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Voyage au Congo

Titel: Voyage au Congo
Autoren: André Gide
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forêt tropicale. Quelques beaux papillons, semblables à de grands machaons, mais portant, à l’envers des ailes, une grosse macule nacrée. Chants d’oiseaux inconnus, que je cherche en vain dans l’épais feuillage. Un serpent noir très mince et assez long glisse et fuit.
    Nous cherchons à atteindre un village indigène, dans les sables, au bord de la mer ; mais une infranchissable lagune nous en sépare.
    27 juillet.
     
    Jour de pluie incessante. Mer assez houleuse. Nombreux malades. De vieux coloniaux se plaignent : « Journée terrible ; vous n’aurez pas pire »… Somme toute, je supporte assez bien. Il fait chaud, orageux, humide ; mais il me semble que j’ai connu pire à Paris ; et je suis étonné de ne pas suer davantage.
    Le 29, arrivée en face de Konakry. On devait débarquer dès sept heures ; mais depuis le lever du jour, un épais brouillard égare le navire. On a perdu le point. On tâtonne et la sonde plonge et replonge. Très peu de fond ; très peu d’espace entre les récifs de corail et les bancs de sable. La pluie tombait si fort que déjà nous renoncions à descendre, mais le commandant nous invite dans sa pétrolette.
    Très long trajet du navire au wharf, mais qui donne au brouillard le temps de se dissiper ; la pluie s’arrête.
    Le commissaire qui nous mène à terre nous avertit que nous ne disposons que d’une demi-heure, et qu’on ne nous attendra pas. Nous sautons dans un pousse, que tire un jeune noir « mince et vigoureux ». Beauté des arbres, des enfants au torse nu, rieurs, au regard languide. Le ciel est bas. Extraordinaire quiétude etdouceur de l’air. Tout ici semble promettre le bonheur, la volupté, l’oubli.
    31 juillet.
     
    Tabou. – Un phare bas, qui semble une cheminée de steamer. Quelques toits perdus dans la verdure. Le navire s’arrête à deux kilomètres de la côte. Trop peu de temps pour descendre à terre ; mais, du rivage s’amènent deux grandes barques pleines de Croumens. L’ Asie en recrute soixante-dix pour renforcer l’équipage – qu’on rapatriera au retour. Hommes admirables pour la plupart, mais qu’on ne reverra plus que vêtus.
    Dans une minuscule pirogue, un nègre isolé chasse l’eau envahissante, d’un claquement de jambe contre la coque.
    1 er août.
     
    Image de l’ancien « Magasin Pittoresque » : la barre à Grand-Bassam. Paysage tout en longueur. Une mer couleur thé, où traînent de longs rubans jaunâtres de vieille écume. Et, bien que la mer soit à peu près calme, une houle puissante vient, sur le sable du bord, étaler largement sa mousse. Puis un décor d’arbres très découpés, très simples, et comme dessinés par un enfant. Ciel nuageux.
    Sur le wharf, un fourmillement de noirs poussent des wagonnets. À la racine du wharf, des hangars ; puis, de droite et de gauche, coupant la ligne d’arbres, des maisons basses, aplaties, aux couvertures de tuiles rouges. La ville est écrasée entre la lagune et la mer. Comment imaginer, tout près, sitôt derrière la lagune, l’immense forêt vierge, la vraie…
    Pour gagner le wharf, nous prenons place à cinq ou six dans une sorte de balancelle qu’on suspend par un crochet à une élingue, et qu’une grue soulève et dirige à travers les airs, au-dessus des flots, vers une vaste barque, où le treuil la laisse lourdement choir.
    On imagine des joujous requins, des joujous épaves, pour des naufrages de poupées. Les nègres nus crient, rient et se querellent en montrant des dents de cannibales. Les embarcations flottent sur le thé, que griffent et bêchent de petites pagaies en forme de pattes de canard, rouges et vertes, comme on en voit aux fêtes nautiques des cirques. Des plongeurs happent et emboursent dans leurs joues les piécettes qu’on leur jette du pont de l’ Asie. On attend que les barques soient pleines ; on attend que le médecin de Grand-Bassam soit venu donner je ne sais quels certificats ; on attend si longtemps que les premiers passagers, descendus trop tôt dans les nacelles, et que les fonctionnaires de Bassam, trop empressés à les accueillir, balancés, secoués, chahutés, tombent malades. On les voit se pencher de droite et de gauche, pour vomir.
     
    Grand-Bassam. – Une large avenue, cimentée en son milieu ; bordée de maisons espacées, de maisons basses. Quantité de gros lézards gris fuient devant nos pas et regagnent le tronc de l’arbre le plus proche, comme à un jeu des quatre coins.
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