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Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977

Titel: Cahiers secrets de la Ve République: 1965-1977
Autoren: Michèle Cotta
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l’aurait-il condamnée ? Il va attendre que l’affaire capote, donner en ce sens un petit coup de main, éventuellement, mais il n’a pas voulu prendre le risque de se découvrir.

    22 juin
    En gros, c’est ce qu’il a fait. Et avec lui tous ceux qui, au MRP, dans les clubs et au Parti radical, ne souhaitaient pas une fédération dans laquelle chacun de leurs mouvements aurait eu vocation à se dissoudre.
    Il avait fallu deux nuits de négociations, le 15 et le 17, la première chez Jacques Duhamel, député du Jura, avenue Raymond-Poincaré, la seconde chez Pierre Abelin, président du groupe du Centre démocratique à l’Assemblée nationale, 22 place Malesherbes, pour que les participants, socialistes (toutes tendances confondues), radicaux et démocrates – dont Maurice Faure, Jacques Duhamel et François Mitterrand –, républicains populaires, sans oublier le comité Horizon 80, tentent de faire « prendre corps » à la pauvre fédération.
    Le 15, on avait frôlé d’emblée la rupture, à en juger par le ton sec avec lequel Guy Mollet s’était adressé à Gaston Defferre, mais, tant bien que mal, la réunion s’était prolongée dans l’incertitude.
    Au petit matin du 18, après la deuxième nuit de négociations, les dix-sept participants, barbus, épuisés par neuf heures de discussions, d’accrochages, de règlements de comptes, se retrouvent sur le trottoir de la place Malesherbes. En réalité, tout a fait problème. Lorsque Gaston Defferre a soumis sa charte élaborée avec Pierre Abelin, Jacques Duhamel et Olivier Chevrillon 2 , pas un point qui n’ait fait l’objet d’oppositions irréductibles : rapports avec le Parti communiste, laïcité, nom même à donner au mouvement qui allait naître... Guy Mollet n’a rien concédé, rien ouvert en direction du centre ; et Gaston Defferre n’a pas été à la hauteur. Il fallait qu’il attaque, qu’il convainque, qu’il mobilise. Démoralisé, comme en retrait par rapport à lui-même, semblant douter de lui-même autant, sinon plus, que des autres, il a laissé se dérouler le scénario de sa propre défaite.
    Les quelques lignes remises aux journalistes à 4 heures du matin signent l’acte de décès prématuré de la grande fédération : « Les représentants des partis politiques ont dû constater qu’ils n’avaient pas pu parvenir à un accord assez large pour réaliser une formation politique unitaire. »
    Aujourd’hui, Jean Lecanuet 3 et Joseph Fontanet 4 , qui n’ont pas du tout été sur la même longueur d’onde pendant les deux nuits du 15 et du 17, tirent, au siège du MRP, rue de Poissy, les leçons de l’échec du 18 juin. Leur position est claire : Gaston Defferre n’était pas suivi par la SFIO. Il a été torpillé par Guy Mollet. Il n’y a pas de fédération possible avec lui. Ils la tenteront donc avec d’autres, sans la SFIO, et chercheront l’alliance avec les radicaux et les indépendants. La voie est fermée à gauche. Ils prendront à droite.

    25 juin
    Écœuré, Gaston Defferre a retiré sa candidature aujourd’hui. Je suis sûre qu’il est soulagé, tant il en avait assez de la pression qu’exerçaient sur lui Jean-Jacques Servan-Schreiber et tous ceux quicroyaient en lui. L’enjeu était trop élevé. Il ne s’est pas réellement battu. Ou pas assez.

    Juillet
    Vacances moroses. À Cadaquès où je rejoins Jean-Jacques Servan-Schreiber et Olivier Chevrillon, c’est la tristesse. Guy Mollet vient de faire adopter par le conseil national de la SFIO une motion finale, votée par 2 028 voix contre 881, qui affirme : « Le parti n’est pas prêt à se sacrifier au profit d’un rassemblement étranger au socialisme. »
    D’une phrase, Mollet a dit tout haut ce qu’il pense depuis des mois : « Il faut empêcher que, du dehors, on essaie de recommencer un travail de démolition morale. »
    « Du dehors » : les mots visent évidemment Jean-Jacques. Ce qui choque J-J S-S, c’est que Gaston Defferre, présent au conseil national, n’ait pas dit grand-chose. Il s’est contenté de reprocher à Guy Mollet, la semaine précédente, de ne pas avoir été fidèle au mandat du congrès de Clichy. Mais, après, pas un mot.
    Jean-Jacques s’interroge sur son avenir. La seule chose qui l’intéresse, c’est la prise du pouvoir politique. Il a L’Express . Cela ne lui suffit plus. C’est la première fois que je l’entends douter de lui-même. Ou plus exactement du
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