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Amours, Délices Et Orgues

Amours, Délices Et Orgues

Titel: Amours, Délices Et Orgues
Autoren: Alphonse Allais
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gonfler leurs sacrés caoutchoucs ! Si vous ne voulez pas être assommé, f…ez le camp ! »
    – Les brutes, interrompit quelqu’un.
    – Et cela se passe au dix-neuvième siècle ! remarqua un autre.
    – Alors, que fîtes-vous ? s’informa un troisième.
    – Dame ! ma pompe remise en place, je me disposais, tout penaud, à continuer ma route à pied, quand la vue d’une charcuterie m’inspira une idée géniale…
    – Une charcuterie ?
    – Oui, vous allez voir. J’entrai chez le charcutier et je lui achetai deux mètres soixante de boudin cru que j’introduisis dans mon pneu.
    – Du boudin ?
    – Parfaitement, du boudin ! Et, depuis ce jour-là, je ne roule plus que sur boudin, et je m’en trouve très bien.
    Alors l’un de ces messieurs observa, au milieu du silence général :
    – Vous n’avez rien inventé cher monsieur. Bien avant votre pneu à boudin ; on se servait du ressort également à boudin ; et on s’en sert encore dans nombre d’industries.
    Le petit-neveu de M. de Crac sembla vexé de cette priorité.
     
    UN POINT DE DROIT
    – Cet homme-là ! avait coutume de dire Madame Citronnier dans son langage trivial et parfois excessif, cet homme-là me tromperait sur la tête d’un teigneux !
    Patente exagération, car, en dehors de la question de propreté, la tête d’un teigneux se prête mal à l’exécution d’un pourchas d’amour.
    Néanmoins, on peut dire sans crainte d’exagération que M. Citronnier trompait sa femme sur une vaste échelle, ce qui n’est déjà pas si commode, croyez-le bien !
    Bref, M. Citronnier était un de ces maris si coureurs, si coureurs, que Willy n’hésiterait pas à imprimer d’eux qu’ils ont la manie adultérine (de lièvre).
    – Je ne te demande qu’une chose, mon ami, répétait souvent la grosse Madame Citronnier, c’est de ne pas me tromper au domicile conjugal, parce que, sans ça !…
    Sans ça !… C’était son quos ego !
    M. Citronnier se l’était tenu pour dit et, s’il continuait à tromper sa femme sur une vaste échelle, il s’arrangeait de manière à ce que cet accessoire fût situé en dehors du logis matrimonial.
    Un jour, pourtant, il faillit être pincé.
    … Tous les ans, pendant l’été, M. et Madame Citronnier louent une petite villa, tantôt dans les environs de Paris, tantôt au bord de la mer.
    Cette année, ils ont loué pour la saison, aux environs de Cabourg, un pavillon dont l’architecture rappelle vaguement celle des villes italiennes et que, pour cette raison, le propriétaire a spirituellement baptisé Asti-Cottage .
    Asti-Cottage est une demeure charmante, avec petit jardin et vue sur la mer.
    Malheureusement pour la pauvre Madame Citronnier, cette vue sur la mer se double d’une autre vue sur le jardin d’à côté, et dans le jardin d’à côté vaque sans cesse une jolie petite bonne, fraîche comme une petite pomme d’api et, comme ce fruit, rondelette.
    Dès la première aperçue de l’accorte servante, l’inflammable cœur de M. Citronnier s’était mis à flamber, comme si un fumeur imprudent y avait jeté une allumette non éteinte.
    M. Citronnier, fort joli homme encore, et de mimique habile, ne fut pas long à faire agréer sa flamme.
    Bientôt, les yeux de la petite bonne se dénuèrent de toute sauvagerie à l’égard de notre galantin.
    Et quand la grosse Madame Citronnier demandait à son mari :
    – Tu ne sors pas avec moi ?
    – Non, répondait l’hypocrite époux, je me sens un peu mal à la tête. Sors seule, je te rejoindrai sur la plage, dans une heure.
    Contre le mur, alors, dans le coin le plus sombre des jardins, deux échelles se dressaient, l’une d’ Asti-Cottage , l’autre dans le Chalet des Gratte-Culs .
    Je dois à la vérité l’hommage de déclarer que les choses n’allaient pas plus loin que de simples baisers et des gestes tendres.
    Citronnier n’aurait pas demandé mieux que la consommation immédiate d’actes plus définitifs, mais Césarine, comme le lièvre et peut-être dans la crainte d’un lapin, préférait attendre.
    La suite, vous la devinez.
    Un beau jour, Madame Citronnier rentra inopinément et surprit nos deux amoureux en la susdite posture.
    Sans mot dire, elle sortit sur la pointe des pieds et amena deux témoins, un juge de paix en retraite, et son jardinier.
    – Qu’y a-t-il donc ? s’informait le vieux magistrat.
    – Vous allez voir.
    Tout occupés à leur gracieuse besogne, les
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