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1914 - Une guerre par accident

1914 - Une guerre par accident

Titel: 1914 - Une guerre par accident
Autoren: Georges Ayache
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qu’elle avait alors
éprouvé. Une Chotek succédant à la grande Marie-Thérèse, l’horreur
absolue ! À l’époque, on avait crié à la mésalliance.
L’« intrigante », comme on disait, avait beau se réclamer de la
vieille noblesse de Bohême, c’était peine perdue.
    La situation avait agacé l’empereur. Décidément, il ne se
sentait aucune affinité avec ce neveu qui n’aurait jamais dû se retrouver en
situation d’hériter un jour de la couronne des Habsbourg. Mais il n’avait pas
le choix. Son fils unique, Rodolphe, s’était suicidé une dizaine d’années plus
tôt. Il était vain de vouloir refaire l’Histoire.
    Selon les règles de succession à la couronne,
François-Ferdinand aurait dû carrément renoncer au trône en épousant Sophie
Chotek. Nombreux étaient ceux qui le souhaitaient à la cour. Parmi eux, le
prince Montenuovo, premier chambellan et grand maître d’un protocole issu de la
royauté espagnole. Tel un cerbère, il s’était donné pour mission de protéger
coûte que coûte les prérogatives impériales. Il le faisait avec un zèle
d’autant plus obsessionnel que lui-même en était exclu.
    Quoique procédurier dans l’âme, l’empereur était tout de
même capable d’avoir une vision politique des choses. Or, dans l’éventualité
d’un renoncement de François-Ferdinand, son frère cadet Othon deviendrait
l’héritier légitime du trône austro-hongrois. Et de cela, il ne pouvait être
question. Othon était un débauché notoire qui passait le plus clair de son
temps à faire la bringue au Sacher ou dans des lieux de luxure. Un scandale
éclaboussant la monarchie des Habsbourg eût été inévitable. À tout prendre,
mieux valait une mésalliance.
    François-Joseph s’était résigné à un compromis. Son neveu
conserverait son rang de succession mais son épouse en serait écartée tout en
étant honorée du titre de princesse souveraine. Pour sauver les apparences,
l’empereur l’élèverait plus tard au rang de duchesse de Hohenberg.
    Le prince de Montenuovo n’en veillait pas moins avec son
esprit tatillon. Infinies étaient les ressources de l’étiquette impériale pour
infliger au couple des humiliations sournoises. Lors des incessantes cérémonies
publiques, il s’assurait que Sophie soit dûment placée en queue de cortège
après les membres de la famille impériale, enfants en bas âge compris. Au
théâtre ou à l’opéra, la duchesse était séparée de son époux, son rang de
préséance ne lui permettant pas d’avoir accès à la loge impériale. Quand
l’archiduc arrivait, on ouvrait les portes à deux battants. On en refermait un
quand sa femme venait à passer.
    Même chez elle, au château du Belvédère, il était défendu à
Sophie d’apparaître lors de la visite d’un souverain étranger. Dans sa finesse
perverse, Montenuovo avait décrété qu’en de telles circonstances, l’existence
d’une hôtesse pouvait être reconnue mais d’une manière invisible : ainsi,
à table, était prévue une chaise vide qui devait rester ostensiblement
inoccupée…
    Cautionnées par l’empereur, de telles brimades étaient
regardées par François-Ferdinand comme un affront intolérable. Mais il n’y
pouvait pas grand-chose. Il n’était pas le maître, pas encore.
    Peu avant le déplacement du couple à Sarajevo, le protocole
s’était opposé à ce que les honneurs militaires lui fussent rendus sur place.
La duchesse de Hohenberg n’était pas habilitée à les recevoir. On avait en
conséquence ordonné aux 40 000 hommes de troupe de la capitale
bosniaque de se retirer, laissant l’archiduc sans réelle protection.
    Les gardiens de l’étiquette impériale étaient-ils au courant
de l’entrevue qui s’était déroulée le 5 juin à Vienne, entre le ministre
en charge de l’administration de la Bosnie-Herzégovine, Leo von Bilinski,
et l’ambassadeur de Serbie à Vienne, Jovan Jovanovic ? Celui-ci s’était
départi des précautions diplomatiques d’usage :
    — La visite de l’archiduc va causer du mécontentement
parmi les Serbes de Bosnie. Comprenez-moi à demi-mot. Il vaudrait mieux
renoncer à ce voyage [7] .
    Bilinski avait affecté de prendre la chose à la
légère :
    — Vous êtes bien pessimiste, mon cher ambassadeur.
Rassurez-vous, nous avons aussi nos informations et elles font état d’un
apaisement en Bosnie. Tous ces gens là-bas sont en train de s’adapter. C’est
d’ailleurs leur
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