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Un caprice de Bonaparte

Un caprice de Bonaparte

Titel: Un caprice de Bonaparte
Autoren: Stefan Zweig
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devant cette porte... Allons, circulez...
     
    FOURÈS, ton goguenard.
     
    Et pourquoi donc, citoyen brigadier ? Vous plairait-il de m’expliquer pourquoi, juste à Belleville, rue Dufour, il est interdit de stationner ? Dites-le-moi, citoyen brigadier ! Donnez-m’en les raisons...
     
    L’AGENT, furieux.
     
    Je ne dois d’explication à personne ! Circulez, en avant, marche !...

     
    FOURÈS.
     
    Serait-ce parce que la maîtresse du Premier Consul habite ici ? La petite amie de Monsieur Bonaparte ? Hein ?... ( Surprise et ricanements dans l’assistance. Fourès, ironiquement aux autres .) Et voilà ! Voilà que le grand secret est dévoilé ! Maintenant vous savez pourquoi un honnête citoyen ne doit pas stationner devant cette maison !
     
    L’AGENT, hors de lui.
     
    Tu vas déguerpir immédiatement ! Pour la dernière fois je te le dis : fous-moi le camp !
     
    FOURÈS.
     
    La rue appartient au peuple, n’est-il pas vrai, citoyens ? ( Cris dans la foule Oui, bravo, bravo ! ) Cet homme nous a tout pris : nos députés il les a dispersés à la baïonnette, nos tribunaux du peuple il les a suspendus ! Seule la rue nous reste encore pour y parler librement. Et puisque nous ne pouvons obtenir justice, que les juges et les avocats sont vendus, il ne nous reste plus que la rue pour la réclamer ! Si nous avons envoyé au diable les aristos était-ce pour qu’à leur place ce soient les généraux qui viennent nous botter le cul ? Moi, on ne m’empêchera pas de dire la vérité.
     
    UN OUVRIER.
     
    Bravo ! Il a raison ! Ils recommencent à nous marcher sur les pieds ! Vive la République, vive la Révolution !

     
    L’AGENT, empoignant Fourès.
     
    Au nom de la loi, je vous arrête !
     
    FOURÈS, le repousse si violemment que l’agent tombe.
     
    Je t’apprendrai à mettre la main sur un soldat qui s’est battu à Jemmapes et en Egypte !... Il ne manquait plus que ça : se faire molester par un morveux qui n’a jamais senti l’odeur de la poudre.
     
    (Bagarre. L’agent, toujours à terre, lance un coup de sifflet strident.)
     
    FOURÈS.
     
    Tu peux toujours siffler ta frousse, je n’ai pas peur de sept de tes pareils. Je me mettrai tout seul entre les mains de la justice ! ( Se tournant vers les assistants .) Ecoutez-moi bien tous, tant que vous êtes ! Il faut que vous sachiez ce qui se joue ici ! Je suis le lieutenant Fourès et la femme là-dedans est ma femme ! Bonaparte me l’a volée, c’est par la contrainte qu’il l’a prise à son lieutenant. Là-bas, en Egypte où il était le maître tout-puissant, il n’avait rien à craindre, tout marchait à souhait, mais ici, mon gaillard semble être un peu gêné aux entournures. Car il faut que la vérité se fasse jour ! Il faut que tout le monde en France sache comment Bonaparte respecte les droits de ses hommes. Il faut que tout le monde apprenne à le connaître, notre seigneur et consul. Le peuple décidera !
     
    UN OUVRIER, rapidement .
     
    Tire-toi ! Les voilà qui s’amènent ! Nous te couvrirons jusqu’à ce que tu aies disparu, mais grouille-toi !

     
    FOURÈS.
     
    Il n’y a plus de recul à présent, il faut aller jusqu’au bout ! Il faut qu’on sache si dans notre République il n’y a de justice que pour un seul, ou si elle existe pour tous ! Et s’ils l’emportent sur moi et que je ne revienne plus, dites-vous bien, camarades, que c’en est fini de la liberté en France !
     
    (Quatre agents arrivent au pas gymnastique.)
     
    PREMIER AGENT.
     
    Emparez-vous de cet homme ! Il a injurié le Premier Consul et prononcé des paroles subversives contre la République.
     
    UN OUVRIER.
     
    Mensonges ! Il n’a pas dit un mot contre la République !
     
    DEUXIEME OUVRIER.
     
    Si l’histoire avec la femme est vraie, il s’est passé quelque chose de sale et la femme doit sortir ! ( Les autres ouvriers, révoltés et menaçants. ) Bas les pattes, l’agent ! Il faut que la femme se montre ! Personne ne doit toucher à cet homme : assez d’injustice à son égard !
     
    FOURÈS.
     
    Laissez donc, les gars, pas de violence pour moi ! Ça ne fait que m’amuser ! Je leur chanterai quelque chosesur le général Bonaparte aux gens de la justice. Le lieutenant Fourès n’a pas peur : c’est un autre qui semble connaître ce qu’est la trouille ! ( Aux agents, sur un ton de commandement. ) En route ! Deux devant et deux derrière moi ! Vous avez ma parole que je
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