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Byzance

Byzance

Titel: Byzance
Autoren: Michael Ennis
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descendit le sentier dallé de pierres jusqu’aux cellules nues et vides. Le plâtre commençait à tomber par plaques ; ici et là des mauvaises herbes écartaient les rangs de brique. Le vent soufflait du nord ; dans les bois derrière le couvent vide, les feuilles bruissaient. Les portes de bois des cellules pourrissaient et le père abbé se garda de les ouvrir.
    « Je suis certain qu’Eudoxie née dans la pourpre a résidé ici, songea-t-il. Quant aux rumeurs sur la naissance d’un enfant, je suis également certain qu’elles étaient fondées, et j’espère que frère Siméon m’en apportera la preuve. Mais cela ne suffira pas pour sauver notre monastère. Ce que frère Siméon doit découvrir, ce sont les noms. Qui était le père ? Et surtout, surtout, où est l’enfant ? »
    Le vent soufflait par bouffées et balayait les feuilles contre les portes des cellules. Le père Katalakon se tourna vers le nord, vers la puissante Constantinople, invisible mais cependant présente. Il frissonna. Le premier pas était franchi, et il devait bien reconnaître à présent que l’enjeu n’était pas seulement le destin du saint établissement de Prote. S’il réussissait à retrouver cet enfant, le sort de l’empire serait entre ses mains.

Première partie

Kiev, pays de Rus.
1034 apr. J.-C.
    —  Je suis condamnée à passer ma vie derrière des fenêtres ! soupira Elisevett, en essayant de paraître aussi blasée qu’il était possible pour une jeune vierge de quinze ans.
    Elle s’installa sur le coussin brodé qu’elle avait placé dans le recoin de la fenêtre ; sa robe de soie écarlate luisait à la lueur diffuse des chandelles de la croisée voisine. Elle appuya son nez droit contre le verre et plongea son regard dans la nuit, au-delà des contours sombres des dômes et des chapiteaux du palais, vers les hauteurs couronnées de pins de la citadelle de Kiev. Le Dniepr semblait un fleuve d’encre strié d’or – des centaines de torches s’y reflétaient depuis les rives sableuses. Le bruit des marteaux dans les chantiers de bateaux et les ordres lancés aux portefaix formaient un murmure lointain, assourdi. Si seulement elle était marchand de fourrures ou batelier sur un des strug , se dit-elle, ou même une de ces puantes esclaves torkes, elle pourrait descendre ce fleuve… Mais bien entendu, la princesse de Rus ne serait jamais autorisée à le faire. Non. Elle passerait sa vie dans des térem et des églises, d’abord à attendre le bon plaisir de son père, puis le bon plaisir de l’homme qu’il lui choisirait pour époux. Elisevett songea à sa mère, desséchée comme un arbre vidé de sa sève ! Elle aurait le même destin : elle regarderait par des fenêtres pendant que la vie se déroulerait au-dehors.
    Mais cette nuit même, elle échapperait à son destin. Cette nuit même elle s’en irait, partirait à jamais, ici, dans la cathédrale où on l’avait si souvent exhibée, parée de bijoux et de soieries comme une petite poupée devant tous les miouji et les gens du monde entier qui la couvaient de leurs regards béats. Non, cette nuit tout serait différent : elle allait tuer la petite poupée.
    — Viens ici, dit-elle. On peut voir les lumières près du fleuve… Viens, répéta-t-elle en se retournant.
    Haraldr lança un regard en arrière vers l’entrée voussurée du minuscule débarras, au troisième étage de l’église de la Dîme, et pria que le bâtiment soit réellement vide. Il se glissa gauchement sur le siège de la fenêtre. Jamais il ne s’était trouvé aussi près d’elle. Elle avait ses cheveux blonds tirés en arrière et coiffés en rouleaux serrés de chaque côté de la tête, à la manière grecque.
    Il sentit son parfum d’eau de rose et l’entendit respirer. Il essaya d’emplir d’air ses poumons noués, incapable d’imaginer ce qui se produirait en lui s’il la touchait.
    — Regarde-les.
    Haraldr suivit des yeux les taches de lumière qui virevoltaient comme des vers luisants. Des ouvriers se déplaçaient entre les proues des bateaux échoués sur la berge. Les forêts sombres au-delà de la rive gauche du Dniepr s’étendaient jusqu’à un horizon irréel bordé d’orange – le halo de mille feux de camp. Haraldr frissonna : les Petchenègues étaient en campagne.
    — Le jarl Rognvald a dit à mon père que tu n’allais pas descendre le fleuve avec lui. Mon père n’était pas content du tout. Pourquoi
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