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Borgia

Titel: Borgia
Autoren: Michel Zévaco
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rêve !… Et, comme en un rêve, elle saisit cette tête dans ses deux mains, et doucement, longuement, déposa sur le front un baiser où palpita tout son amour !…

LXXV – LES DERNIÈRES PAROLES DE ROSA VANOZZO
 
    L’abbé Angelo s’était enfui, délirant de joie, au moment où la Maga s’était écriée, s’adressant au pape :
    – Ce prêtre ne mourra pas ! C’est toi, Rodrigue, qui vas mourir ! Car tu as bu dans la coupe d’argent… la coupe empoisonnée !…
    Angelo ne se demanda pas ce qui venait d’arriver. Il ne chercha pas à le savoir. Il n’avait qu’une idée : fuir !
    Soudain, il se heurta à une porte fermée. Alors il se vit enveloppé de fumées noires…
    Il essaya d’ouvrir la porte… Il s’aperçut avec terreur que cette porte était fermée du dehors. Il reprit en courant le chemin qu’il venait de parcourir. Il fallait absolument passer par le couloir où se trouvait l’appartement du pape… L’abbé, terrorisé, se précipita de ce côté… Il vit une chambre ouverte et s’y jeta…
    Une femme, debout, contre un judas percé dans le mur, regardait un spectacle qui l’hypnotisait sans doute… car elle n’entendit pas Angelo… elle n’entendait pas les ronflements de l’incendie… Cette femme, c’était Lucrèce.
    L’abbé la contempla un instant… il devait tout redouter de Lucrèce, après avoir été son complice… l’occasion était bonne… un coup de poignard par derrière. Il chercha l’arme qu’il portait toujours sous son vêtement et fit un pas. À ce moment, Lucrèce se mit à reculer lentement, ses yeux pleins d’horreur toujours fixés sur le judas dont elle ne semblait pouvoir détacher son regard. L’abbé Angelo l’entendit balbutier :
    –  C’était ma mère !… J’ai aidé ma mère à empoisonner mon père !…
    L’abbé, qui s’était immobilisé au premier mouvement qu’elle avait fait, s’avança alors vers elle. Son coup manqué, il ne songeait plus qu’à l’incendie.
    – Madame, dit-il, le château brûle… il faut fuir !…
    – Le château brûle ! fit Lucrèce comme si elle se réveillait d’un cauchemar pour retomber dans un autre.
    Elle éclata de rire et s’élança, suivie de l’abbé Angelo. La pièce où elle entra donnait sur la cour du château. Elle ouvrit la fenêtre pour voir ce qui se passait… La vision de Ragastens emportant Primevère dans ses bras lui fit pousser un hurlement de rage et de folie…
    Ragastens disparut sous la grande porte du château.
    Alors, écumante, elle se retourna et se rua vers la chambre de Béatrix…
    Elle vit César étendu, immobile dans une mare de sang… Alors, elle voulut s’élancer au-dehors… Soudain, le feu qui entoura Angelo – il devait en mourir – lécha la porte de la chambre.
    Rugissante, Lucrèce se mit à tourner dans la chambre comme une tigresse prise au piège. Un mouvement soudain de César la fit s’arrêter.
    – Il vit ! murmura-t-elle. Il vit ! Mais pour mourir dans le feu !… »
    Tout à coup, elle poussa un cri.
    – La trappe ! Tout n’est pas fini.
    Elle saisit César par les pieds, le traîna dans un angle de la pièce. Alors, de la main, elle tâta le mur…
    Le bruit sec d’un ressort se fit entendre… le plancher s’enfonça… tout le carré de l’angle, où Lucrèce avait traîné son frère se mit à descendre, tous les deux disparurent.
    Le château était plein de ces trappes et de ces judas. La trappe sur laquelle Lucrèce venait de se placer la descendit en quelques secondes dans les caves. Arrivée là, elle laissa son frère étendu sur le sable… Deux minutes plus tard, avec une trentaine de gardes, elle se jetait à la poursuite de Ragastens !… On a vu qu’elle arriva trop tard !…
    D’un geste farouche, Lucrèce renvoya alors ses gardes. Accroupie sur une roche, elle vit le canot accoster la Stella. Alors un sanglot de rage lui échappa…
    Lucrèce, alors, se releva et, hagarde, jeta autour d’elle un regard de démence…
    – Qui vient ? gronda-t-elle.
    Ce qui venait, ce que Lucrèce venait de voir, c’était une ombre que les rochers abritaient contre la grande lueur de l’incendie, et qui s’avançait vers la mer…
    – Ma mère ! bégaya-t-elle ! Ma mère !…
    Rosa Vanozzo passa sans la voir.
    Rosa Vanozzo descendait, descendait toujours… Elle atteignit le sable du rivage, et continua à marcher vers la mer, les bras tendus…
     
    Au moment où Rosa Vanozzo,
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