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Avec Eux...

Avec Eux...

Titel: Avec Eux...
Autoren: Dominique Cantien
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Je suis souvent retournée dans les mêmes pays, les mêmes lieux, que ceux où j’étais allée avec Nicolas pour des tournages de télévision, mais évidemment pas de la même manière. Là où nous étions passés en 4 × 4, dans la poussière des pistes, nous roulions cette fois dans des voitures officielles, le plus souvent blindées et munies d’un gyrophare, des officiers de sécurité précédaient ces véhicules. Ce n’étaient plus des lions ou des hippopotames que j’allais rencontrer, mais des ministres des Affaires étrangères, voire des chefs d’État dans différents pays du monde. Et franchement, le parallèle avec ma vie précédente était particulièrement décalé…
    Â 
    J’ai toujours été à la fois l’auteur et la spectatrice de ma propre existence. Combien de fois m’est-il arrivé de me retrouver dans un dîner officiel au côté d’un grand de ce monde, et de me poser intérieurement cette question existentielle : « Qui suis-je pour être là ? » En fait, je n’ai jamais vraiment répondu à toutes ces questions. Ma vie m’a emportée dans un tourbillon d’histoires paradoxales, sans que j’aie eu à demander quoi que ce soit. La vie m’a fait des signes en permanence. Je me suis toujours dit qu’il fallait que je sois à la hauteur des rôles ou des fonctions qu’il m’était donné d’exercer, et je les ai exercés le mieux possible, à quelques erreurs près, bien sûr, mais ces erreurs m’ont enrichie comme souvent les faux pas font grandir.
    Â 
    Attention, ce ne fut pas non plus un long fleuve tranquille. D’un bout à l’autre du monde en France, en Asie ou en Roumanie, je suis aussi passée par des moments tragiques, voire insupportables… En Roumanie, par exemple, j’ai vécu l’horreur quand j’ai découvert qu’on effectuait des tests de recherche sur le sida sur des bébés, abandonnés à un étage oublié d’un Kamin Spittal (un orphelinat). Ma plus grande victoire est d’avoir pu faire diffuser des images sur ces expériences monstrueuses dont personne n’osait parler, notamment grâce à l’appui et la complicité active d’Anne Sinclair. J’ai traversé les camps au Soudan. J’ai vu le sordide et désespérément ordinaire marché des corps humains, aussi bien en Asie qu’à Cuba, j’ai regardé dans les yeux ces êtres qui n’ont qu’une chose à vendre, leur corps, qui n’ont d’autres possibilités dans la vie que de subir ce qu’on appelle d’un nom un peu léger : le « tourisme sexuel ». J’ai beaucoup lutté contre cela. Et à ce moment de ma vie pourtant bien remplie, ce qui m’habite, c’est la chose humaine, le regard vers l’autre, sa souffrance,qui me touche plus que tout ce qui m’a été donné de vivre par ailleurs, dans le monde futile des paillettes.
    Â 
    Ma vie a souvent été une traversée de miroirs. Je pouvais passer un moment magnifique à l’Élysée en compagnie de Philippe Douste-Blazy pour un dîner avec la reine d’Angleterre (ce qui est offert quand même à très peu de gens). Ensuite, avoir un entretien avec Rania de Jordanie, pouvoir parler avec cheikh Fahd Bin Jassim Bin Muhamad Al-Thani, Premier ministre du Qatar, puis faire plaisir au chauffeur du Quai d’Orsay, en l’amenant chez Johnny dont il était fan absolu, et passer la soirée avec Johnny et Laeticia, à nager avec nos enfants dans la piscine de leur maison près de Paris. Tout cela s’enchaînait parfois dans les mêmes vingt-quatre heures.
    Â 
    Comment raconter cette vie ? Je voudrais essayer de vous dire que si j’ai connu l’éclat, le pouvoir et l’argent, j’ai en même temps été touchée par les souffrances extrêmes. Et comme je suis une femme probablement trop sensible, je ne peux pas voir souffrir quelqu’un à côté de moi et passer mon chemin, j’ai donc toujours fait en sorte de pouvoir m’arrêter là où l’on souffrait. Même si cela n’était pas mon rôle ni ma fonction de m’en préoccuper, j’ai fait de mon mieux.

I
    Le petit monde de
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