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4 000 ans de mystifications historiques

4 000 ans de mystifications historiques

Titel: 4 000 ans de mystifications historiques
Autoren: Gérald Messadié
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prisonnier du prisme de sa culture et suit des schémas de pensée autocentrés. Le cas de Galilée est à cet égard exemplaire : jusqu’à lui et à Copernic – qui ne publia pas ses conclusions –, les autorités intellectuelles et spirituelles de l’Occident tenaient que la Terre était le centre de l’univers. Aucune démonstration ne les aurait convaincus du contraire ; c’est un phénomène connu en psychologie sous le nom de dissonance cognitive. L’esprit se refuse à admettre des évidences contraires à ses convictions.
    Au XXI e siècle, l’historien Jack Goody  (2) a démontré que des historiens éminents avaient commis la même erreur ; ils avaient interprété l’histoire selon un angle européen. Ils décrivaient, par exemple, la découverte du sucre et des épices comme un phénomène européen et ne se souciaient pas de savoir comment d’autres civilisations les avaient découverts, avant l’Europe. Le cas le plus pittoresque est celui du père missionnaire Labat (1663-1738), qui avait déclaré que les Arabes ne connaissaient pas l’usage de la table, et Fernand Braudel cite un observateur selon qui les chrétiens ne s’assoient pas par terre pour manger, comme les musulmans. Formidable erreur : l’Orient connaissait la table depuis les pharaons. Et quant à s’asseoir par terre pour manger, il suffit d’avoir un peu voyagé pour savoir que les animistes, les bouddhistes et bien d’autres le font.
    Inconsciemment, les historiens suivaient un schéma de pensée destiné à prouver la supériorité de l’Occident chrétien sur le reste du monde.
    Cette déformation s’explique. L’histoire est un chaos de données et nulle intelligence ne peut se résoudre à ce qu’elle, sa famille, ses proches et ce qu’elle considère comme son peuple ne soient que des fétus entraînés dans des tourbillons aveugles, dont nul ne sait où ils vont. C’est le problème fondamental de la philosophie : nul n’accepte l’absurde. Un tel consentement serait immoral, parce que celui qui se résout à l’injustice devient lui-même injuste.
    Les études d’éthologie du XX e siècle l’ont démontré : même l’animal refuse l’injustice.
    Pour l’historien, il s’ensuit que sa mission est de donner un sens à la masse de faits qu’il est chargé de traiter pour en offrir un récit selon lui cohérent. On ne peut pas douter de la sincérité de tous ceux qui, dans le système d’enseignement de la III e République, étaient convaincus que la république était un progrès social par rapport à la royauté, de même que l’automobile était un progrès par rapport à la traction animale. Cette idée prouvait à leurs yeux qu’il y avait bien un sens dans l’histoire. De ce fait, l’historien se devait de distinguer ceux des faits qui le démontraient, quitte à négliger, occulter ou oublier les autres. Ce fut ainsi que les faits qui risquaient de nuire à l’aura de la Révolution de 1789, tels que les massacres de Vendée, étaient mis sous le boisseau. La tendance perdura jusqu’au XX e siècle : il est alors difficile de trouver, dans l’abondante littérature consacrée à Robespierre, une mention de sa tentative de suicide, peu avant son arrestation ; certains ouvrages étrangers allèguent même que Robespierre aurait été blessé par un soldat nommé « Melda » ; à une consonne près, d’autres disent franchement « Merda »… on devine l’intention.
    Dans son cas, l’amnésie aggrava la fabrication : il y avait bien cent personnes autour de Robespierre à ce moment-là, mais personne ne se souvint de rien.
    Ainsi, l’idée s’affirme et se transforme en mythe.
    L’historien est un mythificateur qui vise à montrer que son monde est supérieur aux autres ; le mystificateur, lui, cherche à montrer qu’il est lui-même supérieur aux autres. La différence entre les deux est ténue.
    Jadis vécut peut-être un homme d’une force inouïe. Celle-ci était si prodigieuse qu’elle ne pouvait s’expliquer que par une origine surnaturelle : cet homme devait avoir été enfanté par un dieu amoureux d’une mortelle. Demi-dieu, donc toujours asservi à la condition humaine, il était donc voué à la mort. Mais même la mort d’un demi-dieu est difficile à admettre : il fallait qu’il se la donnât lui-même. Et pourquoi ? Seul le désespoir peut pousser un demi-dieu au suicide, et le plus noble est l’amour.
    Ce fut ainsi qu’Hercule, le
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