus normand qu’une bolée de cidre fermier et il était d’avis que, dans une nation aussi jacobine que la France, il était temps de se replonger dans les racines des terroirs et des régions.
    Le cru 1952 paraissait être une bonne année. Ce matin-là, les questions des élèves avaient fusé. Tout semblait les intéresser : la mort du roi Édouard, la trahison d’Harold, l’expédition du duc de Normandie, la bataille d’Hastings, l’établissement des Vikings en terre normande, la mort de Guillaume... Le Bihan n’en attendait pas tant. Il était tellement – et heureusement – surpris qu’il s’engagea à organiser une visite de la tapisserie avec la classe. Et tant pis pour le proviseur qui jugeait inutile de sortir des quatre murs du collège pour aller découvrir les sujets d’étude dans leur contexte. Le Bihan développait des théories aussi personnelles que modernes sur la transmission du savoir et il était convaincu de leur pertinence.
    Quand il rentra chez lui, il était donc d’excellente humeur. Il fit un détour par la boulangerie et s’offrit son péché mignon à déguster le lendemain matin pour le petit déjeuner. Il s’agissait d’une de ces inimitables tartes aux pommes qui, à ses yeux, participaient de l’identité normande au moins autant que l’expédition de Guillaume et la tapisserie de la reine Mathilde. Il poussa la porte de la vieille maison de la rue du Gros-Horloge et s’engagea dans l’escalier.
    — Monsieur Pierre !
    Seule l’immuable Madame Roché l’appelait de cette manière. Toujours fidèle au poste, tapie derrière la première porte à gauche dans le couloir, rien n’échappait à son talent d’observatrice avisée de la vie de l’immeuble. Elle devait tenir une comptabilité précise des jeunes femmes qui avaient passé le pas de cette porte pour gravir les cinquante-sept marches qui les conduisaient à l’appartement du démon. Bigote et fière de l’être, Madame Roché réprouvait les moeurs modernes et estimait qu’il était de son devoir de bonne chrétienne de témoigner à la face du monde (ou à tout le moins à celle de son confesseur) des turpitudes dont elle était le témoin bien involontaire. Mais aujourd’hui, rien ne pouvait atteindre Le Bihan. Il se dit en lui-même que si les Saxons avaient pu compter sur une pareille vigie, ils auraient probablement repoussé sans le moindre problème l’invasion normande à Hastings.
    — Monsieur Pierre, poursuivit-elle en bondissant hors de sa loge. On m’a porté un pli pour vous. Enfin, devrais-je dire, on a déposé ce pli à votre intention devant la porte. Sans timbre et sans nom d’expéditeur. Vous me connaissez, je suis plutôt d’un naturel assez prudent alors je me suis méfiée ! On entend tellement de choses terribles de nos jours. Et puis, il y a toujours beaucoup de passage chez vous.
    — Merci, Madame Roché, tenta de couper Le Bihan qui sentait que le bénéfice de cette belle journée était sur le point d’être entamé. Je vais le prendre.
    — Bien sûr, cela ne me regarde pas ce qu’il contient, mais si vous pouviez dire à votre expéditeur que cela ne se fait pas de poser un colis devant la porte d’un
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